L'édito de Philippe Bailly

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Nouvel épisode dans la bataille des codecs vidéo avec le lancement par les géants du web d’un nouveau consortium

Le 1er septembre 2015, 7 sociétés et non des moindres, ont annoncé leurs collaboration au sein de l’Alliance for Open Média pour créer ensemble la technologie de compression vidéo de demain. Parmi ces acteurs, on retrouve Google, Microsoft, Amazon, Netflix, Mozilla, Cisco, et Intel mais la liste pourrait s’élargir rapidement. Chacun apportera son expertise et son savoir-faire dans les technologies de compression : Cisco avec son codec Thor, VPx pour Google, Daala pour Mozilla…

Le but est de proposer un nouveau format libre de droits d’ici la fin de l’année 2016 pour contrer l’appétit financier du consortium HEVC Advance qui gère les redevances liées au codec HEVC-H.265[1]. Pour le format H.264, la MPEG-LA[2] avait obtenue de tous les propriétaires des brevets qu’ils les mettent dans un pot commun et se partagent les revenus générés. Le principe était simple. Il fallait payer des royalties sur les encodeurs et les produits permettant de décoder. Les choses sont plus compliquées concernant le successeur H.265. Un nouveau groupement industriel baptisé HEVC Advance (détenant plus de 500 brevets de poids lourds de l’industrie comme General Electric, Technicolor, Dolby, Philips, ou encore Mitsubishi Electric), issu de MPEG-LA mais n’acceptant pas les règles imposées par ce dernier en matière de redevance a décidé de demander de nouvelles royalties sur toutes les diffusions en ligne. Concrètement, outre des prix plus élevés, les royalties concernent donc également les propriétaires et hébergeurs de contenus et plus seulement les constructeurs de matériels.

L’Alliance for Open Média souhaite donc promouvoir un format standardisé ouvert et gratuit pour le web pour faire face au développement rapide de H.265/HEVC qui profite en ce moment de l’engouement pour la vidéo au format UltraHD 4K. Le nouveau codec ne sera pas breveté et sera donc utilisable par tous les acteurs sans versement de royalties. Cette nouvelle technologie de compression sera également optimisée pour le web, compatible avec tous les types de terminaux et utilisable quel que soit le débit de connexion. Il devra également être peu gourmand en ressources de calcul et suffisamment flexible pour être utilisé dans des applications professionnelles, commerciales ou grand public. Il est donc logique de retrouver en première ligne les géants streaming qui sont particulièrement irrités par la politique de redevances menée par HEVC Advance. Pour Netflix par exemple, il serait question de 0,5% des revenus générés par la diffusion de flux vidéo. De même, les constructeurs de terminaux mobiles pourraient devoir verser 80 centimes par appareil vendu[3], sans plafonnement. Une alternative au codec HEVC est donc devenue une priorité pour les acteurs du streaming (Youtube, Netflix, Amazon), les éditeurs de navigateurs web comme Microsoft (Edge), Mozilla (Firefox) ou Google (Chrome).

La puissance des entreprises représentées dans la nouvelle alliance, de même que son mode de fonctionnement collaboratif sont des atouts essentiels pour le succès d’un nouveau codec à la fois sur le marché de la diffusion OTT, des navigateurs internet et des terminaux. Cependant, il manque encore de grands noms au premier rang desquels Apple, résolument dans le camp du HEVC et directement impliqué dans la MPEG-LA. Une fois de plus, Cupertino fait cavalier seul et prouve que sa stratégie d’intégration verticale lui confère une importance majeure pour bloquer ou accélérer les initiatives du marché.

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[1] Se référer aux flashs n° 660, 697 et 752 sur les enjeux autour des différents codecs

[2] MPEG LA : société qui gère la société qui gère les brevets et accords de licences liés aux codecs de compression audio/vidéo de ses membres

[3] http://blog.streamingmedia.com/2015/07/new-patent-pool-wants-share-of-revenue-from-content-owners.html

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