L'édito de Philippe Bailly

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Pour Radio France ; il est « vital d’occuper le terrain des supports numériques »

Laurent Frisch, directeur du numérique et de la production de Radio France, décrit pour NPA ce que la multiplication des supports et modes d’écoute numériques change pour le groupe radiophonique public. Elle lui permet d’élargir son public, de produire des formats nouveaux, à condition de réussir à se transformer en interne.

Radio France, ce sont 7 antennes radios qui rassemblent chaque jour 15,9 millions d’auditeurs mais aussi 4,6 millions de Français (soit 2 millions de plus en deux ans)[1] qui utilisent les supports numériques du groupe public au quotidien, à travers notamment une application qui propose 1,5 million de podcasts, 24 webradios, le replay des antennes. Le groupe a déjà défini et commencé à mettre en œuvre sa stratégie d’adaptation à cet environnement. En octobre 2020, il l’a présentée et a affirmé sa volonté d’accélérer dans ce domaine.

Laurent Frisch

Crédit : Mathieu Genon Radio France

 

 

NPA : Comment Radio France s’adapte à la diversité des supports et des modes d’écoute ?

Laurent Frisch : La réflexion sur le sujet est derrière nous. Il se décline à trois niveaux : la production, l’édition numérique, et la distribution.

Nous avons lancé de nouvelles propositions éditoriales pour les supports numériques, par exemple en produisant des podcasts natifs pour les enfants comme Oli (15 millions d’écoutes cumulées à fin janvier 2021) ou Les Odyssées (11,3M), mais aussi des fictions originales pour France Culture, comme Les disparus de Bas-Vourlan, mis en ligne le 22 janvier (4,5M d’écoutes cumulées pour les fictions natives). Cela nous permet de toucher de nouveaux publics.
Et aussi de produire des formats qui ne seraient pas diffusables en hertzien, avec du son spatialisé comme des captations de concerts en 3D, par exemple.

Ces contenus, pour trouver leur public, doivent êtres édités pour les supports numériques et le web, accompagnés d’articles, découpés en séquences, référencés sur Google. Cela exige de nouvelles compétences, chaque équipe de production doit faire un premier travail d’édition. Cela implique de gagner du temps au quotidien pour produire ces nouveaux formats et les éditer, et c’est donc un projet de transformation interne.

Enfin cela passe par la maîtrise de la distribution de ces contenus. Après notre nouvelle application lancée en octobre qui rassemble nos 1,5 million de sons, nous allons lancer la même chose sur le web. Nous encadrons la reprise de ses contenus par des agrégateurs avec lesquel nous passons des accords. Nous avons signé avec Spotify, Deezer, nous actualisons notre accord avec Apple ; et nous voulons nouer d’autres partenariats. Nous avons fixé les conditions à ces reprises, qui doivent respecter une chronologie des médias : les agrégateurs tiers ne peuvent diffuser en replay nos émissions quotidiennes que pendant 7 jours, et les hebdomadaires pendant un mois… Et ils doivent s’engager à rémunérer les ayants-droits. Aujourd’hui, 35 % de l’écoute numérique des podcasts passe par nos plateformes contre 12 % il y a deux ans

NPA : Notez-vous des différences d’usage marquées selon les supports d’écoute ?

LF : Certains programmes radio ont des audiences en podcasts proches de leurs audiences linéaires, comme Les Chemins de la Philosophie sur France Culture.

Globalement, le public des podcasts et de la radio filmée est plus jeune que celui de la radio et cela nous aide à élargir notre audience globale. Grâce à la vidéo, nous pouvons toucher encore un autre public.

NPA : Etes-vous satisfait de la mesure d’audience avec ces nouveaux supports ?

LF : La mesure de l’audience radio est solide. Celle des supports numériques aussi avec Médiamétrie. Mais il demeure des zones d’ombre : notre audience sur les plateformes numériques tierces, comme Youtube, Instagram et Snapchat, notamment. On aimerait une solution consolidée.

