L'édito de Philippe Bailly

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CES 2017 : intelligence artificielle et opportunisme marketing

Prolongeant l’omniprésence de la reconnaissance vocale, intelligence artificielle et machine learning ont logiquement représenté deux autres buzzwords du CES 2017 : comme le relevait le chief evangelist d’Alexa Dan Isbitski – dans une salle bondée – la première constitue une nouvelle modalité d’échange avec la machine, une nouvelle interface ; les secondes doivent traduire en requêtes et actions les commandes lancées par les utilisateurs et sont donc, tout à la fois, plus ambitieuses, plus subtiles… et plus difficiles à évaluer.

Conserver la simplicité aux skills développés

C’est ainsi avec une certaine modestie que celui-ci exposait lors de sa conférence les principes guidant la programmation de skills, les applications permettant de communiquer avec Echo (5 millions d’unités vendues à ce jour) ou autres terminaux intégrant la technologie Alexa (boitiers Fire TV, montres Pebble, voitures Ford… ; 7000 skills ont été développés à ce jour grâce à l’architecture ouverte offerte par Amazon, contre 1000 fin juin 2016) : apporter de la valeur d’usage, bien sûr, mais aussi rester simple dans les services proposés, et penser de façon itérative les améliorations qui pourront leur être apportées.

alexa

Traduction : les commandes basiques (effectuer une recherche sur Internet, allumer la lumière, changer de chaîne…) sont d’ores et déjà bien maîtrisées et peuvent être facilement déclinées (la démonstration live du développement d’un skill basique en moins de 30 minutes était assez bluffante). La maîtrise de scénarios plus complexe est en revanche à la fois plus lente… et moins automatique que ce que l’expression machine learning donne à penser : il faut 18 mois pour aller au bout du processus d’apprentissage d’une application avancée, et les améliorations progressives sont encore surtout le fruit de consultation quotidienne des rapports de bugs, et d’adaptations… manuelles… du code, expliquaient plusieurs professionnels rencontrés lors du CES.

De l’intelligence artificielle à l’e-réputation ?

Mais si la prudence des acteurs les plus avancés mérite d’être relevée, le bruit médiatique dont bénéficie l’intelligence artificielle pousse aussi certaines entreprises à l’instrumentaliser à des fins marketing… jusqu’à l’absurde. Le cas d’une société française exposant dans l’Eurêka Park (l’espace dédié aux start-up innovante) en est sans doute l’illustration la plus caricaturale : sa dirigeante y racontait des prestations d’e-réputation assez bien balisées, pour ne pas dire banalisées (screening du Web et des réseaux sociaux, production de contenus complémentaires visant à « noyer » les articles négatifs dans les moteurs de recherche…), mais ajoutait que l’intelligence artificielle rendait particulièrement pertinente ses interventions. Relancée sur cette valeur ajoutée tirée de l’AI, elle expliquait, placide : « certains termes peuvent être négatifs ou positifs en fonction du contexte dans lesquels ils sont employés ou de ceux auxquels ils sont appliqués. Le mot « prison », par exemple, est généralement connotée. Mais pour un avocat qui a permis à ses clients d’éviter la prison, il est à l’inverse plutôt valorisant. C’est pour la gestion de ces contextes que nous utilisons l’intelligence artificielle ». La courtoisie aura poussé à ne pas lui faire valoir qu’il s’agissait en l’espèce d’une adaptation de thésaurus assez classique…

L’anecdote, au-delà du sourire qu’elle provoque, illustre une des difficultés auxquelles les visiteurs du CES sont aujourd’hui confrontés : le passage de l’évolution matérielle des devices immédiatement visible et perceptible (taille ou épaisseur des écrans, résolution de l’image…) à l’innovation logicielle, moins tangible, plus subtile, et donc plus complexe à évaluer en quelques minutes de démonstration.

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