L'édito de Philippe Bailly

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France Télévisions : vers une meilleure optimisation de ses investissements en création

Après l’annonce du rachat par TF1 de Newen, principal fournisseur de programmes de France Télévisions, Delphine Ernotte rebat les cartes de ses relations avec les producteurs avec un accord sur les droits des œuvres audiovisuelles signé avec les syndicats de producteurs.

Part de production dépendante : passage de 5% à 25% des investissements

L’accord signé porte la part de production dépendante de France Télévisions, c’est-à-dire la production d’œuvres dont il détient en partie les droits, à 25% des investissements dans la création, contre 5% aujourd’hui, plaçant le groupe public au même niveau que ses concurrents privés gratuits. Ce changement lui permettra de produire davantage en interne ou avec des producteurs indépendants en conservant plus de droits d’exploitation sur les œuvres.

Actuellement, la filiale de France Télévisions MFP produit des programmes comme Alex Hugo ou Ce soir (ou jamais !), à hauteur cette année de 3% de la création patrimoniale de France Télévisions. Cette part pourra être amenée à prendre de l’importance : la moitié de la part dépendante des investissements en création « pourra être engagée avec MFP […] seule ou en coproduction avec des producteurs indépendants ».

Cet accord permettra donc de répondre à la fois à l’enjeu de la protection de ses programmes construits en interne ou avec des producteurs indépendants, et à celui de leur exploitation, la détention des droits ouvrant de nouvelles sources de revenus.

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Vers de nouvelles possibilités d’exploitation et de commercialisation

Fin octobre 2015, Delphine Ernotte déclare : « Il faut réinventer un modèle basé sur une conviction: la valeur proviendra de la qualité des programmes et de leur capacité à mieux se monétiser et s’exporter. J’estime qu’il faut investir massivement dans la création ». L’accord y répond, en prévoyant « des engagements mutuels » de la part du groupe et de la production indépendante sur « la durée des droits, l’exploitation sur les plateformes numériques, la circulation des œuvres, le partage de la valeur », que ce soit sur la part dépendante comme sur la part indépendante. En contrepartie d’un engagement d’investissement d’au moins 400 M€ dans la création, et de 20% de son chiffre d’affaires, France Télévisions autorise de nouveaux débouchés aux programmes qu’il diffuse.

Cet accord favoriserait la circulation des programmes sur les différentes chaînes du groupe, mais servirait également leur exploitation en télévision de rattrapage notamment. L’enjeu est de taille : en août 2015, 74,9% des internautes de 15 ans et plus déclaraient avoir regardé des programmes en TVR au cours de l’année passée (+1,9 pts vs août 2014) selon le CNC.

Le groupe public pourrait également tirer des revenus supplémentaires de l’exploitation en SVOD des programmes de fiction, en gardant notamment en perspective la volonté de la présidente du groupe de créer « une plateforme numérique dédiée aux œuvres françaises » et ainsi optimiser davantage ses investissements dans la création.

Enfin, France Télévisions pourrait renforcer sa capacité à vendre de tels programmes et, notamment, à les exporter avec pour objectif un renfort de revenus mais également un soutien au rayonnement de la fiction française télévisée à l’international.

Avec cet accord, Delphine Ernotte pousse France Télévisions vers davantage de maîtrise de l’exploitation de ses programmes et de ses marques. Elle poursuit aussi sa volonté d’économies pour un groupe qui cherche à réduire son déficit tout en maintenant à la fois ses investissements dans la création d’œuvres audiovisuelles et ses projets numériques.

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Voir aussi : l’analyse de la Lettre juridique NPA #29

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