La génération Y londonienne a droit depuis la semaine dernière, à un nouveau magazine bi-mensuel qui lui est entièrement dédié : Swipe. Distribué gratuitement dans le métro et les bars branchés de la capitale, à raison de 20 000 exemplaires pour le premier numéro, Swipe a la particularité de proposer les meilleurs articles du web réunis dans un même support papier.
Alors que le néerlandais Blendle lançait il y a quelques mois son service aux Etats-Unis afin de conquérir les millennials via le micro-paiement d’articles de presse écrite[1], c’est au tour de Swipe de partir à leur conquête. A l’heure où l’on considère la presse papier en crise, à l’image du quotidien The Independent qui a basculé entièrement sur Internet en mars dernier ou du quotidien New Day du groupe Trinity qui n’a vécu que 2 mois, Swipe fait justement le pari du print. Pour le justifier, le magazine établit le constat que la génération Y reste attachée au support papier, la lecture sur smartphone n’étant pas la plus aisée. De plus, le nouveau magazine londonien estime que les articles publiés en ligne sont d’aussi bonne qualité que ceux publiés dans la presse écrite traditionnelle, mais qu’ils souffrent d’un cruel manque de visibilité sur Internet. En effet, les articles de qualité peuvent être noyés dans la masse parmi les contenus de type clickbait[2] sur les réseaux sociaux et sur Google. S’opposant à ce modèle et afin d’atteindre son cœur de cible, Swipe publie uniquement les articles issus du web que son équipe, entièrement âgée de moins de 30 ans, estime les plus intéressants mais pas forcément les plus populaires. En revanche, aucune de ces publications n’est présente sur le site Internet du magazine. Ce sont ainsi près de 70 partenariats qui ont déjà été établis entre Swipe et des pure players d’information, tels que Business Insider, ainsi qu’avec des blogueurs plus ou moins connus. Se retrouve ainsi en Une du premier numéro du magazine « la dangereuse bromance entre Poutine et Trump », graffiti réalisé par la startup Malcontent dirigée par un ancien journaliste du Telegraph. Suivent des articles issus de Vocativ, site d’information présent sur le deep web, une rubrique « Tendance » couvrant les derniers posts les plus marquants sur Instagram et Twitter, ou encore un article issu du site collaboratif Wikihow sur la façon d’élever un loup en tant qu’animal de compagnie.
Quant à son business model, Swipe se rémunère uniquement par la publicité. Les annonceurs présents dans le premier numéro semblent cibler le lectorat privilégié du magazine, à l’exemple d’Uber, tout comme une publicité pour un « bootcamp » de développeurs, ou encore une brasserie artisanale. Ces revenus permettent ainsi de financer l’impression mais également les auteurs des articles originairement publiés sur Internet et repris dans le magazine. Ceux-ci sont rémunérés à hauteur de 10 pences par mot avec leur accord préalable. En échange, Swipe propose l’intégration du logo, de la marque et du lien URL du site ou du blog d’où proviennent les publications.
Cependant, Swipe devra faire face à la baisse des revenus publicitaires sur le print constatée ces derniers temps au Royaume-Uni : -16% pour le dernier semestre du Daily Mail, premier tabloïd du pays, et -20% en avril pour l’ensemble des titres du Royaume-Uni selon le directeur du Telegraph, la faute au ralentissement économique mais également au déplacement en masse des annonceurs vers la publicité en ligne. De plus, la concurrence de la presse écrite gratuite s’annonce féroce avec des titres tels que TimeOut, Evening Standard, City A.M, Coach, Shortlist, Stylist ou Metro déjà bien implantés dans la capitale anglaise. Quant à l’expansion du titre à l’international, une installation à Paris ainsi qu’à New York seraient d’ores et déjà prévues, sans toutefois l’annonce d’une date officielle.
[1] Voir Flash 791 « Blendle arrive aux Etats-Unis pour tenter de réconcilier les jeunes avec la presse écrite »
[2] Articles aux titres aguicheurs destinés à générer le plus grand nombre de clics