Il y a un an presque jour pour jour, INSIGHT NPA évoquait « un été (OTT) meurtrier » en référence aux nombreux projets annoncés en juillet/août 2017 ; comme en témoigne en cette rentrée la synthèse établie par les équipes de NPA Conseil, le bouillonnement d’initiatives ne s’est pas ralenti, loin s’en faut.
Nous relevions alors la montée de Disney dans le capital de BAMTech, et la volonté de lancement d’au moins deux offres, l’une centrée sur le sport et l’autre plus généraliste ? Pour 4,99$ par mois, ESPN+ propose depuis le 12 avril un large éventail de disciplines (base Ball, hockey sur glace, golf, football, cricket, rugby…). Quant au service « Disney Play » (tel que – provisoirement ? – baptisé par Bob Iger), ses contours commencent à se dessiner. Beaucoup moins volumique que Netflix, proposé à un prix inférieur et intégrant parmi ses premières briques de contenus originaux la future série Star Wars ; et la majorité dont dispose désormais le groupe au sein de Hulu (60%) grâce au rachat de Fox, lui apportera une flèche supplémentaire à son arc OTT.
Il y a un an, les développements à l’international de CBS All Access et Showtime OTT étaient au stade de l’intention, les deux services cumulant à l’époque moins de 5 millions d’abonnés ? Maintenant actifs au Canada et en Australie, leur prévision de conquête d’abonnés a été sensiblement revue à la hausse au cours de l’été et son « frère ennemi » Viacom a parallèlement annoncé « l’accélération de son projet de plateforme D2C (Direct to consumers) OTT globale ».
Il y a un an, NBC Universal annonçait la fermeture de Seeso, le service de SVoD qu’il avait lancé début 2016 ? Le groupe pourrait rapidement rebondir, avec Watch back, un nouveau service gratuit dédié aux formats courts permettant aux consommateurs de des points en fonction de leur consommation sur la plateforme.
Et au cru d’été 2018 il faut ajouter encore, l’accord signé par Amazon avec Comcast pour que son service Prime Video soit intégré au line up de l’opérateur, l’arrivée annoncée de Starzplay (filiale de Lionsgate) en France, Italie et Espagne, le développement – évoqué par l’agence Bloomberg mais non confirmé par Amazon – de Frank, complément de la gamme des Fire apportant un service de nPVR aux clients du distributeur, l’entrée de Samsung dans la bataille des assistants vocaux, la diffusion de la Champions League en Amérique Latine par Facebook… Ou encore le projet de plateforme SVoD de Walmart, qui devrait se démarquer du leader Netflix par un positionnement plus middle class et par un tarif qui serait d’environ 8$/mois.
La liste est loin d’être complète. Un panorama plus exhaustif en est dressé par Gilles Pezet sur la plateforme INSIGHT NPA.
Mais qu’en retenir, au-delà du sentiment de bouillonnement permanent ?
Il y a un an, nous pointions 4 lignes de forces :
- La détermination de l’ensemble des acteurs, qu’ils soient ou pas issus du secteur audiovisuel, à s’assurer (ou à reprendre) la maîtrise des droits.
- La tendance croissante à vouloir exploiter ces derniers en direct au détriment des modèles d’agrégation qui dominaient jusqu’alors,
- Le passage progressif des fonctionnalités permettant d’optimiser « l’expérience client » (start over, nPVR, Download to go…) du rang de « bonus » à celui de « must have ».
- Et finalement la volonté de « penser global » en déployant ces nouvelles offres bien au-delà des frontières nationales…
Pour chacune de ces tendances, ces 12 derniers mois ont été placés sous le signe de l’amplification et de l’accélération :
- Volumes records vers lesquels la multiplication des originals a poussé l’an dernier la production de séries aux Etats-Unis (487, dont près du quart initiées par les nouveaux entrants Netflix, Amazon…),
- Méga fusion (AT&T / Warner, Fox / Disney et sans doute, bientôt, CBS / Viacom) et capitalisations boursières chaque jour plus impressionnante des géants du numérique (Apple aura été le premier groupe à franchir le cap symbolique des 1000 Mds$ cet été, mais ses concurrents ne sont pas loin), qui fournissent aux uns et aux autres les moyens de penser mondial,
- Arrivée d’acteurs issus du retail (Walmart aux Etats-Unis, Alibaba en Chine…) qui portent le fer contre leur concurrent Amazon et entendent, comme l’a fait ce dernier, utiliser les contenus comme un levier pour leurs activités historiques,
- Alliances inédites qui préfigurent l’effacement des frontières entre « monde audiovisuel traditionnel » et « univers OTT » (accords de pleine intégration de Netflix aux offres de Comcast, Virgin Media ou Sky, schéma proche pour Amazon avec BT, Vodafone et Comcast, remplacement total ou partiel du décodeur traditionnel par l’Apple TV 4K pour Canal+, Charter Communication ou Salt) …
L’Europe, et naturellement la France, ne restera pas à l’écart de ces dynamiques.
La création de Salto par France Télévisions, M6 et TF1, comme les projets d’alliances public / privé comparables évoqués en Allemagne ou en Grande Bretagne, traduisent une volonté louable de dépasser les clivages anciens pour s’adapter au nouveau paradigme.
Las ! Les institutions, elles, peinent à se mettre au rythme du monde numérique, et sont bien loin des « années chien » (une année pour l’homme équivaudrait à sept pour l’animal) pour l’adaptation du cadre législatif et réglementaire :
- Après que l’accord intervenu début juin entre les différentes institutions de l’Union ait été « soumis au Parlement européen pour un vote en première lecture, puis au Conseil pour adoption», la nouvelle Directive SMA « entrera en vigueur le vingtième jour suivant celui de sa publication au Journal officiel de l’UE et les États membres auront 21 mois pour la transposer dans leur législation nationale », indiquait la Commission au début de l’été… Sa pleine application pourrait n’intervenir qu’au 2e semestre 2021, alors que les premiers travaux officiels destinés à élaborer le texte remontent… au début 2015.
- En France, la consultation lancée à l’été 2017 sur l’assouplissement des règles de la publicité TV n’a connu aucune suite à ce jour, les orientations annoncées début juin sur l’évolution du service public ont laissé de côté les aspects d’organisation, de gouvernance et de financement, et la feuille est encore blanche s’agissant de la réforme de la loi de 1986, pour ses dispositions visant les acteurs privés…
A leur mesure, NPA Conseil et le Figaro s’attacheront à faire avancer la réflexion collective en réunissant le 11 octobre les principaux responsables du secteur des médias français : Aurore Bergé (députée, raporteure de la Mission d’information sur une nouvelle régulation de la communication audiovisuelle à l’ère numérique), Delphine Ernotte (présidente de France Télévisions), Nicolas Guérin (secrétaire général du groupe Orange), Laurent Guimier (vice-président-directeur général d’Europe 1, de RFM et de Virgin Radio), Gilles Pélisson (Pdg de TF1), Denis Rapone (président de l’HADOPI), Hervé Rony (directeur général de la SCAM), Maxime Saada (Président du directoire de Canal+), Maryam Salehi (directrice général du groupe NRJ), Olivier Schrameck (Président du CSA), Sébastien Soriano (Président de l’ARCEP), Nicolas de Tavernot (Président du directoire du groupe M6) et Alain Weill (Pdg d’Altice France) ont déjà confirmé leur participation à ce 28e Colloque NPA / Le Figaro.
Dans l’attente de vous y accueillir, toute l’équipe de NPA Conseil vous souhaite une excellente rentrée !