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Les discussions relatives à la chronologie des médias ont repris hier, mardi 21 juin, sous l’égide du CNC.
Les éditeurs de services de télévisions et les représentants des organisations professionnelles du cinéma se retrouvent pour un nouveau cycle de discussions en vue de la conclusion d’un nouvel accord. Les discussions pour faire évoluer la chronologie des médias avaient été interrompues fin 2014 et avaient repris en juillet 2015 sans parvenir à un nouvel accord.
Pour rappel, la chronologie des médias fixe l’ordre et les délais dans lesquels les diverses exploitations d’une œuvre cinématographique peuvent intervenir après sa sortie en salle.
L’enjeu principal de la reprise des discussions réside dans la modernisation des fenêtres des services de télévision et l’accompagnement des nouveaux usages liés à l’exploitation des films en VOD, SVOD ou EST.
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Rappel de l’accord sur la chronologie des médias
L’accord interprofessionnel pour le réaménagement de la chronologie des médias du 6 juillet 2009 définit des fenêtres de diffusion successives pour la diffusion des œuvres cinématographiques sur l’ensemble des supports existants afin de protéger l’exploitation des films en salles et sur ces différents supports. Cet accord est entré en vigueur le 6 juillet 2009 et a été conclu pour une durée de deux ans, tacitement reconductible par périodes d’un an. Il a fait l’objet d’un arrêté d’extension du Ministre de la Culture et de la Communication en date du 9 juillet 2009.
Les délais d’exploitation des œuvres cinématographiques après leur sortie en salles selon cet accord sont les suivants :
- Délai d’exploitation d’un film en VOD à l’acte (téléchargement temporaire ou définitif) ou sur support physique: 4 mois après sa sortie en salles (dérogation possible à 3 mois pour les films ayant réalisé moins de 200 entrées au cours de leur 4ème semaine d’exploitation en salles)
- Délais d’exploitation d’un film par un service de télévision payant de cinéma:
- Première fenêtre: 10 mois après la date de sortie en salles pour les services ayant signé un accord avec les organisations professionnelles du cinéma (à défaut d’accord, le délai est de 12 mois) ;
- Deuxième fenêtre: 22 mois après la date de sortie en salles pour les services ayant signé un accord avec les organisations professionnelles du cinéma (à défaut d’accord, le délai est de 24 mois).
- Délais d’exploitation d’un film par un service de télévision en clair et un service payant non cinéma:
- 22 mois après la date de sortie en salles pour les services ayant des engagements de coproduction d’au moins 3,2 % de leur chiffre d’affaires (y compris la part antenne),
- 30 mois dans les autres cas.
- Délai d’exploitation des films par un service de SVOD: 36 mois
- Mise à disposition des films en VOD à titre gratuit : 48 mois
L’application de ces délais est assortie des principes suivants :
- Gel des droits: les éditeurs peuvent, par voie contractuelle, garder l’exclusivité de l’exploitation des films qu’ils ont financés pendant toute la durée de leur fenêtre d’exploitation pour interrompre la disponibilité du film en VOD ;
- Encadrement des pratiques de promotion des œuvres afin de protéger la rentabilité de chacune des fenêtres de diffusion des films ;
- Rémunération minimale garantie des ayants droits pour chaque téléchargement ou visionnage d’un film en VOD.
Fin 2015, à l’issue des discussions précédentes portant sur la négociation d’un nouvel accord, un projet d’avenant qui n’a finalement pas été signé comportait les aménagements suivants :
- Introduction d’un principe de fenêtres glissantes sous conditions avec anticipation d’une fenêtre d’exploitation en cas d’absence de diffusion au sein de la fenêtre précédente ;
- Extension de la dérogation à 3 mois pour la fenêtre VOD ;
- Avancement des fenêtres des services de télévision payants et gratuits de 2 mois ;
- Limitation du gel des droits ;
- Exclusion des courts métrages de l’accord.
Les enjeux de la modernisation de l’accord
La signature d’un nouvel accord sur la chronologie des médias est très attendue. Il s’agit en effet de moderniser cet accord afin d’accompagner les nouveaux usages en matière d’exploitation de films et d’enrayer le développement du piratage tout en préservant la rentabilité de chacune des fenêtres et le préfinancement des films par les services de télévision.
La reprise des discussions portera ainsi notamment sur l’avancement de la première de fenêtre de télévision payante et de la fenêtre SVOD, la limitation du gel des droits et sur la possibilité de mener des expérimentations, ce qui n’est pas prévu dans la chronologie des médias actuelle.
Aujourd’hui, avec un délai de 36 mois pour diffuser des films, les services de SVOD ne peuvent pas faire figurer de films récents dans leur catalogue, ce qui limite considérablement leur développement. Un raccourcissement de ce délai pourrait dès lors rendre les offres de SVOD plus attractives et inciter le public à se tourner vers les offres légales.
Par ailleurs, la chronologie des médias actuelle ne distingue pas de fenêtre spécifique pour l’EST (« Electronic Sell Through » ou téléchargement définitif). Or la création d’une fenêtre spécifique pour ce nouveau mode de consommation distincte de la fenêtre VOD permettrait de favoriser le développement des offres légales de téléchargement définitif de films et dynamiserait le marché de la vidéo.
En raison des nombreuses sorties de films chaque semaine, la durée de vie des films est très limitée. Certains souhaiteraient que le nouvel accord autorise la sortie simultanée de films en salles et en VOD pour les films les plus « fragiles » afin de leur assurer une meilleure exposition. Sous l’impulsion de la commission européenne, des expérimentations de sortie de films day-and-date (sortie simultanée du film en salles et en VOD) ou en e-cinéma ont d’ailleurs eu lieu en Europe en 2013 et 2014. L’ARP a notamment participé à ces expérimentations dans le cadre du projet TIDE.
En attendant, face à l’engorgement des films en salles, certains producteurs font le choix de sortir leur film uniquement en VOD pour pouvoir bénéficier d’une meilleure exposition et ainsi éviter des frais de distribution importants. C’est le cas pour le film 99 Homes de Ramin Bahrani (Grand Prix du Festival du film américain de Deauville) sorti le 18 mars 2016 ou encore pour The end de Guillaume Nicloux, sorti également en e-cinéma le 8 avril dernier.