[box style=”5″] Afin de « créer un environnement plus favorable au dynamisme du secteur audiovisuel », de faire face à la contraction du marché publicitaire et la concurrence des géants du Net, la Direction générale des médias et des industries culturelles (DGMIC) a lancé la semaine dernière une consultation publique sur la simplification des règles relatives à la publicité télévisée et au téléachat. Ouverte jusqu’au 13 octobre 2017, la consultation vise à recueillir les observations des acteurs de l’audiovisuel sur d’éventuelles modifications à apporter à la loi du 30 septembre 1986 sur la liberté de communication et au décret « publicité » du 27 mars 1992 qui la complète. La DGMIC demande également aux acteurs de « hiérarchiser » leurs demandes de modification et d’évaluer leur impact économique de la manière la plus précise possible ». [/box]
Pour rappel, Aurélie Filippetti avait lancé, le 3 juillet 2013, une consultation publique dans laquelle le ministère de la culture interrogeait les acteurs sur « l’évolution des règles applicables à la publicité télévisée, au parrainage télévisé et au placement de produit ». Le cadre a légèrement évolué depuis, avec l’assouplissement du régime du parrainage télévisé par un décret du 15 février 20171.
Cependant, alors qu’elles faisaient déjà l’objet de questions de questions spécifiques dans la consultation de 2013, les règles applicables aux secteurs interdits de publicité et aux décrochages publicitaires n’ont pas évolué. En effet, afin d’éviter un accès inégalitaire à la publicité au profit des opérateurs les plus importants, l’article 8 du décret « publicité » exclut de l’accès à la publicité télévisée « l’édition littéraire et le cinéma », ainsi que « la distribution pour les opérations commerciales de promotion ». L’article 13 du même décret interdit également aux éditeurs de services d’effectuer des décrochages publicitaires locaux, leurs spots devant être simultanément diffusés dans l’ensemble de la zone de service, dans l’objectif de garantir l’accès à la publicité locale aux seuls médias locaux.
Dans sa consultation lancée la semaine dernière, la DGMIC estime qu’il est nécessaire « de mettre à jour les analyses sur ces points », et demande aux acteurs s’il leur parait aujourd’hui pertinent d’assouplir le dispositif des secteurs interdits de publicité et selon quelles modalités « qui soient de nature à protéger la diversité culturelle et le pluralisme des médias ». Concernant la publicité segmentée, la consultation formule une proposition de rédaction nouvelle de l’article 13 du décret publicité, qui permettrait aux diffuseurs de réaliser des décrochages locaux dans le respect des données personnelles des téléspectateurs, sauf « dans les émissions pour enfants ou programmes qui précèdent ou suivent immédiatement ces émissions » ou lorsque l’annonceur indique « une adresse ou une identification locale explicite ».
Toujours en matière de publicité segmentée, le gouvernement s’intéresse à l’analyse des acteurs sur l’impact du futur règlement « ePrivacy » sur cette nouvelle technique publicitaire. L’article 8 du projet de règlement prévoit une interdiction de principe pour l’opérateur d’utiliser les capacités de stockage et de traitement ainsi que la collecte des données stockées sur les équipements terminaux des utilisateurs, sauf si i) cela est nécessaire à la transmission de communications électroniques, ii) l’utilisateur y a consenti, iii) cela est nécessaire pour la fourniture d’un service auquel l’utilisateur a souscrit ou iv) le prestataire du service de communication auquel l’utilisateur a souscrit en a besoin pour effectuer des mesures d’audience. A noter que les députés du Parlement européen et le Conseil pourraient profondément modifier ce texte. Au Parlement, deux visions s’opposent drastiquement, la rapporteure socialiste en commission des libertés civiles, en charge du dossier, appelant à un renforcement de la protection des données des utilisateurs, alors que la droite semble pencher pour son assouplissement. Axel Voss (PPE), rapporteur pour la commission des affaires juridiques, saisie pour avis, propose même de créer une exception spécifique permettant le traitement des données contenues sur les équipements terminaux des utilisateurs à des fins de publicité personnalisée.
