L'édito de Philippe Bailly

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Le projet de loi allemand sur les fake news notifié à la Commission européenne

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Le 27 mars dernier, le Gouvernement allemand a notifié à la Commission européenne un projet de loi déposé le 14 mars par le Ministre de la justice allemand, Heiko Maas (SPD), visant à réprimer les discours de haine et les informations mensongères sur les réseaux sociaux. Ce texte, qui intervient dans un contexte où l’Allemagne a décidé de se mettre en première ligne dans la lutte contre la désinformation, propose l’introduction de règles légales contraignantes afin d’inciter les réseaux sociaux à renforcer et accélérer le traitement des plaintes relatives aux contenus haineux et illicites.

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Dans son exposé des motifs, notifié[1] à la Commission européenne, Heiko Maas constate que « la plupart des exploitants de réseaux ne prennent pas suffisamment au sérieux les plaintes des utilisateurs contre les messages de haine ». Des tests réalisés par le Gouvernement allemand au début de l’année ont révélé que Facebook effaçait 39% des propos délictueux signalés par ses utilisateurs, contre 1% pour Twitter.

Ce projet de loi a vocation à remédier aux « carences » des réseaux dans la gestion des plaintes et à les contraindre à prendre les mesures nécessaires pour lutter efficacement contre les messages manifestement illicites (incitation à la haine, fake news…) qui devront être traités et supprimés dans un délai de 24 heures. Ce délai est fixé à une semaine pour les contenus dont la légalité est discutable. Les réseaux sociaux devront également faire en sorte que les contenus supprimés ne soient pas publiés à nouveau.

Les opérateurs de grands réseaux sociaux ayant une influence sur l’opinion publique se verront imposer des obligations plus lourdes que les petites entreprises ou « start-ups ». Les plateformes médiatiques offrant leurs propres contenus journalistiques et rédactionnels ne sont pas concernées par le projet. La définition des réseaux sociaux demeure assez large en incluant non seulement l’activité de diffusion de contenus auprès du public mais aussi celle d’échange de contenus entre utilisateurs dans une communauté fermée (gated community).

Quant aux contenus visés, l’article 1er du projet de loi précise qu’il s’agit des « contenus illégaux qui réunissent les éléments objectifs de l’infraction aux normes pénales qui permettent de lutter contre les crimes inspirés par la haine ou d’autres contenus illicites ».

Enfin, dans un souci de transparence, les réseaux sociaux devront rendre un rapport détaillant aussi bien les données statistiques sur le volume des plaintes que la procédure choisie pour supprimer immédiatement les contenus illicites. Ils devront aussi faire apparaître les informations sur les équipes chargées du traitement des plaintes.05

En cas de violation, les réseaux sociaux pourront se voir infliger des amendes administratives pouvant aller de 5 millions d’euros pour le mandataire désigné, qui peut être personnellement condamné, jusqu’à un montant maximal de 50 millions d’euros pour une personne morale.

[1] Conformément à la directive 2015/1535, un Etat membre doit notifier à la Commission européenne tout projet de règles relatives aux services de la société de l’information. Une période de statu quo de trois mois  débute au cours de laquelle l’État membre auteur ne peut pas adopter la règle en question, permettant à la Commission et aux autres États membres d’examiner le texte notifié et de formuler des observations. Sur avis circonstancié, la Commission européenne peut étendre la période d’un mois supplémentaire. À la fin de la procédure, les États membres sont tenus de communiquer à la Commission les textes définitifs dès leur adoption, pour permettre à la Commission et Etats-membres de vérifier que l’auteur a bien pris en compte les observations formulées.

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