L'édito de Philippe Bailly

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Warner Bros Discovery, Max et le choix de Hollywood.

Le choix de la Californie pour porter Max sur les fonts baptismaux aurait dû aider à le deviner. Quand les présentations financières ou les orientations stratégiques sont généralement organisées sur la côte Est, c’est de produit, et (presque) seulement de produit que David Zaslav et les autres dirigeants de Warner Bros Discovery avaient décidé de parler ce 12 avril. Tout juste quelques incises – de la part du patron du streaming JB Perrette sur le retour à la priorité donnée à la rentabilité, après le « brouillard » dans lequel la volonté de conquête à tout prix de nouveaux abonnés, notamment – ont-elles confirmé le changement de mindset des studios et de leurs dirigeants.

Mais pas d’indication au-delà, à ce stade au-moins, sur les débats qui occupent professionnels et analystes.

Sur l’optimisation du mix de financement entre publicité et abonnement, par exemple. S’agissant de la première, les clients de Max, comme précédemment ceux de HBO Max, pourront choisir entre un forfait avec ou sans publicité (respectivement 9,99$ et 15,99$ par mois). Mais il faudra attendre les upfronts de mai pour en savoir davantage sur les initiatives destinées à augmenter la part de revenus provenant des marques. Savoir, en particulier, si WBD s’en tient sur le marché de l’AVoD et des FAST à l’entre-deux actuel d’éditeur de chaînes (14 ont été lancées début avril sur Roku et sur Tubi). Davantage que Disney mais moins que Paramount ou Comcast NBC Universal, avec leurs plateformes respectives Pluto TV et Xumo.

Pas d’indication non plus sur la simplification des offres. Ou plutôt si : le maintien de Discovery+ comme service autonome, qui ne va pas dans cette direction s’agissant des plateformes de SVoD, à l’heure où Paramount combine Paramount+ et Showtime, et met en vente BET et Noggin. Sur le segment de la TV payante, il est trop tôt pour que la France, avec le Pass Warner, puisse constituer une source d’inspiration pour l’ensemble du groupe. Mais dans l’hypothèse où celui-ci confirme un démarrage prometteur, on peut l’imaginer comme devenant une sorte de marque ombrelle sous laquelle viendrait s’agréger – et peut être finalement se fondre – les chaînes thématiques du groupe, proposée accessoirement en D2C, mais prenant surtout le relai de ces dernières pour la commercialisation en wholesale auprès des distributeurs historiques. A l’exemple du cap qu’Universal+ semble tracer côté NBC Universal.

Que David Zaslav n’ait rien dit d’une nouvelle étape dans la consolidation plus globale qui verrait deux studios se rapprocher est moins étonnant. Parce que la réunion de Warner Media et de Discovery a tout juste un an et que la colle est donc encore fraîche, d’abord. Parce que de telles opérations ne font jamais l’objet d’aucun commentaire jusqu’à leur annonce officielle, ensuite. Il n’empêche. En annonçant que le lancement de Max sera soutenu par la plus grosse campagne de marketing jamais conduite par le groupe, et en en confirmant dès aujourd’hui un déploiement sur 18 mois à l’échelle mondiale, WBD confirme que la guerre du streaming est loin d’être terminée.

Echaudés par la volée de bois vert reçue des marchés en 2022, ses protagonistes promettent tous de la poursuivre avec des moyens plus raisonnablement dimensionnés. Mais le nombre des compétiteurs américains à ambition mondiale (Disney+, Max, Netflix, Paramount+, Peacock, Prime Video, voire Apple TV+…), les ambitions des « grands régionaux » tels que Canal+ et Viaplay, ou encore la premiumisation engagée de l’AVoD et des FAST, limiteront leurs marges de manœuvre du côté des prix, et la capacité à reprendre de la valeur de ce côté-ci tout autant. Que l’addition de HBO Max et de Discovery+ soit demain proposée au même tarif qu’HBO Max aujourd’hui, n’y est surement pas indifférent.

Le brouillard qu’évoquait ce 12 avril JB Perrette est peut-être moins épais. Pas sûr qu’il soit totalement dissipé.