L'édito de Philippe Bailly

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blackpills : lancement du service en France et aux Etats-Unis

blackpills, nouveau service français de formats courts, a annoncé coup sur coup un partenariat avec Vice aux Etats-Unis et son lancement en France. Le nouveau service qui se positionne comme un concurrent direct de Studio+ pourra s’appuyer sur un catalogue de séries déjà très complet.

 Un lancement quasi-simultané en France et à l’international

blackpills a été fondé en 2016 par Patrick Holzmann (fondateur d’Allociné et ex-Canal OTT) et Daniel Marhely (fondateur de Deezer) dans le but de proposer un service adapté à la fois à la consommation de contenus sur terminaux mobiles et aux milléniaux. Le projet aurait également bénéficié d’un investissement de 5 millions d’euros de Xavier Niel. Le projet s’est cependant volontairement entouré de mystères pendant plusieurs mois. Ainsi, mise à part l’annonce du développement d’une série courte d’après une idée de Luc Besson en juin 2016, peu d’informations concrètes ont été dévoilées avant que blackpills ne diffuse de façon impromptue sa première série originale You Got Trumped[1] directement sur YouTube et Facebook à la mi-octobre. Depuis lors le service avait bien dévoilé progressivement certaines de ses créations originales mais était resté vague sur sa date et ses conditions de lancement jusqu’à ces derniers jours.

blackpills a ainsi  annoncé le 28 mars que le service de vidéo allait être disponible en France sous forme d’application mobile dès les premiers jours d’avril. L’application sera d’abord disponible exclusivement sur iOS mais une application Android devrait être disponible très prochainement. Le service a opté pour un modèle économique freemium. En effet, le service sera accessible gratuitement avec de la publicité mais seulement pour regarder un épisode par jour. Pour accéder à un nombre illimité de visionnage quotidien, supprimer la publicité mais également avoir accès au format 4K,  il faudra passer à la version payante. Au lancement seul la version gratuite sera disponible et la version payante sera lancée « quelques semaines plus tard ». Le tarif de l’abonnement annoncé est de 1,99€ par mois soit un prix particulièrement agressif en comparaison des 4,99€ mensuels de Studio+. Cette application blackpills sera ensuite progressivement lancé sur 15 territoires d’abord aux États-Unis en avril, puis au Canada et en Europe au début de l’été. blackpills a vocation ensuite à s’étendre en Asie à partir de 2018.

Patrick Holzman a cependant bien précisé que si l’application vidéo blackpills sera un pilier important de la distribution, ce ne sera pas le seul moyen d’accéder aux créations originales. En effet, selon lui, le service sera distribué également par des partenaires parmi lesquels des médias et des opérateurs télécoms. Cette stratégie de partenariats est déjà à l’œuvre puisque des contenus originaux blackpills sont disponibles depuis la semaine dernière aux Etats-Unis sur le sur le service vidéo de Vice[2].  blackpills dispose d’ores et déjà d’une chaîne avec quelques contenus seulement mais ce catalogue devrait progressivement s’étoffer. L’objectif est de donner un avant-goût du catalogue de blackpills et de préparer le lancement de l’application. En effet, Vice Media sera la régie publicitaire exclusive et le relais du service français aux Etats-Unis.  Aucun autre partenaire potentiel n’a encore été dévoilé. La question d’un rapprochement avec Free par le biais de Xavier Niel reste pour l’instant en suspens.  Cette volonté de diversifier la distribution découle de l’ambition du groupe de ne pas être un simple service vidéo mais plutôt un média digital et une marque reconnue dans les contenus.

Un line-up déjà complet de séries  originales courtes

Blackpills aurait investi depuis son lancement dans la production d’une quarantaine de séries d’un format majoritairement 10*10 minutes mais pas seulement[3]. Toutes les séries sont tournées en anglais mais des versions doublées sont disponibles dans trois langues ainsi que des sous-titres en sept langues. blackpills a réussi à réunir pour ses séries des créateurs reconnus comme Louis Leterrier ou Zoe Cassavetes qui ont réalisé respectivement Tycoon et Junior, et surtout Luc Besson qui est à l’origine du concept de la série Playground. Le service a cependant également vocation à attirer de nouveaux talents et plusieurs YouTubeurs célèbres ont participé à certaines créations. La ligne éditoriale se veut proche de celle de HBO à ses débuts : nerveuse, controversé et osé.

