L'édito de Philippe Bailly

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Contexte improbable pour la réforme de l’audiovisuel public.

Ils étaient quatre sur la photo lors du lancement de France Info. Mais au rythme où vont les choses, le patron de l’INA Laurent Vallet pourrait vite se sentir bien seul. Le 1er mars, Mathieu Gallet quittera ses fonctions de président de Radio France, après que le CSA lui ai retiré son mandat ; début février, le Canard enchaîné indiquait qu’un enquête avait été confiée à l’office anticorruption de la police judiciaire (Oclciff) concernant les conditions de nomination de Delphine Ernotte à la tête de France Télévisions. Sans effet immédiat mais avec, en toile de fond, l’ombre du « devoir d’exemplarité » invoqué par la ministre de la Culture à propos de Mathieu Gallet, au cas où cette procédure viendrait à prospérer ; ce mardi, Marie-Christine Saragosse indiquait dans un message aux salariés de France Médias Monde repris par Le Monde que « la Haute Autorité de la vie publique (avait) annulé (son) mandat parce qu’(elle n’avait) pas fait (sa) déclaration de patrimoine et d’intérêt dans les délais », après sa reconduction à la tête de l’entreprise le 5 octobre dernier.

Il faut se garder de céder aux amalgames et plus encore aux théories du complot. En ces temps de préparation de la loi anti fake news particulièrement. Mais cela n’interdit pas de se poser quelques questions. Concernant Mathieu Gallet, le fond (une condamnation en première instance, donc non définitive, devait-elle aboutir à son départ de Radio France ?), comme la forme (les interventions pressantes de la ministre de la Culture auprès du CSA) ont déjà été largement débattus ; concernant France Télévisions, le Canard enchaîné s’est chargé de souligner le caractère tardif de l’action de la police judiciaire, s’agissant d’une plainte déposée en juillet 2016 ; à propos de la présidente de France Média Monde, enfin, il apparaît étonnant que la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique n’ait pas alerté les responsables ayant rempli des déclarations d’intérêt dans l’ancien cadre légal (donc sur sollicitation), du fait que la réforme intervenue fin 2017 leur imposait désormais d’en prendre l’initiative sans y être « invité ».

A défaut de soupçonner une action coordonnée de déstabilisation, on peut a minima constater que les entreprises de l’audiovisuel public ne se trouvent pas dans les meilleures conditions pour faire entendre leur voix sur la réforme profonde à laquelle elles sont bientôt promises… et s’interroger au-delà sur les conditions dans lesquelles cette dernière va être débattue.

Au (risque de) du côté des groupes publics, on l’a dit, pourrait répondre une forme de trop plein du côté du Parlement, et en tout cas de l’Assemblée Nationale, avec les travaux parallèles du groupe de travail sur l’audiovisuel public formé fin janvier par le groupe LREM et présidé par Frédérique Dumas, et de la mission d’information sur une nouvelle régulation de la communication audiovisuelle à l’ère numérique confiée par la Commission des Affaires Culturelles à Aurore Bergé.

Et à lire le long article que Le Monde consacrait le 9 février à relater les difficultés de la ministre à s’imposer dans ses fonctions, lequel n’aura évidemment pas contribué à l’y aider, la capacité de Françoise Nyssen à occuper pleinement le rôle de « chef d’orchestre » n’apparaît pas acquise d’emblée.

Alors qui ?