C’est par l’exemple d’un point litigieux lors d’une retransmission de match de tennis qui pourrait être vu et revu sous plusieurs angles, partagé et commenté qu’Olivier Huart commence sa présentation. Cet exemple n’est plus de la fiction puisqu’il s’agit d’un test déjà effectué par TDF lors du dernier Open de Metz. Pour Olivier Huart, l’Omnimédia est une expérience augmentée, enrichie, plus personnalisée, et la promesse d’une navigation fluide d’un terminal à l’autre, sans couture.
Il impose une remise à plat des catégories traditionnelles, entre acteurs historiques et acteurs globaux. A la question, est-ce que les premiers sont morts, la réponse est non. TDF, par la voix de son Président, estime en effet que la promesse sera tenue si l’on arrive à marier les technologies entre elles. O. Huart est convaincu que cet omnimédia ouvre un monde d’opportunités à condition de savoir répondre à 3 types d’enjeux : techniques, économiques et sociétaux.
Enjeu Technique : un « omni-technologie » pour un omnimédia ?
La technique crée les bonnes conditions, sans couture. La promesse de l’omnimédia nécessite de rendre possible un monde sans rupture entre les médias et donc d’apprendre à marier, coupler, les technologies entre elles, plus qu’à les opposer. Marier les technologies, c’est le choix de TDF. Déjà, la société mixe l’hertzien à l’internet pour le rendre hybride et permettre de nouvelles offres. TDF compte continuer à investir dans l’hertzien qui représente encore la moitié de ses revenus et un bon quart des investissements. L’objectif de l’entreprise est d’assurer au client final la meilleure expérience possible, via la convergence des technologies.
Enjeu Economique : omnimédia mais uni-gagnant ?
Entre diffuseurs, distributeurs, producteurs, prestataires OTT, les frontières se brouillent. Pour autant, Olivier Huart ne croît pas à une « Vivendisation » du monde. Certes, des géants vont émerger mais pas d’intégration globale mêlant beaucoup de médias et de technologies ensemble, un pied dans le contenu et l’autre dans le contenant.
Bien entendu, des contre-exemples interpellent, des partenariats existent, comme ceux menés par BT ou Sky, et continueront d’exister. Mais, pour O. Huart, ces initiatives représentent plus des approches tactiques opportunistes de « tête de gondoles » qu’elles ne préfigurent d’une verticalisation massive.
Cette intégration massive n’est pas un modèle parce que les métiers sont différents. Les métiers des contenus répondent à des logiques régionales voire globales, au sens où ils nécessitent de trouver des débouchés sur de grandes zones de population pour faire des économies d’échelle, alors que les métiers de la distribution sont locaux. Par ailleurs, les modèles économiques sont aussi très différents, un modèle de hits pour les contenus (pour 10 contenus produits, c’est 1 succès qui assure la rentabilité de l’ensemble) et un business de revenus récurrents pour la distribution. S’il y aura des rapprochements de premier plan entre le secteur des médias et les technologies, le modèle qui se dessine est beaucoup plus mosaïque, protéiforme.
Enjeu Sociétal : omnimedia est-il synonyme de fracture ?
L’omnimédia risque de créer un monde fracturé, n’étant une réalité que pour une minorité d’urbains ultra-connectés. Or, la moitié des Français vivent dans des communes de moins de 10 000 habitants, cela implique que toute la France ne sera pas entièrement couverte par la fibre. Il est très important pour éviter toute fracture que la France des campagnes (10 à 15 millions de foyers) puisse aussi accéder à des contenus de qualité. Cet accès passe notamment par le hertzien, qui reste une technologie d’avenir, le premier réseau Ultra HD en France. Cette technologie est adaptée à la densité de population en France. C’est pourquoi il est nécessaire de marier ce réseau à une technologie de « retour ».
La bande 700 et le risque d’écran noir
Huart profite de son intervention pour interpeler sur le sujet du transfert de la bande des 700 MgH des réseaux TV aux télécoms, d’ici 5 mois. Cette bascule s’accompagnera d’un passage de la TNT en HD via la norme MPEG4. Il est donc primordial d’informer quelques 6 millions de foyers (1 téléviseur sur 6) qu’ils ne pourront plus accéder à la télévision, sauf s’ils s’équipent d’un boîtier ou d’un nouveau téléviseur avant le 5 avril 2016. Tous les acteurs, tant publics que privés, travaillent « comme des damnés » pour anticiper au mieux cette échéance. Mais le calendrier reste très tendu qu’il s’agisse de la problématique technique ou de la problématique de communication. A cet égard, l’ANFR est sur le point de lancer une campagne de communication. Le Président de TDF Huart espère que celle-ci sera efficace, car en juin 2016 débutera l’Euro de football en France.
Pour conclure, le secteur est à la croisée des chemins, ses modèles économiques sont bousculés et tous les acteurs sont confrontés à la nécessité de s’adapter tout en conservant son expertise. Pour TDF, il s’agit de continuer à déployer des infrastructures. Dans cette logique de développement de nouvelles technologies, TDF a d’ailleurs procédé au rachat Ad Valem, société qui relie aujourd’hui 60 stades en fibre optique ou liaisons satellites et qui les équipe de caméras embarquées permettant de remonter des flux multiples lors des événements vers une régie unique. C’est cette technologie qui a été testée lors de l’Open de tennis de Metz, permettant dès demain à chaque téléspectateur de devenir le propre réalisateur de ses événements sportifs.