Intervenant en conclusion des débats du 31 Colloque NPA, Roch-Olivier Maistre a souligné dans son avant-propos l’importance fondamentale de la confiance « cet ‘’invisible ciment des institutions’’ dont parlait Nietzsche, sans lequel on ne peut faire société, sans lequel on ne peut bâtir de projet commun ».
« Le lien s’abîme, mais il n’est pas rompu »
S’agissant de l’information, et des médias qui la diffusent, « le lien s’abîme, mais il n’est pas rompu », estime le président de l’Arcom, relevant que 94 % des Français se déclarent intéressés par l’information et s’informent quotidiennement mais que, dans le même temps, « près de la moitié (48 %) doutent, toujours ou souvent, de la fiabilité des informations diffusées par les médias » et, qu’au-delà, « 42 % des répondants à l’étude (de l’Arcom sur les modes d’information des Français) affirment ‘’qu’on peut très bien s’intéresser à des informations sans chercher à savoir si elles sont vraies ou fausses’’ ».
Problème de confiance dans les journalistes ? « Les journalistes sont la 4ème source d’information considérée la plus fiable, après les proches, les experts et les associations de terrain : 57 % [des Français leur] accordent leur confiance, contre 25 % pour les hommes et femmes politiques, mais 79 % pour les scientifiques ».
Renforcer cette confiance ne peut pas se « décréter : [la confiance] se mérite, se construit et se consolide. Il faut rallumer le feu mais surtout entretenir la flamme », et pour cela payer le prix « de l’exigence, dans un monde toujours plus complexe, où le faux se mêle si facilement au vrai dans la masse ».
« Dans la régulation plus qu’ailleurs, la confiance n’exclut pas le contrôle »
C’est en refusant tout manquement à cette exigence, donc en les pointant et, éventuellement, en les sanctionnant, que le régulateur peut, d’après Roch-Olivier Maistre, contribuer à conforter le lien : « Le postulat de départ de la régulation repose donc sur la confiance dans les éditeurs : ils font leur travail, avec leurs sensibilités, leurs programmations, leurs orientations stratégiques ; s’ils ne respectent pas le cadre en vigueur, nous faisons le nôtre. Dans la régulation plus qu’ailleurs, la confiance n’exclut pas le contrôle ».
Ce contrôle se traduit notamment par une vigilance à bien « distinguer les faits des commentaires. Nous intervenons chaque fois que nécessaire quand ce contrat moral et professionnel entre les éditeurs et le public est rompu ».
La vigilance vaut également sur « l’honnêteté de l’information [et sur] son caractère pluraliste, a poursuivi le Président de l’Arcom. Eclairer le débat, en particulier sur les sujets les plus sensibles, impose que puisse toujours s’exprimer une pluralité de points de vue[et] notre délibération du 23 juillet sur le pluralisme [confirme qu’] on ne peut pas parler tout le temps à l’antenne d’un même sujet avec les mêmes personnes qui auraient les mêmes opinions quand on a l’ambition d’informer et de décrypter la complexité du monde qui nous entoure ».
« Injecter de la confiance dans la société »
« Injecter de la confiance dans la société », représente pour Roch-Olivier Maistre un troisième niveau de responsabilité des médias, donc « représenter la société française telle qu’elle est, dans sa diversité et sa complexité. C’est pourquoi l’Arcom accorde tant d’importance, de temps et d’énergie à promouvoir la place des femmes dans les médias, la place de la diversité, du handicap, des territoires ruraux, de toutes les tranches d’âge, toutes les catégories socio-professionnelles ».
Mais « la fiabilité de l’information se défend aussi sur les plateformes en ligne. Le règlement européen sur les services numériques, dont l’Arcom coordonne en France la bonne mise en œuvre, marque une étape essentielle, et nos compétences ont été largement étendues pour superviser les moyens [que les plateformes mettent en œuvre] afin de garantir une lutte efficace contre la manipulation de l’information et une modération pertinente des contenus ».
« réduire les asymétries réglementaires entre acteurs traditionnels et nouveaux arrivants »
Finalement, le président de l’Arcom souligne son action pour que « les efforts des médias audiovisuels pour produire des contenus fiables et de qualité soient rémunérés à leur juste valeur : en luttant contre le piratage des œuvres et des droits ; en plaidant pour un rééquilibrage des recettes publicitaires, de plus en plus captées par les acteurs numériques (…) ; en déployant une visibilité appropriée des services dits « d’intérêt général » dans les nouveaux environnements numériques ».
« Nous appelons de nos vœux une adaptation de notre droit aux réalités actuelles du paysage médiatique, en particulier en matière de concentration, mais aussi pour réduire les asymétries réglementaires entre acteurs traditionnels et nouveaux arrivants ».