L'édito de Philippe Bailly

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Le double poids de l’indécision

La rentrée n’est pas si loin, et pourtant, se sont succédé en moins de trois semaines, rien qu’en France, la démission du gouvernement, la dégradation de la note de la France par l’agence Fitch, une journée qui, sans aboutir au blocage généralisé, a perturbé l’activité et donné à voir des images de violence et de dégradation, une journée, à l’initiative des syndicats celle-là, à laquelle ils revendiquent un million de participants… Et plutôt que sur les moyens possibles pour réduire les dépenses, le débat autour de la dette publique se concentre sur les pistes d’alourdissement de la fiscalité, celle des individus (taxe Zucman…) comme celle des entreprises (taxation des avantages en nature de type tickets restaurants…).

L’ensemble n’est pas fait pour créer un climat tonifiant, ce qui pourrait être sans effet si le moral des troupes était sans effet sur la marche des affaires. Mais on sait depuis que les économistes ont travaillé sur l’impact des anticipations que ce n’est pas le cas.

S’ajoutant à un contexte international tout aussi délétère, la transmission à l’économie est bien connue et, hélas, rapide. Ménages qui poussent encore sur l’épargne de précaution, consommation en berne, prévisions de ralentissement qui poussent les entreprises à couper dans leurs investissements… L’effet autoréalisateur est connu. Avec les hausses massives des droits de douanes, les Etats-Unis se sont chargés de brider les exportations, troisième « pilier de la croissance ».

Les dépenses de marketing faisant partie des plus faciles à couper, la transmission à la publicité est déjà aussi rapide qu’inquiétante : quand l’IREP et France Pub pariaient il y a quelques jours encore sur un marché publicitaire à l’étale, voire en légère croissance, au 2e semestre, évoquer le mois d’octobre inspire aux patrons de régies des grimaces pour le moins évocatrices, alors que le 4e trimestre est celui qui pèse traditionnellement le plus lourd dans les recettes des médias.

Le contexte politique laissant la France sans équipe gouvernementale pour travailler sur le budget 2026, les perspectives ne sont pas plus souriantes du côté du financement de l’audiovisuel public. Comme Les Echos le soulignait c’est 60 millions qui pourraient manquer à France Télévisions, par rapport aux engagements de financements que le groupe avait contracté auprès de la filière audiovisuelle. Et l’équipe qui exécute les affaires courantes n’a pas le poids politique – voire la latitude juridique – pour négocier aujourd’hui une inflexion de la trajectoire, imaginée pendant l’été.

Le front des abonnements pourrait assombrir encore le tableau. En cumulant plus d’un million d’abonnés en à peine 4 semaines, Ligue 1+ a connu un démarrage spectaculaire. Mais le service est un peu l’arbre qui cache la forêt. Ou plutôt, en l’occurrence, le désert. Les intentions recueillies mi-juillet par NPA Conseil et Harris Interactive, dans le cadre du Baromètre des Usages Audiovisuels, marquent un retournement spectaculaire des trajectoires de souscription ou de résiliation d’abonnements à des offres payantes de SVoD ou télévision.

Mais finalement le pire n’est jamais sûr.

Qu’un gouvernement soit formé, au terme d’un accord politique lui garantissant de pouvoir boucler et faire discuter dans une sérénité relative la loi de Finances et les anticipations peuvent se retourner.

Que la ministre de la Culture – ou celui/celle qui lui succèdera – puisse retravailler la copie budgétaire, avec une profession mobilisée pour aider à en défendre l’équilibre.

Et que des consommateurs, plus sereins, soient moins enclins à tailler dans leurs dépenses de divertissement.

Les boursiers évoquent parfois le marché qui chausse des lunettes roses. C’est la couleur que l’on souhaite à la réalité de cette fin d’année.

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