L'édito de Philippe Bailly

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La présidence estonienne publie son dernier compromis sur la proposition de directive « droit d’auteur »

La présidence estonienne du Conseil de l’Union européenne a soumis aux délégations nationales sa 7e proposition de compromis sur la proposition de directive relative au droit d’auteur dans le marché unique numérique. Il s’agit de sa dernière proposition sur ce texte, dont l’examen sera présidé par la Bulgarie à partir de janvier 2018.

La présidence revient d’abord sur les progrès effectués dans les négociations, qui se retrouvent dans sa proposition de compromis. Elle évoque ainsi les accords trouvés sur les exceptions et limitations du droit d’auteur, et sur l’obligation de transparence dans les relations contractuelles d’exploitation des œuvres, qui facilite l’accès par l’auteur à des informations sur les résultats d’exploitations déléguées par l’exploitant à des tiers. En outre, à la demande de la majorité des délégations, la présidence estonienne a étendu à 24 mois le délai de transposition.

La proposition de compromis introduit par ailleurs un nouvel article, qui autorise les Etats membres à adopter des mécanismes de licences collectives étendues, ou de présomption de représentation ; cela permet aux Etats membres d’étendre les effets d’accords de licence conclus par des sociétés de gestion collective à des auteurs qui ne sont pas membres desdites sociétés de gestion, à condition que certaines mesures soient prises pour préserver leurs droits et intérêts.

La présidence souligne ensuite la divergence des points de vues et la nécessité d’un travail plus approfondi sur les articles 11 et 13 de la proposition de directive, relatifs au droit voisin des éditeurs de presse et aux plateformes de partage de contenus.

Sur le droit voisin des éditeurs de presse, la présidence propose deux options, qui reflètent les deux positions qui s’affrontent au Conseil :

  • Option A: conférer un droit exclusif aux éditeurs de presse. Ce droit couvre les publications de presse dont le but est d’informer le public et qui sont régulièrement mis à jour. Il protège les éléments littéraires mais également les autres contenus, comme les photos et les vidéos. En outre, il est précisé que ce droit ne peut porter atteinte aux droits des auteurs, et notamment ceux des journalistes sur leurs œuvres.

Le droit couvre les utilisations numériques des publications de presse, et notamment l’utilisation d’extraits originaux : le droit voisin tel qu’entendu par la présidence du Conseil ne s’étend donc pas aux extraits génériques (« snippets »), qui ne reflètent pas la création intellectuelle de leur auteur. Il ne couvre pas non plus les liens hypertextes qui ne constituent pas une communication au public. Sa durée est de 20 ans, comme dans la proposition de la Commission.

  • Option B: mettre en place une présomption de titularité des droits sur les éléments contenus dans leurs publications de presse. Cette présomption, moins ambitieuse que le droit voisin, vise à aider les éditeurs de presse qui éprouvent des difficultés à prouver que les droits sur les publications leur ont effectivement été cédés. La présomption ne joue donc qu’à l’égard des tiers, et n’affecte pas les contrats de cession de droits entre les auteurs (journalistes) et les éditeurs de presse ; ces derniers ne sont donc pas dispensés de conclure des licences d’utilisation des articles/photos/vidéos incorporés dans leurs publications. En cas de litige avec un auteur, l’éditeur ne peut se prévaloir de la présomption.

Concernant l’article 13 de la proposition, la présidence précise qu’un fournisseur de service en ligne de partage de contenus effectue un acte de communication au public lorsqu’il intervient en pleine connaissance des conséquences de ses actes pour donner au public un accès à des contenus protégés mis en ligne par les utilisateurs, en organisant ces contenus dans le but d’en retirer un profit.

Ces fournisseurs de services, lorsqu’ils ne peuvent bénéficier de l’exemption de responsabilité prévue à l’article 14 de la directive e-commerce, ne seront pas tenus responsables des actes de communication au public qu’ils effectuent si :

  • Ils prennent des mesures effectives pour limiter la mise à disposition sur ses services de contenus protégés non autorisés identifiés par les ayants-droit, et
  • Sur notification des ayants-droit, ils agissent avec diligence pour retirer les contenus signalés et empêchent sa remise en ligne à travers les mesures visées ci-dessus.

Le fournisseur de service en ligne de partage de contenus ne pourra donc être responsable de la mise à disposition sur ses services de contenus protégés qui n’ont pas été identifiés par les ayants-droit.

Les mesures prises par le fournisseur de service devront être « appropriées et proportionnées », au regard notamment de la nature du service, du type et du nombre d’œuvres mises en ligne sans autorisation, de la disponibilité et du coût de technologies appropriées et de leur efficacité. Le Considérant 38 conserve la référence aux technologies de reconnaissance de contenus comme un exemple de mesure. Les fournisseurs de services devront en outre fournir aux ayants-droit des informations sur le déploiement de ces mesures, sur leur demande.

Le texte de compromis précise en outre que ces mesures devront être mises en œuvre sans empiéter sur la liberté d’expression  et d’information des utilisateurs, ni sur la possibilité pour eux de faire valoir une exception ou limitation au droit d’auteur.

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