Dans les années 1920, l’histoire a montré que le volontarisme politique – « L’Allemagne paiera ! » – ne suffisait pas à créer une réalité tangible ; il pourrait bien en être de même de la transposition de la Directive SMA, et des contraintes qu’elle entraînera.
Les responsables publics français – Président de la République, Premiers ministres et ministres de la Culture – avaient fait de cette mise à contribution des leaders mondiaux de la SVoD – Amazon, Disney+, Netflix… – le point cardinal de la stratégie d’adaptation au nouvel environnement numérique.
Quitte, pour cela, à retenir des taux de contribution à la production (20% à 25% du chiffre d’affaires) qui devraient représenter environ 50 M€ d’apport à la production cinéma dès la première année (lire par ailleurs Estimation NPA – Les plateformes devront investir au moins 50 M€ dans le cinéma) mais sont sans équivalent, et de loin, dans les autres Etats de l’Union, où ils ne dépassent pas 5%.
Et sans réflexion parallèle – visible à ce stade, au moins – sur la « capacité d’absorption » sans inflation dans les activités de production et/ou de possibilité de réduction parallèle de la contribution demandée aux chaînes TNT ou cabsat.
Un premier risque, déjà identifié, est celui de l’explosion des coûts, et de l’éviction des acteurs nationaux telle que la connaît la Grande Bretagne depuis 2013.
Un deuxième danger est que le nouveau cadre fasse résonance avec les stratégies des studios (Disney, Warner…) pour réduire la place de la salle comme point d’entrée du cycle d’exploitation des films, et garante du bon ordonnancement de la chronologie de médias (lire par ailleurs Le cinéma à deux vitesses est déjà une réalité).
Tel qu’il est aujourd’hui rédigé, le projet de décret SMAD laisse en effet toute latitude aux plateformes – ou presque – pour décider si la contribution à la production cinéma qui leur sera désormais imposée ira à des films visibles dans les cinémas français… ou pas (lire par ailleurs Cinéma & Décret SMAD : une liberté presque totale laissée aux plateformes de SVoD).
Il reviendra au gouvernement de trouver un équilibre permettant de prévenir ces risques lorsqu’il arrêtera le texte définitif du décret.
Rendez-vous pour en juger au début du printemps 2021, compte tenu des procédures à respecter avant la publication du texte (avis du CSA et du Conseil d’Etat, et surtout notification à la Commission européenne) !