L'édito de Philippe Bailly

Vous souhaitez recevoir l’Insight NPA ?

Les applis de messagerie : des audiences en forte croissance mais quelles utilisations pour les marques ?

Alors que les réseaux sociaux sont au cœur des stratégies de marques sur Internet – et le mobile plus particulièrement – de nombreux observateurs considèrent les applications de messagerie comme le nouveau graal du marketing. Pourtant, les annonceurs restent sur leur réserve du fait d’une difficulté à entrevoir les opportunités de ces plateformes certes populaires mais qui proposent peu d’applications concrètes pour leur besoin de communication ou de ventes. Tour d’horizon de ce segment plébiscité par les mobinautes et en pleine quête de monétisation.
____________________________________

En bref

  • Les applications de messagerie ont des audiences qui dépassent largement les réseaux sociaux. 5 messageries dépassent les 500 millions d’utilisateurs mensuels actifs dans le Monde.
  • Les annonceurs restent sur leur réserve du fait d’une offre business encore peu étoffée ou popularisée. Les formats classiques comme la bannière display n’étant pas plébiscités par les éditeurs de ces plateformes.
  • Les applications de messagerie sont en train de construire de nouvelles solutions pour les marques avec deux dominantes : la conversation directe – voire transaction – avec leurs cibles et la publicité au sein de contenus enrichis.

_______________________________________

Les messageries dépassent les réseaux sociaux.

Les applications de messagerie : objets d’intérêt. En février 2014, Facebook a frappé fort en rachetant l’application de messagerie mobile WhatsApp pour plus de 22 milliards de dollars – sa plus grosse acquisition à ce jour. Il a par là même envoyé un signal de taille au marché puisqu’il concrétisait le pari que les messageries sur mobile allaient avoir un rôle prédominant dans les communications de demain. Ce mouvement est aussi important puisque le réseau social numéro 1 dans le Monde, propriétaire d’Instagram, mais aussi de son application de messagerie Messenger, pouvait tabler sur une croissance interne de son offre pour générer des revenus. Le rachat bouclé en octobre 2014 confirmait que les applications mobiles seront une nouvelle source de business.

« S’envoyer des messages est une des quelques activités que les gens font plus qu’utiliser les réseaux sociaux. Dans certains pays, 85% sont sur Facebook, mais 95% utilisent les SMS ou les applis de messagerie ». Mark Zuckerberg.

5 applications de messagerie dépassent les 500 millions d’utilisateurs mensuels actifs
f

Source : Statista / 2015

Une audience supérieure aux réseaux sociaux. C’est un pari qui, en audiences, est déjà gagnant pour Facebook. Ainsi, en février 2015, Messenger annonçait 800 millions d’utilisateurs mensuels actifs et les analystes tablent désormais pour un volume d’un milliard d’ici à fin 2015. Cela se positionne dans un contexte global où les applications de messagerie voient leur croissance se maintenir à un haut niveau, dépassant même celles des réseaux sociaux.

Selon Business Insider, les quatre acteurs majeurs de la messagerie mobile – Messenger, WhatsApp, Viber & WeChat – possèdent désormais une audience d’utilisateurs mensuels actifs supérieure à celles des quatre réseaux sociaux majeurs dans le Monde – Facebook, Twitter, Instagram & LinkdedIn.

Les messageries ont déjà dépassé les audiences des réseaux sociaux
f
Source : Busines Insider / 2015

Intérêt & incompréhension des annonceurs. Il existe un certain attentisme ou incompréhension des annonceurs pour se saisir de ces audiences larges et engagées. En dehors de certaines initiatives émergentes comme celles de Line ou de Snapchat, les formats publicitaires sont peu nombreux et les possibilités d’intégrer organiquement ces plateformes limitées. Ces espaces où une grande partie du temps consommé sur le mobile se trouve – avec des déports d’audience depuis les réseaux sociaux – paraissent impraticables pour les marques. Cela peut relever d’une méconnaissance de ces plateformes mais c’est surtout le fait d’offres « Entreprise » encore en construction.

