L'édito de Philippe Bailly

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Nouveau paysage audiovisuel : Diverto et l’attente du moteur de recherche universel

Le lancement d’un titre de presse peut encore créer l’événement ! « Gros projet dans la PQR », écrivaient les Echos ce jeudi 21 septembre, à propos de l’arrivée de Diverto attendue dans les premières semaines de 2023. Fruit de l’association des groupes Centre France, Ebra, Rossel, Sipa Ouest France, Sud-Ouest et La Dépêche du midi, le magazine remplacera TV Magazine, distribué le week-end depuis plusieurs décennies avec les titres de la PQR.

Signe des temps, le nouvel arrivant se veut « digital first », avec un site et une présence sur les réseaux sociaux qui iront bien au-delà de la seule fonction de vitrine du titre papier.

Autre signe des temps, la volonté rapportée par CB News, d’offrir en complément des grilles de programmes TV, « un guide face aux propositions pléthoriques de contenus audiovisuels entre chaînes classiques, chaînes thématiques, plateformes, replay, OTT, SVOD, AVOD, Fast TV et autres réseaux sociaux ».

Quand ils préparaient le dossier destiné à convaincre les actionnaires de la pertinence du projet, les promoteurs de Diverto n’ont sans doute eu aucune peine à justifier, en tout cas, du « besoin consommateur » auquel aspire à répondre le titre.

La mise à disposition d’un moteur capable de lancer une recherche dans les catalogues de l’ensemble des services disponibles, représente d’après une étude Horowitz la première attente des téléspectateurs américains (66 %) ; ce chiffre, recueilli au cours de l’été, fait écho à la demande exprimée un an plus tôt par les Français dans le Baromètre OTT NPA Conseil / Harris Interactive (Vague 4) : estimant à près de 80 % (77,9 %) que « les choses se compliquent », les Français y étaient presqu’aussi nombreux (74,5 %) en faveur d’un moteur de recherche universel[1]. Les études qualitatives décrivant des téléspectateurs qui passent plusieurs dizaines de minutes à scroller dans les interfaces des services de streaming, et finissent par renoncer à visionner un programme, illustrent de façon concrète ce besoin.

Aussi talentueux soit-il dans sa volonté d’accompagner le public dans ses choix, il n’est pas sûr que Diverto parvienne, à lui seul, à y répondre Mais peut être les signaux de défiance envoyés depuis plusieurs mois par les marchés financiers à l’égard des streamers seront-ils  au final plus efficaces.

Toutes à leur concurrence féroce pour la captation de nouveaux abonnés, la plupart – Amazon Prime Video ou Netflix particulièrement – ont refusé jusqu’alors de partager les données de description de leurs catalogues susceptibles d’alimenter le fameux moteur universel, au motif – plus ou moins clairement assumé – qu’elles préféraient conserver l’abonné dans leur environnement.

Ce faisant, et dans un moment de multiplication des propositions, elles se sont exposées au risque d’être moins, voire pas, consommées par certains. Tout gestionnaire d’offre payante sait pourtant qu’un abonné qui ne consomme pas est un churner en puissance. Et tout patron du marketing a appris que le recrutement d’un nouveau client coûte toujours beaucoup plus cher que la rétention d’un abonné déjà « en basé ».

La plus grande focalisation sur la rentabilité de l’euro (ou du dollar) investi aidera-t-elle enfin à répondre à l’attente du « téléspectateur de base » ?

PS : interrogé sur BFM Business à propos de l’impact des nouvelles offres sur l’équilibre du marché de la publicité audiovisuelle, le président de l’Autorité de la Concurrence Benoit Coeuré répondait, ce lundi 19 septembre : « est ce que ça va changer ? Oui, bien sûr, et peut-être que dans cinq ans ce sera différent ». No comment

[1] Etude réalisée par Harris Interactive pour NPA Conseil du 23 mars au 1er avril 2021, auprès de 3876 Français de 15 ans et plus