Et on ne sait pas si l’audience de nos contenus sur des agrégateurs est une audience additionnelle ou pas. Est-ce le même public qui nous écoute en direct le matin et puis le soir écoute un de nos programmes sur Deezer ? On ne peut pas encore le savoir.

NPA : La radio linéaire est-elle menacée ?

LF : L’écoute de la radio est menacée par la multiplication de nos usages numériques, sur un téléphone au cours d’une journée. Il est vital pour nous d’occuper ce territoire, d’être toujours à portée de clic.

Nous avons réussi à multiplier par 4,5 l’écoute de nos podcasts en 5 ans pour atteindre plus de 90 millions d’écoutes par mois en moyenne, c’est une croissance exponentielle. Dans le même temps, l’audience de nos chaînes se porte bien. Si globalement, l’audience du média radio s’effrite, la hausse des audiences numériques ne se fait pas au détriment des audiences linéaires : un mode d’écoute a plutôt tendance à encourager l’autre, il y a une vraie complémentarité. Les gens ont appris à aménager leur temps d’écoute en direct ou en podcast au cours d’une journée. L’écoute radio en direct est durablement ancrée dans les habitudes de vie.

NPA : Quels sont les atouts de Radio France dans cette mutation ?

LF :  La possibilité que nous avons d’avoir une vision à long terme. Les investissements sur les formats numériques sont des paris au long cours : le bénéfice n’en est pas immédiat

Par ailleurs, nous créons en permanence un catalogue d’œuvres patrimoniales, à la vitesse du flux, et nous pouvons nous appuyer sur un stock de telles créations qui ont gardé toute leur qualité et leur valeur aujourd’hui . Ce patrimoine est un atout important face aux nouveaux acteurs.

NPA : L’adaptation de Radio France à l’ère numérique est-elle achevée ?

LF : La stratégie est en place mais nous avons encore beaucoup à faire. Nous devons réussir la transformation de l’entreprise afin d’augmenter le rayonnement numérique de nos productions, tout en faisant croître l’adoption de nos sites et applis par le public.

[1] La stratégie numérique de Radio France . Présentation le 14 octobre 2020

Laurent Frisch, directeur du numérique et de la production de Radio France, décrit pour NPA ce que la multiplication des supports et modes d’écoute numériques change pour le groupe radiophonique public. Elle lui permet d’élargir son public, de produire des formats nouveaux, à condition de réussir à se transformer en interne

Radio France, ce sont 7 antennes radios qui rassemblent chaque jour 15,9 millions d’auditeurs mais aussi 4,6 millions de Français (soit 2 millions de plus en deux ans)[1] qui utilisent les supports numériques du groupe public au quotidien, à travers notamment une application qui propose 1,5 million de podcasts, 24 webradios, le replay des antennes. Le groupe a déjà défini et commencé à mettre en œuvre sa stratégie d’adaptation à cet environnement. En octobre 2020, il l’a présentée et a affirmé sa volonté d’accélérer dans ce domaine.

NPA : Comment Radio France s’adapte à la diversité des supports et des modes d’écoute ?

Laurent Frisch : La réflexion sur le sujet est derrière nous. Il se décline à trois niveaux : la production, l’édition numérique, et la distribution.

Nous avons lancé de nouvelles propositions éditoriales pour les supports numériques, par exemple en produisant des podcasts natifs pour les enfants comme Oli (15 millions d’écoutes cumulées à fin janvier 2021) ou Les Odyssées (11,3M), mais aussi des fictions originales pour France Culture, comme Les disparus de Bas-Vourlan, mis en ligne le 22 janvier (4,5M d’écoutes cumulées pour les fictions natives). Cela nous permet de toucher de nouveaux publics.
Laurent Frisch . Crédit : Mathieu Genon Radio France

Et aussi de produire des formats qui ne seraient pas diffusables en hertzien, avec du son spatialisé comme des captations de concerts en 3D, par exemple.

