L'édito de Philippe Bailly

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Netflix Essentiel avec publicité aura vécu à peine une saison.

Centre de toutes les attentions des univers des médias et de la communication au début de l’automne 2022, le forfait Basic withs ads lancé par Netflix le 3 novembre 2022 s’apprête à tirer sa révérence, sans qu’il soit même possible d’en dresser le bilan ni d’en mesurer l’impact, une fois essuyés les plâtres d’un lancement conduit au pas de charge.

Après s’être plaint dans les semaines qui ont suivi le lancement de l’offre d’un inventaire insuffisant et d’une qualification des contacts lacunaires, ne permettant pas de servir les campagnes dans des conditions satisfaisantes, les publicitaires se sont faits plus silencieux. De son côté, Netflix a affirmé lors de la publication de ses derniers résultats trimestriels que le revenu moyen par abonné au forfait avec publicité était au moins équivalent – en cumulant recette publicitaire et abonnement – à celui généré par les clients des offres sans publicité.

La communication du 18 avril n’a pas permis, dans le même temps, de dissiper les « signaux contradictoires sur la montée en puissance du parc d’abonnés à l’offre Netflix avec publicité » que NPA Conseil relevait le 26 janvier : des indicateurs (augmentation significative du nombre de clients dans la zone EMEA mais baisse de l’ARPU moyen ; lire par ailleurs Des résultats mitigés pour Netflix au premier trimestre) qui suggèrent une prise significative ; des études conduites dans plusieurs grands marchés (Kantar aux Etats-Unis et au Royaume-Uni, GECA en Espagne, NPA Conseil / Harris Interactive en France…) qui vont dans le même sens ; mais aucune indication de la part des dirigeants du groupe pour en attester.

Quoi qu’il en soit, le remplacement du forfait Essentiel avec publicité par l’offre Standard avec publicité confirme que Netflix place le développement du chiffre d’affaires publicitaire au centre de ses priorités : pour un prix inchangé (5,99 € en France, 6,99 $ aux Etats-Unis…), les clients auront désormais accès à un visionnage en HD 1080p (au lieu du 720p initial), et ils bénéficieront surtout de deux flux simultanés, au lieu d’un seul, doublant ainsi les possibilités de visionnage… et d’exposition aux campagnes des marques. Si l’on ajoute que le recoupement entre les deux catalogues disponibles atteint maintenant 95 %, l’indisponibilité du téléchargement reste la dernière différence entre forfaits Standard avec et sans publicité.

En parallèle, la constitution d’équipes commerciales dédiées (dirigées pour les 5 principaux marchés européens par Damien Bernet) permettra de valoriser le produit auprès des annonceurs et de leurs agences.

Mais outre qu’elles déplaceront d’un échelon (d’Essentiel à Standard) les spéculations du marché sur les risques de cannibalisation entre les formules avec et sans publicité, mais avec un écart entre les tarifs de l’un et de l’autre porté de 3 à 8 € par mois, ces évolutions conduisent à s’interroger sur le maintien du forfait Essentiel sans publicité dans les offres du streamer : la seule absence de spots justifie-t-elle vraiment de payer 3 € supplémentaires (8,99 € plutôt que 5,99 €), quand elle entraîne une double dégradation de l’expérience clients (nombre de streams simultané et niveau de définition du flux) ? On peine à penser que la grille commerciale de Netflix soit durablement stabilisée.

On peut enfin se demander si ce doublement du nombre de streams autorisés pour les titulaires de l’offre d’avec publicité ne sera pas interprété par les clients comme une forme d’encouragement au partage des codes… alors même que le lancement de la campagne destinées à combattre le phénomène est annoncée comme imminent.

Deux cliff hangers, au moins, pour patienter jusqu’au prochain épisode de la saga Netflix !