De plus en plus d’annonceurs US font le choix d’intégrer l’activité d’achat d’espace programmatique en interne, notamment des acteurs de la banque, de l’assurance, des produits de grande consommation. Quel poids représentent-ils en termes de transactions ? Et quelles sont les raisons de cette stratégie ?
Le segment qui enregistre la plus forte croissance
D’après les relevés effectués par la plateforme programmatique Index Exchange (en tant que SSP), la part des achats digitaux programmatiques opérés en direct par les annonceurs ne cesse de progresser sur l’ensemble de l’année 2014. Sur les 180 milliards d’impressions commercialisées chaque trimestre via la SSP, la part de ces derniers dans les transactions s’élève à 15%, en hausse de 4 points entre les T4 2013 et 2014. Il s’agit du seul segment en croissance.
Evolution de la part des dépenses programmatiques par catégorie d’acteurs (%)
Source : Index Exchange
Si les acteurs tiers, du type networks, restent les principaux intervenants avec une part de marché de 39%, ils enregistrent un recul de 2 points en un an. Cette tendance à la baisse est également subie par les trading desks et les agences média, de chacune -3 pts. Cela ne signifie pas pour autant que leurs revenus s’effondrent, car le programmatique connaît une expansion rapide qui profite à l’ensemble des acteurs. Toutefois, un nombre croissant d’annonceurs décide d’internaliser l’achat d’espaces programmatique, en particulier des grandes marques « traditionnelles » issues de la bancassurance et des produits de grande consommation. Ainsi, Kellogg Co et l’assureur Allstate ont officiellement sauté le pas récemment. Et des entreprises plus « naturellement digitales » ont pris la même décision, à l’instar d’Amazon ou de Groupon. Cette stratégie pour ces dernières peut sembler plus logique, évidente. Car, de par leur activité d’e-commerce, elles ont des prédispositions au digital : elles possèdent déjà leur Ad Server, leur plateforme d’analytique, leur DSP (demand-side platforms), leur DMP (data-management platforms), elles ont intégré des compétences marketing spécifiques (Preferred Marketing Developers) et développé des méthodologies en propre, par ex. de mesure / suivi de l’attribution des campagnes. Cependant, quels que soient leur profil et leur activité, leurs raisons d’internaliser le programmatique sont peu ou prou identiques.
Meilleure gestion des coûts et des datas
Leur premier objectif est de bénéficier d’une plus grande transparence des coûts. L’automatisation des achats a induit l’augmentation du nombre d’intermédiaires. Ce système tend à générer une hausse des frais et honoraires, relativement opaque. La ventilation des investissements programmatiques aux Etats-Unis se décline comme suit :
Ventilation des investissements programmatiques entre les acteurs
Source: WFA Guide to a Programmatic Media
Ainsi, les agences en concentrent environ 20% (trading desks + agencies of record[1]). Les Demand-Side-platform sont des plateformes techno permettant aux annonceurs de centraliser le pilotage de leurs campagnes médias dans une même interface. Il s’agit d’un service que proposent de plus en plus d’agences à leurs clients. Les DSP permettent aux agences de « remonter la chaîne de valeur puisqu’elles proposent un service supplémentaire et clé-en-main aux annonceurs », selon Stéphane Ambrosini DG d’Adconion Media Group. La catégorie « Value Adds » comprend les services technologiques spécialisés dans l’enrichissement de data, le ciblage, le reporting, la vérification, etc. qui concentre 25% en moyenne des budgets. Les éditeurs récupèrent quant à eux 40%. Face à cette situation, certains annonceurs préfèrent intégrer les activités de ces intermédiaires pour optimiser les coûts des campagnes.
Le second objectif commun aux marques est la capacité à mieux exploiter et protéger les datas. En gérant elles-mêmes les achats, elles ont l’opportunité de valoriser leurs propres données récoltées sur leurs plateformes web (1st party). De cette manière, elles peuvent profiter de l’avantage offert par le programmatique d’acheter de manière flexible des audiences proposées par les éditeurs, en adéquation avec leurs clients et cibles, et sans intermédiaires.
D’autres raisons justifient ce choix : la possibilité d’améliorer la collaboration interne entre les services (notamment en lien avec le Social Media Optimization et le Search Engine Advertising), la protection de données internes (trop sensibles pour être partagées avec un acteur extérieur), l’accent mis sur l’efficacité publicitaire…
Dans le cas d’Allstate, la relation avec son agence média Starcom va de fait évoluer. Si elle conservera ses activités de médiaplanning et d’achats sur les médias traditionnels, Starcom adoptera un rôle de consultant, intervenant dans la conception de la stratégie globale de l’assureur sur les questions de connaissances du marché, de contenus, de datas et d’analytics, grâce à sa vision transversale et pluri-secteurs.
[1] : Il s’agit d’une entité représentant un groupement d’agences travaillant pour un seul annonceur, habilitée via mandat à négocier et réaliser les achats d’espace.