Des usages préexistants adaptés et enrichis pour mobile

Interface enrichie, gratuite et privée. Pour comprendre le succès de ces applications, il faut observer que le prix des forfaits mobiles et SMS peut encore être élevé dans de nombreux pays comme le Brésil ou les Etats-Unis par exemple. Dans les segments de population les plus jeunes, les applications de messagerie offrent une possibilité de communiquer gratuitement auprès de ses proches via une connexion wifi. Plus simple d’utilisation, elles sont aussi plus confidentielles que les réseaux sociaux où les communications sont publiques ou visibles par ses amis. Les applications dépassent aussi le simple cadre du « texto » puisqu’elles sont utilisées pour échanger des emojis, des vidéos, des liens internets, gifs, etc.

Un souvenir d’AIM, MSN Messenger, Caramail… On peut trouver des ressemblances fortes entre les messageries mobiles et les anciennes plateformes de « tchat » populaires au début des années 2000. Sur MSN Messenger, l’utilisation était sensiblement proche avec la possibilité d’échanger fichiers, textes, liens auprès de sa communauté d’amis et proches. L’application avait été mise à mal par GTalk puis Facebook Messenger notamment qui offrait la possibilité de s’intégrer au sein d’un réseau social.

Il y a une résurgence de ces réseaux appliqués au travers d’applications adaptées au mobile. Pour rappel, les marques avaient déjà du mal à appréhender cet univers si ce n’est au travers des publicités bannières Display affichées autour des fenêtres de discussion.

La publicité « classique » comme porte d’entrée pour les annonceurs ?

Les utilisateurs des messageries ne seraient pas forcément opposés à la publicité sur les applis de messagerie. Selon une étude d’août 2015 d’emarketer sur le marché Brésilien, pour conserver la gratuité de ces services, 29,5% des utilisateurs seraient d’accord pour recevoir de la publicité de n’importe quelle marque ou produit, 37,5% de marques ou produits qui les intéressent seulement. A l’opposé, 12% préfèreraient payer pour ce service et près de 21% refuseraient publicité et abonnements.

Mais des réticences des acteurs en place. La vraie réticence vient d’abord des applications qui ont pu voir que le modèle de la publicité classique a pu épuiser des concepts et leurs utilisateurs. WhatsApp a d’ailleurs signé une tribune célèbre sur la publicité « Why we don’t sell ad » qui présente un refus catégorique des créateurs pour ce format.

C’est un message qui semble entendu par l’actuel propriétaire Mark Zuckerberg qui souhaite travailler sur la monétisation de l’application autour d’autres formats que la publicité display. Il s’agira de développer plutôt des usages nouveaux comme la mise en relation avec les marques et les consommateurs.

Les nouvelles voies pour les marques

Deux voies majeures sont ouvertes pour la monétisation des applications, l’intégration de services conversionationnels ou transactionnels au service des marques et e-commerçants et la création de nouveaux espaces et supports de branding.

→ La communication sous forme de dialogue.

En juin 2014, l’application japonaise Line a annoncé son ouverture aux annonceurs. En association avec Salesforce, la messagerie qui regroupe 450 millions d’utilisateurs dans le Monde propose un service permettant aux marques de cibler et toucher leurs clients en ligne. Les utilisateurs peuvent voir les messages publicitaires uniquement s’ils ont accepté de recevoir des notifications de la marque. Les prix communiqués par Mashable en 2014 étaient de 0,01 dollars message.

Les marques dialoguent avec les mobinautes sur WeChat
Source : Business Insider / 2015

f      f

WhatsApp mais surtout WeChat permet aussi aux marques d’utiliser l’application pour dialoguer avec les membres. Les marques ne peuvent communiquer qu’avec les utilisateurs le souhaitant. Elles sont d’ailleurs nombreuses à avoir investi le réseau comme Durex qui envoie des conseils sexo, Nike qui propose des exercices de sport à réaliser chez soi, Starbucks qui présente ses derniers cafés ou encore la série The Walking Dead qui propose des contenus après la diffusion TV.

La discussion évoluant dans un cadre plus personnelle et privée, les marques entrevoient ces messageries comme des interactions one-to-one plus percutantes et performantes que les emails ou les SMS.

“Messenger for business” de Facebook
Source : Facebook.com

f

→ Connecter les marques & intégrer le SAV.

