L'édito de Philippe Bailly

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Production de fiction : l’exportation est-elle vraiment une priorité ?

« Plus possible de dire qu’il « n’y a rien à la télévision ce soir ». 487 séries sont sorties en 2017, en hausse de 7 % (par rapport à 2016 et) le nombre de séries a plus que doublé en sept ans », exposait Les Echos en début d’année… à propos de la production de fiction aux Etats-Unis ; le contraste n’en est que plus frappant par rapport aux chiffres que le CNC a publié ce mardi 24 avril concernant le marché français : loin du boum américain, le volume de fiction aidée est revenu l’an dernier de 897 à 871 heures (-2,8%). Si le chiffre reste le 2e plus élevé de la dernière décennie, il marque un retournement de tendance par rapport au bond de 2016 (+153 heures) et éloigne la production française du cap mythique des 1000 heures produites.

Au-delà de cette dimension symbolique, l’examen du niveau et de la structure de son financement, surtout, sont sources de questionnement :

  • Bien qu’en léger recul en valeur absolue (-4M€), les apports du CNC pèsent plus fortement dans les plans de financement (11%, en progression pour la 4e année), ce qui n’apparaît pas forcément comme un signe de vitalité du marché, et marque en tout cas la difficulté à faire émerger de nouveaux investisseurs. L’apport des chaînes de la TNT recule de 1M€ et ne dépasse guère 1% de la dépense totale. Plus préoccupant, les financements étrangers (préventes et plus encore coproductions) se situent à des points bas, et ne représentent que 4% des devis, loin des 7% de 2012 ou des 6,6% de 2016. Les ambitions affirmées par France Télévisions comme par TF1 de développer des séries de classe internationale en partenariat avec des diffuseurs étrangers semblent avoir du mal à se concrétiser.
  • Et de fait, la répartition par formats renforce l’image d’une activité portée par le développement des feuilletons quotidiens bien plus que par celui de collections de prestige : lancement de Demain nous appartient (TF1) aidant, les fictions de 26 minutes représentaient l’an dernier 238 heures de programmes, soit 65 de plus qu’en 2016, 30% du volume horaire total et (sensiblement) le niveau le plus élevé depuis 2008. Dans le même temps, la production de séries de 52 minutes diminue dans des proportions presqu’équivalentes (-55 heures), le volume d’unitaires continue à décroître et les nouveaux formats (transmédia…) confirment leur difficulté à émarger (13 heures produites en 2017 comme en 2016).

Si Plus belle la vie et Demain nous appartient représentent des atouts pour France Télévisions et TF1 dans la défense de leurs parts d’audience en France, cette polarisation du marché ne laisse pas forcément à attendre une envolée des ventes de programmes à l’exportation. Le développement de ces dernières fait pourtant partie des objectifs régulièrement affirmés par les pouvoirs publics. L’annonce par le CNC du lancement prochain d’une consultation sur le soutien à la fiction n’y est peut-être pas indifférente.

PS : le 2 mai, dans le cadre des journées professionnelles du Festival SERIES-MANIA, nous serons heureux de vous retrouver pour le 27e Colloque NPA / Le Figaro. A Lille ou en live vidéo (YouTube et Facebook). Cinq tables rondes déclineront le thème général de la journée : Audiovisuel sans frontières. Par avance, merci aux dirigeants de l’ACT, de All3Media, d’Atres Media, du CNC, de Comcast, d’Eurodata, de France Télévisions, d’ITV, de Lagardère Studio, de M6 Publicité, de Mediaset, de Memento Film, de Newen, de l’Observatoire Européen de l’Audiovisuel, d’ ObSoCo, d’Orange, de Playtime, de Seven Ventures, de Shanghai Media Group, d’Unifrance, de l’USPA et Zodiak Rights d’avoir accepté notre invitation, ainsi qu’au patron de la Ratio Télévision Suisse Romande Gilles Marchand qui a obtenu par un vote populaire le soutien à l’audiovisuel public suisse. Le programme est à retrouver ici.