La DGMIC interroge ensuite les acteurs sur les durées maximales autorisées de diffusion publicité, à la lumière du projet de révision de la directive « SMA », actuellement en cours de négociation entre le Parlement et le Conseil, et de la décision « Sanoma » de la Cour de justice de l’Union du 17 février 2016, dans laquelle le juge européen avait estimé que les annonces de parrainage dans les bandes annonces de programmes parrainés et les « secondes noires » entre les spots publicitaires devaient être comptabilisées dans le temps maximal de publicité. Alors que le Conseil prévoit dans sa position commune1 une limitation de 20 % de publicité et de téléachat sur la période comprise entre 6h et 18h, et de 20 % sur celle comprise entre 18 h et minuit, sans plafond en dehors de ces tranches, la DGMIC demande aux acteurs s’ils estiment que les plafonds actuels doivent être relevés.
Une autre piste d’assouplissement concerne également les interruptions publicitaires dans les programmes autres que les oeuvres. Le décret publicité dispose aujourd’hui que les coupures publicitaires sont autorisées dans les programmes autres que les oeuvres à condition de « tenir compte des interruptions naturelles du programme », et qu’une période d’au moins vingt minutes s’écoule entre deux interruptions. Des régimes d’exception sont également prévus pour les journaux télévisés, les magazines d’actualité et les émissions pour enfant (interdiction pour les programmes d’une durée inférieure à 30 minutes), ainsi que les émissions religieuses (interdiction totale). La DGMIC demande donc si les acteurs seraient favorables à un assouplissement de ce cadre, dans les limites prévues par la directive « SMA » de 2010. Pour rappel, celle-ci établit qu’à l’exception des services religieux, les diffuseurs peuvent librement interrompre par des messages publicitaires les programmes pour enfants (interruption par tranche de 30 minutes des programmes dont la durée programmée est supérieure à 30 minutes) et les journaux télévisés (interruption par tranche de 30 minutes), sans les contraintes additionnelles des « interruptions naturelles » des programmes et du respect d’une période d’au moins vingt minutes entre deux interruptions.
Dans les réponses à la consultation publique de 2013, certains acteurs avaient demandé la possibilité d’une troisième coupure publicitaire dans les oeuvres cinématographiques. A l’occasion du Colloque NPA-Le Figaro du 17 mai 2017, Gilles Pélission, PDG du groupe TF1, avait réitéré cette demande s’agissant des films de 120 minutes. La DGMIC demande donc si les acteurs estiment toujours opportun d’assouplir l’article 73 de la loi du 30 septembre 1986, qui prévoit que « la diffusion par un service de télévision d’une oeuvre cinématographique ou audiovisuelle ne peut faire l’objet de plus de deux interruptions publicitaires ».
Enfin, la DGMIC s’intéresse au cadre applicable en matière de télé-achat, prévu par les articles 28 à 30 de décret publicité. Ces émissions sont limitées à un total de 8 par jour, ne peuvent être interrompues par des spots publicitaires, sont interdites le mercredi après-midi et ne peuvent être diffusées par voie hertzienne terrestre qu’entre minuit et 11 heures, puis 14 et 16 heures. De plus, tout télé-achat est strictement réservé aux émissions de télé-achat à proprement parler, alors que le cadre minimal prévu par la directive « SMA » autorise les « spots de télé-achat », c’est-à-dire la diffusion d’offres directes de vente de produits ou de services au sein de messages publicitaires. Le gouvernement interroge les acteurs sur un possible assouplissement général du cadre, ainsi qu’une autorisation des « spots de télé-achat ».
Dans le cadre de l’enquête sectorielle qu’elle a initiée dans le secteur de la publicité en ligne, l’Autorité de la concurrence avait lancé une consultation publique, en juillet 2017, afin de clarifier la compréhension de certaines offres et technologies et mieux identifier certains comportements. Les réponses sont attendues avant le 15 septembre 2017.