« 4 more years ». Le tweet de Barak Obama célébrant sa réélection a fait le tour de la Terre ; Stéphane Richard et Richard Plepler, eux, n’ont pas précisé la durée de l’accord rendu public ce mardi 21 mars, qui prolonge et même amplifie une presque décennie de collaboration : à la diffusion des séries HBO en première fenêtre, et dans une chronologie de plus en plus resserrée par rapport à leur programmation aux Etats-Unis, OCS ajoutera désormais les exploitations ultérieures, 2e fenêtre – que détenait précédemment Canal+ – mais aussi mise à disposition de l’ensemble du catalogue sous forme de SVoD.
A parcourir les – déjà innombrables – articles qui commentent le deal, il est d’abord frappant de constater, au-delà des rubriques média business, comment les franchises de la filiale du groupe Time Warner éclipsent les patrons d’Orange et de HBO dans les publications plus grand public : « OCS s’offre tout HBO : “Game of Thrones” sur Canal+, c’est bientôt fini » pour Télérama, « Orange décroche l’exclusivité de Game of Thrones et de Westworld » pour La Tribune… Et tout aussi marquant de relever la concentration de ces renvois sur quelques références iconiques : GOT et Westworld, donc Walking Dead également, pour un catalogue qui se chiffre en milliers d’heures. De la première observation, Bill Gates sortira renforcé dans sa conviction que « content is king » ; la seconde prolonge les réflexions déjà partagées sur la façon dont la montée en puissance de l’intelligence artificielle et des assistants vocaux pourrait accentuer demain le poids des marques programmes leader dans la consommation : les journalistes se retrouvent aujourd’hui sur 2 ou 3 titres de séries top of mind au moment de traduire pour le grand public l’effet de l’accord Orange / HBO ; en ira-t-il différemment demain, quand la veuve de Carpentras interpellera Alexa, Google Home, Bixby ou l’application Ola d’Orange pour lancer un programme sur son téléviseur ?
Dans la course aux contenus premium qui s’est engagée, l’accord Orange / HBO suggère également un léger glissement du point de fixation, d’un duel Canal+ / SFR vers une bataille frontale mettant directement aux prises Orange et la filiale d’Altice et faisant courir le risque de la cornérisation à celle de Vivendi : après avoir perdu les chaînes et le catalogue Universal fin 2016, au profit de SFR, cette dernière voit aujourd’hui lui échapper la 2e fenêtre des productions HBO. Et la détermination du groupe de Stéphane Richard à renforcer son accord avec la filiale de Time Warner (« le précédent contrat coûtait autour de 10 millions d’euros par an à Orange. Or, compte tenu du degré d’exclusivité supplémentaire, il y a fort à parier que l’opérateur a déboursé davantage », note Le Figaro) laisse à supposer que Canal+ retrouvera les deux FAI sur son chemin au moment de renouveler ses contrats avec les autres studios.
A en croire les déclarations de Stéphane Richard le 2 mars devant l’UDECAM, Canal+ devrait en revanche pouvoir compter sur le soutien d’Orange pour les prochaines enchères de droits sportifs (Formule 1 et ligue des Champions dès 2017, ligue 1 au plus tard en 2019)… mais il devra compter sur ce terrain avec SFR, beIN Sports, Eurosport / Discovery… et peut être certaines des grandes plateformes numériques : Facebook, qui propose gratuitement depuis fin février l’affiche du vendredi soir de la Liga espagnole a aussi annoncé ces derniers jours un accord avec la Ligue américaine de soccer, la MLS.
Ce qui est rare est cher, décidément. Et quand augmente le nombre des convives autour de la table, les prix sont plus encore portés à se tendre…