L'édito de Philippe Bailly

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Loi « Macron » : impacts potentiels sur le marché de la publicité digitale

Déposé en 1re lecture à l’Assemblée nationale, le projet de loi pour la Croissance et l’Activité  a été adopté par la Commission spéciale, dimanche 18 janvier. Dit Loi Macron, le texte a été amendé par une disposition qui affecte le secteur de la publicité digitale.

Extension de l’obligation de transparence aux nouveaux acteurs de la publicité
Le président de la Commission spéciale M. François Brottes (socialiste), a déposé un amendement le 8 janvier dernier visant à appliquer les principes de la loi du 29 janvier 1993, dite loi Sapin, aux nouveaux acteurs évoluant sur le marché de la publicité digitale.
Si l’amendement est finalement intégré au projet de loi Macron (le texte devant être examiné en séance publique, puis au Sénat, est susceptible de modifications futures), l’article 20 de la loi Sapin sera modifié.
Pour rappel, son 1er alinéa prévoit que « tout achat d’espace publicitaire ou de prestation ayant pour objet l’édition ou la distribution d’imprimés publicitaires ne peut être réalisé par un intermédiaire que pour le compte d’un annonceur et dans le cadre d’un contrat écrit de mandat. » . L’amendement adopté par la Commission étend cette disposition aux acteurs digitaux de la publicité, en insérant les mots « sur quelque support que ce soit » à la suite des mots « tout achat d’espaces publicitaires ».

En outre, l’amendement rectifié en Commission prévoit une modification de l’article 23 de la loi précitée, qui définit certaines obligations incombant au vendeur d’espace publicitaire :
–    en qualité de support ou de régie, il rend compte directement à l’annonceur dans le mois qui suit la diffusion du message publicitaire des conditions dans lesquelles les prestations ont été effectuées.
–    en cas de modification devant intervenir dans les conditions de diffusion du message publicitaire, le vendeur d’espace publicitaire avertit l’annonceur et recueille son accord sur les changements prévus. Il lui rend compte des modifications intervenues.
–    Dans le cas où l’achat d’espace publicitaire est effectué par l’intermédiaire d’un mandataire, les obligations prévues à l’alinéa précédent incombent tant au vendeur à l’égard du mandataire qu’au mandataire à l’égard de l’annonceur.

L’amendement adopté par la Commission spéciale de l’Assemblée étend ces obligations – dont les modalités seront précisées par décret en Conseil d’Etat – aux secteurs de la publicité digitale, en ajoutant l’alinéa suivant :
« Dans les secteurs de la publicité digitale, les modalités d’application des obligations de compte rendu définies aux premier et troisième alinéas du présent article sont précisées par décret en Conseil d’État. ».
Dans son exposé des motifs, François Brottes rappelle que la loi Sapin a défini les règles applicables au secteur de la publicité, secteur « auparavant caractérisé par une grande opacité, peu favorable à une bonne allocation des ressources », en imposant notamment une obligation de transparence. Selon François Brottes, « avec l’émergence des nouveaux médias, de nouveaux modes de commercialisation des espaces publicitaires se sont développés et de nouveaux acteurs de cette commercialisation sont apparus ».

Les Trading Desks d’agence en ligne de mire ?

Le marché de la publicité digitale, relativement récent, connaît un développement rapide et représente le principal levier de croissance dans la plupart des pays. Il ne cesse d’évoluer et de nouveaux formats, services, modèles apparaissent, qui changent drastiquement les pratiques publicitaires.
Sur le marché publicitaire, la dernière révolution en date est celle de l’explosion de la vente aux enchères, automatisée et en temps réel (real time bidding), concrétisée par la montée en puissance des Ad Exchanges et l’intervention de nouveaux acteurs, dont le statut doit être défini au regard de la loi Sapin, entre prestataires techniques et/ou intermédiaires. Ces questions concernent prioritairement les Trading desks.
Selon Maxime Jaillet, Responsable des affaires réglementaires et institutionnelles du GESTE, l’applicabilité de la loi Sapin aux intervenants de l’e-pub, dont les AdExchanges, a été initialement contestée par certains acteurs. Ces doutes ont ensuite été dissipés par la jurisprudence et l’Autorité de la concurrence. La loi Sapin s’appliquerait ainsi aux achats d’espaces publicitaires sur Internet réalisés via un intermédiaire, quel que soit le type d’inventaire (display, search) ou le mode de tarification (CPM, CPC, CPA).
L’amendement de M. Brottes, s’il est conservé dans le texte final, apporterait ainsi une clarification législative, déjà sollicitée par l’Autorité de la Concurrence en 2010 , et très attendue de la part des annonceurs. A cet égard, l’UDA avait publié en juin 2013 les résultats d’une étude de la Fédération mondiale des Annonceurs  montrant que 83 % des annonceurs internationaux constataient que les trading desks étaient moins transparents que les modes d’achat classiques et que leur fonctionnement, basé sur l’achat/revente d’espaces internet, pouvait influencer leurs recommandations. Jean-Pierre Bozo, Président de l’UDA, avait rappelé à nouveau en mars 2014 les préoccupations des annonceurs concernant certaines « dérives ».

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