Ces contenus, pour trouver leur public, doivent êtres édités pour les supports numériques et le web, accompagnés d’articles, découpés en séquences, référencés sur Google. Cela exige de nouvelles compétences, chaque équipe de production doit faire un premier travail d’édition. Cela implique de gagner du temps au quotidien pour produire ces nouveaux formats et les éditer, et c’est donc un projet de transformation interne.

Enfin cela passe par la maîtrise de la distribution de ces contenus. Après notre nouvelle application lancée en octobre qui rassemble nos 1,5 million de sons, nous allons lancer la même chose sur le web. Nous encadrons la reprise de ses contenus par des agrégateurs avec lesquel nous passons des accords. Nous avons signé avec Spotify, Deezer, nous actualisons notre accord avec Apple ; et nous voulons nouer d’autres partenariats. Nous avons fixé les conditions à ces reprises, qui doivent respecter une chronologie des médias : les agrégateurs tiers ne peuvent diffuser en replay nos émissions quotidiennes que pendant 7 jours, et les hebdomadaires pendant un mois… Et ils doivent s’engager à rémunérer les ayants-droits. Aujourd’hui, 35 % de l’écoute numérique des podcasts passe par nos plateformes contre 12 % il y a deux ans

NPA : Notez-vous des différences d’usage marquées selon les supports d’écoute ?

LF : Certains programmes radio ont des audiences en podcasts proches de leurs audiences linéaires, comme Les Chemins de la Philosophie sur France Culture.

Globalement, le public des podcasts et de la radio filmée est plus jeune que celui de la radio et cela nous aide à élargir notre audience globale. Grâce à la vidéo, nous pouvons toucher encore un autre public.

NPA : Etes-vous satisfait de la mesure d’audience avec ces nouveaux supports ?

LF : La mesure de l’audience radio est solide. Celle des supports numériques aussi avec Médiamétrie. Mais il demeure des zones d’ombre : notre audience sur les plateformes numériques tierces, comme Youtube, Instagram et Snapchat, notamment. On aimerait une solution consolidée.

Et on ne sait pas si l’audience de nos contenus sur des agrégateurs est une audience additionnelle ou pas. Est-ce le même public qui nous écoute en direct le matin et puis le soir écoute un de nos programmes sur Deezer ? On ne peut pas encore le savoir.

NPA : La radio linéaire est-elle menacée ?

LF : L’écoute de la radio est menacée par la multiplication de nos usages numériques, sur un téléphone au cours d’une journée. Il est vital pour nous d’occuper ce territoire, d’être toujours à portée de clic.

Nous avons réussi à multiplier par 4,5 l’écoute de nos podcasts en 5 ans pour atteindre plus de 90 millions d’écoutes par mois en moyenne, c’est une croissance exponentielle. Dans le même temps, l’audience de nos chaînes se porte bien. Si globalement, l’audience du média radio s’effrite, la hausse des audiences numériques ne se fait pas au détriment des audiences linéaires : un mode d’écoute a plutôt tendance à encourager l’autre, il y a une vraie complémentarité. Les gens ont appris à aménager leur temps d’écoute en direct ou en podcast au cours d’une journée. L’écoute radio en direct est durablement ancrée dans les habitudes de vie.

NPA : Quels sont les atouts de Radio France dans cette mutation ?

LF :  La possibilité que nous avons d’avoir une vision à long terme. Les investissements sur les formats numériques sont des paris au long cours : le bénéfice n’en est pas immédiat

Par ailleurs, nous créons en permanence un catalogue d’œuvres patrimoniales, à la vitesse du flux, et nous pouvons nous appuyer sur un stock de telles créations qui ont gardé toute leur qualité et leur valeur aujourd’hui . Ce patrimoine est un atout important face aux nouveaux acteurs.

NPA : L’adaptation de Radio France à l’ère numérique est-elle achevée ?

LF : La stratégie est en place mais nous avons encore beaucoup à faire. Nous devons réussir la transformation de l’entreprise afin d’augmenter le rayonnement numérique de nos productions, tout en faisant croître l’adoption de nos sites et applis par le public.

[1] La stratégie numérique de Radio France . Présentation le 14 octobre 2020

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