L'édito de Philippe Bailly

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Droit voisin pour la presse et écart de valeur au cœur des discussions sur la réforme du droit d’auteur

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Jeudi 12 janvier, les députés de la commission des affaires juridiques du Parlement européen sont revenus sur deux dispositions phares du projet de directive sur le droit d’auteur dans le Marché unique numérique, à savoir l’article 11 visant à créer un droit voisin en faveur des éditeurs de presse pour l’utilisation numérique de leurs publications, et l’article 13 relatif à l’instauration par les plateformes en ligne de mécanismes de type « Content ID » pour combler « l’écart de valeur » entre plateformes et créateurs de contenus mis à disposition.

Le projet de rapport de Therese Comodini Cachia est attendu début mars 2017.

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Si droite et gauche s’opposent sur la question du nouveau droit voisin en faveur des éditeurs de presse, les socialistes peinent à trouver une position unanime. En témoigne la prise de position de Lidia Joanna Geringer de Oedenberg (rapporteur fictif du groupe S&D) qui estime que les éditeurs disposent déjà des droits d’auteur sur les œuvres qu’ils éditent et promeuvent, et que l’article 11 « ne devrait pas figurer dans cette réforme » afin d’éviter toute « complication supplémentaire ». Elle a également demandé plus de clarté de la part de la Commission sur la rétroactivité de ce droit, qui « pourrait revenir 20 ans en arrière à une époque où internet n’existait pas dans sa forme actuelle ». Dans la foulée, l’anglaise Mary Honeyball (S&D) déclare, au contraire, y voir une mesure « fondamentale », souhaitant faire de la rémunération équitable des créateurs l’élément phare de la directive.

Plus à gauche encore, Julia Reda (rapporteur fictif des Verts) affirme que ce nouveau droit voisin n’est pas soutenu par l’ensemble de l’industrie de la presse. De plus, « le droit voisin n’a pas de condition d’originalité pour s’appliquer, ce qui veut dire que le plus court des textes peut être couvert », un danger pour le partage de liens hypertexte comportant le titre d’un article dans l’URL, selon elle.

Pour sa part, le groupe PPE, qui s’était réuni la veille lors d’une audition publique organisée par Mme Comodini Cachia, salue une proposition qui va dans le bon sens. L’allemande Angelika Niebler (PPE) soutient ainsi le renforcement de la position de négociation des éditeurs, qui réalisent selon elle un travail nécessaire de « filtrage de ce qui doit ou non être publié », participant ainsi à la qualité de la création. Un travail mis en lumière également  par Jean-Marie Cavada (rapporteur fictif pour l’ADLE), qui sera « attentif à la façon dont cette juste rémunération sera mise en place », soucieux de ne « pas pénaliser les petits éditeurs qui contribuent très activement à la variété culturelle ».

Sans surprise, la Commission européenne a été invitée à se prononcer à nouveau sur la question des liens hypertexte. Elle a confirmé que ce nouveau droit voisin n’affectait en rien le cadre applicable aux hyperliens, qui reste défini par la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union (décisions Svensson, Bestwater et GS Media), « avec le degré de clarté et de confusion » qu’elle a apporté, admet la commissaire.

La Commission a défendu également son article 13, accusé par Julia Reda d’être incompatible avec le régime de responsabilité limité conféré aux intermédiaires par la directive 2000/31. « Pas question de se débarrasser ou fragiliser » cet article pour la française Constance Le Grip (PPE) qui souhaite plutôt le renforcer et travailler « dans un souci de rééquilibrage de la rémunération tout au long de la chaîne de valeur ».

Même constat pour Jean-Marie Cavada, selon lequel le Content ID « ne règle pas tout à fait l’épineuse question de la responsabilité des plateformes en ligne, qui ne peut pas continuer à naviguer dans l’absolu et dans l’inconnu ». Difficile de savoir si l’eurodéputé français aura le soutien de son groupe pour aller plus loin que les propositions de la Commission européenne, étant donné que l’ADLE n’a pas à ce jour publié sa position sur ce point.

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