L'édito de Philippe Bailly

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La SVoD à l’épreuve de l’engagement

Ce 17 octobre, Netflix publiera en fin de journée (heure de Paris) ses résultats pour le 3e trimestre. La communication de la plateforme n’ayant pas encore opéré le basculement annoncé pour 2025, le commentaire portera donc principalement sur le nombre d’abonnés gagnés au cours des trois derniers mois ainsi, bien sûr, que sur le chiffre d’affaires et la marge du groupe. Les données d’engagement (a priori, fréquence et durée des visites, et finalement volume d’heures vues) auxquelles Netflix entend donner la priorité à partir de l’année prochaine représentent pourtant une source d’intérêt croissant, pour le groupe comme pour les autres acteurs de la SVoD. En indiquant l’importance de l’inventaire à commercialiser, elles fixent à court terme leur potentiel en termes de développement des revenus publicitaire. A plus longue échéance, elles informent sur le risque de churn, au nom du principe éternel, dans la pay TV, selon lequel un service qu’on ne consomme pas – ou qu’on consomme peu – est un service dont on finit par se désabonner.

De ce point de vue, la SVoD semble bien faire face à l’épreuve de l’engagement.

En août 2023, Netflix, Prime Vidéo, Disney+ et Max totalisaient 14,9 % du « temps TV » des Américains, selon les résultats de l’étude The Gauge (Nielsen). Le chiffre était de 14,6 % en août 2024. Concurrencés, notamment, par les plateformes gratuites (YouTube, Roku, Tubi, Pluto TV…), les services de SVoD n’ont pu convertir en volume de visionnage les millions d’abonnés engrangés dans l’intervalle. Et, s’agissant plus spécifiquement de Netflix, l’analyse des Engagement Report semestriels qu’il publie depuis le début 2023 indique que la durée d’écoute quotidienne moyenne par abonné est revenue à 1,9 heure au 1er semestre 2024, contre 2,2 heures un an plus tôt (lire sur la plateforme Insight NPA Netflix : La durée de visionnage par abonné passe sous les deux heures quotidiennes).

Le constat est proche au Royaume-Uni. Netflix, Prime Vidéo et Disney+ totalisaient 15,8 % du temps écran en septembre 2023, et 16,4 % un an plus tard, alors que la pénétration de la SVoD a progressé dans l’intervalle de presque 1,5 point (68,7 % des Britanniques, vs 67,3 %), d’après le Barb.

En France, finalement, le nombre de visiteurs quotidiens des plateformes de SVoD était de 8,1 millions au 3e trimestre 2024, contre 8,5 millions pour la même période de 2023, d’après le Baromètre SVoD de Médiamétrie (lire : SVoD : 5 % de part d’usage pour Max, au terme de son premier trimestre d’exploitation).

Dans l’immédiat, cette triple observation pousse à relativiser les perspectives de chiffre d’affaires que les plateformes peuvent penser générer au travers de la publicité.

Elle pourrait les pousser à demeurer prudentes sur le niveau des investissements réalisés pour développer de nouvelles productions (entre le 2e trimestre 2023 et le 3e trimestre 2024, en France, les entrées de séries originales ont été divisées par deux sur Disney+, Netflix, Paramount+ et Prime Video).

Elle pourrait aussi les inciter à continuer de jouer la carte des contenus licenciés et des re-sorties de « séries culte » (+40 % sur la même période) avec, à la clé, des économies sur les coûts d’approvisionnements en programmes, mais aussi l’intégration de titres bien identifiés, capables de générer de gros volumes de visionnages (la saison 1 de Prison Break a achevé le 13 octobre sa 6e semaine dans le Top 10 des séries le plus visionnées sur Netflix au niveau mondial)… et souvent conçus dès l’origine pour accueillir des coupures publicitaires.