Facebook souhaite aussi aller un pas plus loin dans cette idée de « conversation » et l’adapter aux plateformes e-commerce. C’est le sens des annonces concernant « Messenger for business » (cf Flash du 1er avril 2015). L’application doit servir d’interface de mise en relation entre membre et e-commerçants. Un utilisateur pourra choisir de se loguer aux plateformes via Facebook Messenger et recevoir des notifications sur sa commande, sa livraison et l’utiliser en cas de problème.

L’intérêt pour les annonceurs est qu’il permet aux marques de gérer l’ensemble de leur cycle client sous la forme d’un dialogue avec leurs clients. De nouveau, la messagerie plus personnelle que l’email peut être gage de plus d’engagement et d’attention des clients.

→ Le paiement et la vente en ligne.

Un des premiers acteurs à s’être lancé dans la transaction est WeChat qui en 2013 avait lancé un service permettant aux membres de relier leur compte bancaire à l’application pour faire des transactions grâce à leur profil sur des sites e-commerce. De même, les utilisateurs étaient à même de réaliser des virements entre amis. Aux Etats-Unis, Snapchat avec Snapcash puis Facebook, avec « Payments in Messenger » ont lancé des services similaires pour faciliter les échanges d’argent entre amis.

On voit mal encore le prolongement direct pour les marques. Toutefois, en développant ces services, Snapchat comme Messenger créent des espaces où les utilisateurs prendront l’habitude de réaliser des transactions avec des comptes et CB enregistrés. C’est une manière de les mettre en confiance pour proposer plus naturellement par la suite des espaces de ventes ou mise en connexion avec les e-commerçants.

→ La publicité native autour de contenus enrichis.

L’autre tendance forte, et initiée par Snapchat, est le développement d’espaces de contenus à l’intérieur des messageries. Cet espace parallèle à la messagerie, sert deux objectifs pour l’application : conserver l’utilisateur plus longtemps sur l’application et introduire plus facilement de la publicité.

Ainsi, Snapchat propose à la fois « Stories » où la marque peut partager des contenus sur son actualité et évènements. Et surtout Discover, une plateforme de contenus exclusifs opérée par de grands médias partenaires de Snapchat. Ces derniers sont aujourd’hui au nombre de 14 dont National Geographic, Cosmopolitan, Vice, Mashable, Buzzfeed, MTV… et co-créent avec les marques des contenus en format natif.

→ Brand content ou placement de produits.

Les emojis ont fait le succès des applications en Asie et notamment de l’application japonaise Line et la tendance c’est aussi bien intégrée dans les pays occidentaux. Plusieurs start-ups ont investi ce segment avec l’idée de récupérer ce code propre aux messageries et le mettre au service des marques.

La start-up Swyft Media a noué des partenariats avec plusieurs grandes applications comme Viber, Kik, Tango… pour fédérer un ensemble de 3 milliards d’utilisateurs potentiels. Elle propose aux marques de développer des kits d’émoticônes intégrant ou mettant en scène leur marque. Selon son créateur, les publicités bannières classiques ne fonctionnent pas et les emojis sont un moyen « d’amener du contenu de marques dans ces conversations de la manière la plus captivante et effective ».

Exemple de campagnes réalisées par Swyft Media
Source : swyftmedia.com

f

« Là où les bannières publicitaires auraient été intrusives, je vais plus naturellement échanger un émoticône pour dire que c’est l’heure d’une bière Miller » déclare Dilini Fernando, Digital Marketing Manager de la marque de bière utilisatrice de ce service aux Etats-Unis.

En août 2015, une start-up française, Feeligo, a d’ailleurs suivi ce mouvement et propose aux annonceurs français de créer des lots d’émoticônes personnalisés, appelés « brand sticker » et utilisables sur les messageries. Selon les chiffres communiqués par le co-fondateur de l’entreprise, le coût d’une campagne de ce type varie entre 20 000 et 100 000 euros selon la cible souhaitée par la marque. Plusieurs acteurs ont déjà franchi le cap en France dont Duracell, Disney ou encore La Poste.

Vous êtes abonnés à l’Insight NPA ? Merci de renseigner vos identifiants pour accéder à l’ensemble de cet article.

Pas encore inscrit à l'Insight NPA ?