L'édito de Philippe Bailly

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Galaxy Note 7 de Samsung : l’ombre d’Apple et de Volkswagen ; le sourire de Google

9 janvier 2007 / 11 octobre 2016. Une décennie ou presque, mais un contraste frappant : le 9 janvier 2007, Steve Jobs présente le premier iPhone, dont Apple annonçait en juillet dernier qu’il a franchi le cap du milliard d’exemplaires vendus ; au terme de 8 semaines de polémiques, et après avoir déjà rappelé 2,5 millions d’appareils, Samsung annonce le 11 octobre 2016 le retrait du Galaxy Note 7.

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Si le mouvement « est spectaculaire, il n’est pas le premier à mettre en lumière les défaillances potentielles des batteries lithium-ion », indique les Echos, citant l’exemple de Dell en 2006, qui avait rappelé « plus de 4 millions de batteries équipant ses ordinateurs portables, dont quelques unités s’étaient embrasées », ou celui de Boeing en 2013 « qui avait dû maintenir au sol pendant trois mois ses 787 Dreamliner après la découverte de batteries en surchauffe dans certains appareils ». Les commentaires sont nombreux, au-delà, à pointer le « volontarisme » avec lequel Samsung aurait accéléré la sortie du Note 7, le 19 août, afin de brûler la politesse à l’iPhone 7 d’Apple. Ne pas confondre vitesse et précipitation, disait autrefois la sagesse populaire ; ne pas croire non plus que l’accélération qui caractérise le monde numérique permet de s’affranchir de certaines réalités tangibles.

Et à défaut d’un Note 7, on serait tenté pour Noël d’offrir aux dirigeants de Samsung la volumineuse biographie que Walter Isaacson a consacrée à… Steve Jobs : l’obsession de la simplicité dans l’expérience utilisateur, de l’esthétique et du design, mais aussi de la qualité de l’ensemble des composants (« Jobs would recall the lessons taught by his father about the attention worth paying, even to the things unseen ») en ressortent comme des thèmes récurrents.

S’agissant au-delà des conséquences pour Samsung, la chute enregistrée par l’action sur les marchés financiers (-7,5%, soit une capitalisation réduite de 18 Mds$) reflète la double crainte que peut nourrir le groupe.

L’impact direct sur ses résultats à court terme est considérable : « Le rappel de 2,5 millions de smartphones aurait déjà coûté 1,2 milliard d’euros à Samsung, note Le Figaro, auquel s’ajoute la même somme au titre de la perte sèche de ventes attendues. Samsung espérait vendre 19 millions de Galaxy Note 7 sur la durée de vie de l’appareil, soit une douzaine de mois. L’addition est alourdie par les conséquences sur le reste de la gamme Samsung, chiffrées à 1,8 milliard d’euros par Nomura ».

Treize mois après le déclenchement du « Diesel Gate » le 18 septembre 2015, le précédent Volkswagen illustre que l’effet se jouera aussi en effet dans la durée, au travers des traces que le Galaxy Note 7 pourrait laisser dans l’esprit du public.

« Durant tout l’été, les ventes mondiales d’automobiles ont continué de s’accélérer, en progressant de 8 % sur un an en août et en relevant à près de 6 % leur avance depuis le début de l’année, indiquait fin septembre une note de la banque Scottia. Elles n’ont jamais aussi fortement progressé depuis trois ans ». A l’inverse, les ventes de la marque Volkswagen ont reculé au 1er semestre de 0,7% dans le Monde et, en France, les -3,2% enregistrés entre janvier et août tranchent avec la progression de 7% du marché dans son ensemble.

Quant au classement 2016 des Best global brands publié ces derniers jours par Interbrands, il illustre ce « deuxième effet Kiss Cool », moins tangible mais tout aussi significatif : valorisée à 11,4 Mds$ (-9%), la marque Volkswagen s’y classe en 40e position, en retrait de 5 places par rapport à 2015. Dans le même temps, Toyota (53,6 mds$) gagne 9% et se positionne en 5e position, BMW est 11e (41,5 Mds$, +12%), Honda est 21e (22,1 Mds$, -4%), Ford 33e (12,9 Mds$, +12%), Hyundai 35e (12,5 Mds$, +11%), Audi 38e (11,8 Mds$, +14%)…

Utiliser l’une des expressions favorites de Steve Jobs pour évoquer Google peut apparaître osé. One more things, quand même, concernant l’évolution des positions sur le marché des smartphones. Le retrait du Galaxy Note 7 au début du trimestre commercial le plus actif de l’année, s’il fragilise Samsung, pourrait aussi faire le bonheur de Google, au moment où le groupe vient de lancer ses Pixel et Pixel XL sur le segment des équipements haut de gamme que visait le groupe coréen. Le match des écosystèmes Android et iOS va donc pouvoir se poursuivre sous les sapins de Noël.