10 séries originales produites dans 10 pays différents seront disponibles lors du lancement français[4]. Sur Vice, aux Etats-Unis, 3 séries blackpills de 10 épisodes sont déjà disponibles (Playground, All Wrong et Skinford) ainsi qu’un épisode de deux autres séries. Pour créer ces contenus, blackpills a travaillé principalement avec des producteurs américains, français, européens et israéliens. En France, blackpills s’est notamment associé à Together Studios (Duels, Playground et Tycoon), Rockzeline (Game of Death, Skinford) ou Manny Films (Junior et A Girl Is a Gun). Pour faciliter son extension internationale le service a ouvert des bureaux à New York, Los Angeles et Tel-Aviv. Au-delà des créations originales, blackpills a procédé également à des acquisitions de contenus courts.  Le service a notamment conclu un accord avec Adaptive Studios à Sundance en janvier dernier portant sur plusieurs séries courtes. blackpills distribuera également la troisième saison inédite de la série décalée Making a Scene de James Franco, auparavant diffusée par AOL.

Au total, pour sa première année blackpills aurait disposé d’une enveloppe de 50 millions dollars à investir dans les contenus. Le budget moyen par série originale s’établirait autour de 1 millions d’euros, soit environ 100 000 dollars par épisode, financé à plus de 80% par blackpills. Plus précisément, la série la plus cher de blackpills aurait coûté 3 millions d’euros contre 300 000 euros pour la moins cher. blackpills espère pouvoir poursuivre ses efforts au même rythme pour les prochaines années et donc à terme créer une cinquantaine de séries par an. Daniel Marhely a d’ailleurs précisé que blackpills ne s’interdisait rien en termes de type de contenus produits : des documentaires, de l’animation ou encore des programmes d’actualité pour les 15-30 ans seraient en projets.

En concurrence direct avec Studio+

blackpills en France va entrer en concurrence frontale avec le service Studio+ de Vivendi qui se positionne également comme un service par abonnement proposant des séries courtes et dédié à la consommation sur mobile. Le lancement de blackpills n’est pas une bonne nouvelle pour Vivendi notamment du fait de son tarif bien plus faible que les 4,99€ exigés par Studio+. En outre, si Studio+ se félicite régulièrement de la qualité de ses créations originales[5], le service est beaucoup moins disserte sur le succès de son service auprès du public. En effet, Vivendi refuse systématiquement de communiquer le nombre d’abonnés à Studio+ depuis le lancement du service en novembre. Enfin, le service a confirmé le 21 mars qu’il mettait en pause les commandes de nouvelles séries. Officiellement, Studio+ dispose d’un stock déjà important de contenus à diffuser dans les prochains mois et ce gel des nouveaux projets aurait pour but de donner plus de temps aux équipes pour mieux les sélectionner. Néanmoins, en l’absence de chiffres positifs sur le nombre d’abonnés, une telle décision pose la question de la santé du service de Vivendi.

Comparatif des services Studio+ et Blackpills en France

[1] Cette série humoristique de 10 épisodes de 3 à 5mn en anglais portant sur le personnage de Donald Trump a sans doute bénéficié d’une diffusion opportuniste dans le contexte de la présidentiel américaine, ce qui explique l’absence de communication de Blackpills auparavant. Les premiers épisodes ont généré plus de 500 000 vues sur YouTube, les derniers moins de 100 000.

[2] Le partenariat inclus également Pulse Films, autre producteur de formats courts, dont les contenus seront également distribués par Vice Vidéo

[3] Selon la communication officielle les séries blackpills comportent toutes une dizaine d’épisodes de 6 à 14 minutes. Patrick Holzman a d’ailleurs sur la volonté de blackpills de ne pas s’enfermer dans le format 10*10 en opposition évidente donc avec le modèle de Studio+.

[4] Les séries Playground, Tycoon, Duels, Junior, Pillow Talk, Maniac et All Wrong.

[5] Créations originales qui, il faut le noter, ont remporté un nombre impressionnant de récompenses dans divers festivals internationaux spécialisés. Rien que la semaine dernière, cinq séries Studio+ ont remporté des prix au Bueno Aires Web Fest

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