Une proposition de loi visant à réduire l’empreinte environnementale du numérique en France, adoptée au Sénat le 12 janvier, un avant-projet de loi Pompili « portant lutte contre le dérèglement climatique et le renforcement de la résilience face à ses effets » examiné en conseil des ministres le 10 février, une nouvelle initiative d’engagement en faveur de la consommation verte de la Commission européenne lancée le 25 janvier : en ce début d’année 2021, les autorités françaises et européennes semblent saisies de l’urgence climatique et vouloir répondre à l’impatience des citoyens que le déréglement climatique, sur fonds de crise sanitaire, inquiète.
Les entreprises aussi rivalisent de déclarations de bonnes intentions. Les opérateurs télécoms Orange et Iliad annoncent qu’ils atteindront la neutralité carbone en 2040 et 2035 devançant les objectifs de la GSM Association qui s’est engagée à atteindre un niveau net d’émissions de carbone zéro d’ici 2050, conformément à l’Accord de Paris sur le Climat. Désormais, plutôt qu’un mobile dernier cri associé à un forfait, les opérateurs communiquent sur la reprise et le reconditionnement des terminaux dans leurs boutiques.
Les médias audiovisuels participent à l’effort de sensibilisation du public à des pratiques éco-vertueuses dans leurs programmes et se disent prêts à souscrire à des codes de bonnes conduites en matière de publicité. Les producteurs adoptent peu à peu des pratiques de tournages plus écoresponsables et le CNC veut les encourager dans cette voie.
Dans ce numéro d’InsightNPA, notre dossier passe en revue les initiatives en termes de régulation et celles des acteurs des filières audiovisuelle et télécoms. La convergence de toutes ces bonnes volontés sera-t-elle à la hauteur du défi ?
La marche vers l’écoresponsabilité devra contourner bien des contradictions. Par exemple, réguler la publicité polluante sans raréfier les ressources de médias indispensables à l’information et donc au débat démocratique en particulier, ainsi que le reconnait l’étude d’impact du projet de loi Pompili, au demeurant assez indigent sur l’évaluation précise de l’impact économique des mesures proposées. Le choix de privilégier les codes de bonne conduite à des interdictions est supposé atténuer les pertes économiques.
Contradiction aussi entre la volonté d’inciter d’un côté à la sobriété numérique, et de l’autre d’apporter la 5G et le très haut débit partout. Certes la fibre consomme en moyenne 3 fois moins que l’ADSL, et la 5G serait la première technologie mobile « green by design ». Mais la bonne vieille TNT reste la plateforme de diffusion la moins énergivore et avec le haut débit et la 5G, nos usages numériques vont continuer d’exploser.
Contradiction aussi en chacun d’entre nous. Certes il est un peu moins tendance aujourd’hui de faire la queue pour acheter le dernier iPhone, que d’exhiber son mobile reconditionné de la génération précédente. Mais de là à renoncer à nos usages numériques, alors que de nouvelles offres apparaissent sans cesse – plateformes de streaming, réalité virtuelle…,- dont NPA tient la chronique. Sommes-nous prêts à la sobriété ?
2021 sera-telle l’année du passage au vert ? Peut-être pas encore mais en tout cas celle d’une sensibilisation de plus en plus exacerbée à cet enjeu. Et du coup, pour leur image et dans leur communication, les entreprises de la filière Medias et Telecoms ne pourront plus se contenter d’écoblanchiment (ou greenwashing) ou de planter des arbres pour compenser leurs émissions de CO2. Elles devront apporter des preuves tangibles de leur engagement pour convaincre leurs clients ou leur public. Un cercle vertueux qui s’enclenche ?