L'édito de Philippe Bailly

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Le Blu-ray passe à l’Ultra Haute-Définition

La Blu-ray Disc Association (BDA) vient d’annoncer la finalisation des spécifications du Blu-ray Ultra Haute-Définition (UHD ou 4K). Maintes fois repoussée, cette publication officielle doit permettre au Blu-ray de revenir sur le devant de la scène. Au moment où la 4K s’installe doucement sur  les services de streaming en ligne, cette nouvelle avancée technologique doit replacer le Blu-ray dans la course au divertissement vidéo et redynamiser un marché physique enlisé dans une spirale négative depuis plus d’une décennie.

La Blu-ray Disc Association officialise le format Blu-ray Ultra HD

Initialement prévue pour fin 2013 puis repoussée au début d’année 2014, la publication officielle des caractéristiques techniques du nouveau format Blu-ray UHD était attendue avec impatience par les constructeurs d’EGP. Après un long travail de réflexion entamé fin 2012 sur les paramètres à faire évoluer pour adapter le Blu-ray à l’Ultra HD (encodage, fréquence d’images, colorimétrie…) et la réalisation de nombreux tests, la BDA vient finalement de dévoiler les spécifications retenues et le logo officiel du nouveau format.

ultra_hd_blurayLe Blu-ray UHD sera avant tout synonyme d’une plus grande capacité de stockage et d’une meilleure qualité d’image. Ce nouveau format permettra de visionner des œuvres en très haute résolution : 3840 x 2160 pixels à 60 images par secondes contre 1920 x 1080 actuellement. La vidéo sera compressée en HEVC (High Efficiency Video Coding), en remplacement de l’AVC sur les Blu-ray de première génération. Le Blu-ray UHD prendra également en charge une palette de couleurs plus large (P3 et BT.2020), un mode HDR (High Dynamic Range) pour un meilleur contraste et de nouveaux formats audio plus immersifs : les éditeurs auront le choix entre les Dolby Atmos, DTS:X et Auro-3D.

Pour profiter de ce nouveau format, les consommateurs devront disposer d’un lecteur de nouvelle génération, les appareils avec fonction Blu-ray intégrée (platines, consoles de salon, box opérateur) existants n’étant pas compatibles avec celui-ci. Les disques Ultra HD exploiteront en effet jusqu’à trois couches d’enregistrement, soit une capacité de stockage totale de 100 Go contre 50 Go (double couche) ou 25 Go (simple couche) maximum pour les Blu-ray traditionnels. La BDA devrait attribuer les premières licences pour la fabrication de lecteurs compatibles dès cet été, avec une probable présentation des premiers modèles aux environs de l’IFA[1], en septembre, à Berlin. Des modèles qui devraient ensuite être commercialisés sur le marché d’ici la fin d’année, à un prix sans doute dissuasif (deux à trois fois plus élevé que les modèles classiques) en attendant la généralisation de cette nouvelle norme.

Réaffirmer le Blu-ray comme produit de divertissement vidéo

Dix ans après l’apparition du format Full HD, le Blu-ray franchit une nouvelle étape et passe donc à l’Ultra HD. Une avancée technologique qui, si elle devrait aider à la pérennisation du format physique, soulève néanmoins de nombreuses questions. Ce nouveau format succéderait en effet au précédent sans que ce dernier ne soit réellement parvenu à s’imposer auprès des Français qui lui préfèrent encore majoritairement le support DVD classique (84% des ventes de vidéo physique à fin T1 2015). Identifié comme le relais de croissance du DVD, lui-même successeur désigné de la VHS, le Blu-ray n’a jamais réussi à confirmer son statut. Après plusieurs années de croissance linéaire, le Blu-ray a vu ses ventes diminuer pour la première fois en 2012. Le recul de ses recettes est désormais plus marqué que celui du DVD (-19% contre -15% au 1er trimestre 2015).

Évolution des ventes de vidéo physique / 1995-2014 – en millions d’unités

evolution_vente_video_physiqueSource : NPA Conseil sur données CNC-GfK

Les raisons qui peuvent expliquer le manque de popularité du Blu-ray en France sont multiples, d’un prix de vente unitaire jugé trop élevé par le consommateur à la nécessité de s’équiper en appareils compatibles (lecteur et téléviseur), avec là encore un coût d’acquisition prohibitif. Fin 2014, moins d’un tiers des foyers français (29%) disposent d’un appareil de lecture Blu-ray, dont seulement 12% en platine standard, dédiée au visionnage de vidéos. A titre de comparaison, à son niveau le plus haut, le lecteur DVD équipait plus de 90% des foyers. Des barrières prix et équipement auxquelles se confrontera de nouveau le Blu-ray Ultra HD à son lancement. Si les futurs lecteurs pourront accueillir les Blu-ray de première génération, l’inverse ne sera pas vrai. L’intégration d’une fonction de lecture DVD restera quant à elle optionnelle pour les fabricants.

Comme son prédécesseur, le Blu-ray version UHD fera face à une offre pléthorique de services vidéo (SVOD, replay, sites de partage, piratage…). De nouvelles formes de consommation vidéo apparues au cours de la dernière décennie et dont le modèle – illimité, instantané, exhaustif, gratuit ou à un tarif attractif – est diamétralement opposé à celui du format physique, basé lui sur une consommation à l’acte avec un coût élevé. Des concurrents qui, pour certains, se positionnent d’ores et déjà sur le créneau de l’Ultra HD. Netflix, Amazon, Wuaki.tv ou encore YouTube proposent dès à présent des contenus accessibles en 4K. Limité à une courte liste de programmes pour chaque acteur, le phénomène pourrait toutefois s’intensifier rapidement. Il confirme l’engagement des services de vidéo en ligne pour un divertissement haut de gamme.

youtube_amazon_hdReste que l’essor du streaming et son passage à l’Ultra HD ne peut constituer une réponse universelle aux besoins des consommateurs. La lecture de contenus en 4K requiert une connexion solide, dont la grande majorité des Français ne dispose pas à ce jour. Le Blu-ray aura donc un rôle à jouer pour ne pas couper une partie de la population de l’Ultra HD. Au-delà de sa promesse de confort, le nouveau format pourra s’appuyer sur ses synergies avec l’univers dématérialisé. La BDA évoque en effet l’idée d’une « passerelle numérique » permettant de débloquer automatiquement et sans surcoût la copie digitale de chaque disque UHD acheté. Grâce à son système de gestion numérique des droits « Digital Bridge », l’œuvre pourra être ainsi visionnée sur l’ensemble des écrans compatibles du foyer, y compris mobiles. Un système propriétaire qui n’est pas sans rappeler celui d’Ultraviolet et dont le fonctionnement parallèle pourrait ajouter à la confusion au moment où le public a besoin de clarté et de simplicité.

[1] Lors de l’édition 2015 du CES de Las Vegas début janvier, Panasonic a présenté le tout premier prototype de lecteur Blu-ray Ultra HD basé sur un brouillon des spécifications de la BDA

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