David Cameron s’était engagé dès janvier 2013 à organiser un référendum sur le maintien de la Grande Bretagne au sein de l’Union Européenne avec « une question claire : in/out » ; les électeurs se sont donc prononcés et c’est le Brexit qui l’a finalement emporté. Le moins surprenant n’est pas de constater à quel point les modalités de mise en œuvre de ce dernier auront été peu anticipées malgré ces près de trois années et demi de préavis : quel délai pour le déclenchement des procédures prévues à l’article 50 du Traité Européen ? Quelle latitude pour les britanniques de continuer à siéger au Parlement européen ? Et même, quel degré d’irréversibilité pour le vote qui a été émis ?… Le flou reste à peu près complet à cette heure.
La nécessité de refonder le projet européen fait en revanche figure de slogan partagé parmi les responsables politiques des 27 Etats remainers et, avec elle, celle de réduire le pointillisme de la Commission en matière de normes diverses et variées.
Le secteur des télécommunications en constitue une bonne illustration : projet de Règlement « Internet ouvert », projet de Directive e-privacy, projet de Règlement Données personnelles, plan d’action pour l’e-Gouvernement, paquet de standardisation des TIC, 4e paquet gestion du spectre, connectivité, cadre réglementaire, service universel… les 16 « Initiatives » du projet de marché unique numérique européen de la Commission Juncker se traduisent d’abord, pour les opérateurs, par un tombereau de littérature bureaucratique avec, en parallèle, une rigidité inchangée dans la doctrine concurrentielle qui a vu Bruxelles interdire le rachat de O2 par Hutchison et entrave, plus largement, la recomposition du secteur dans les différents Etats membres. Permettre au secteur de se structurer et réduire l’intervention de la Commission aux domaines indiscutablement communs (la gestion des fréquences, par exemple, compte tenu des risques de brouillage aux frontières) pourrait, dans le secteur des Telecom, constituer deux lignes directrices de ce nouveau projet européen.
A l’inverse, c’est plutôt au niveau national que les industries culturelles peuvent attendre la simplification : invoqué dès 1986 dans les négociations du GATT et consacré en 1993 par le Parlement Européen, le principe de l’exception culturelle a conduit les Directives Télévision sans frontière puis SMA à se limiter à des principes généraux de promotion de la création européenne, et à quelques quota – peu exigeants – en matière d’exposition des œuvres ou d’encadrement de la diffusion de publicité. Le projet de révision de la Directive SMA publié il y a quelques semaines s’inscrit de ce point de vue dans la continuité, y compris s’agissant des minima proposés dans les catalogues des grands services de SVoD : au moins 20% d’œuvres européennes.
Et c’est au niveau des Etats membres que la possibilité de se montrer « mieux disant » au nom de cette exception culturelle s’est traduite par une réglementation complémentaire. Foisonnante dans le cas de la France. Montée en puissance de la concurrence d’acteurs mondialisés (Netflix, Amazon, Google…), volonté affirmée par des acteurs locaux (France Télévisions, TF1…) de développer des coproductions européennes ou encore lancement de plateformes de distribution au niveau continental, telles que Watch pour Vivendi, convergent aujourd’hui pour que la recherche d’une nouvelle ambition partagée débute par une simplification du Mécano hexagonal qui permettrait à la France de se rapprocher des dispositifs en vigueur chez ses voisins européens.
La sortie de la Grande Bretagne de l’Union Européenne, et les signes de fragilité croissante du « couple franco-allemand » pourraient aussi conduire gouvernement et acteurs économiques à rechercher un nouveau centre de gravité privilégiant un axe latin France, Espagne et Italie. Si cette hypothèse se confirmait, le secteur des TMT pourrait bien s’être montré précurseur, avec les opérations conduites au cours de la période récente par Lagardère (rachat de l’espagnol Boomerang), Eléphant (création d’Elephant Italia) ou encore Vivendi (montée dans Telecom Italia et alliance avec Mediaset).