Le mardi 27 septembre, AccorHotels annonce le lancement de Jo&Joe, sa nouvelle offre d’hôtels 2.0 taillée sur mesure pour séduire les millennials, cible « difficile à étonner et à séduire » selon Sébastien Bazin, PDG du groupe. Pour ce projet, AccorHotels a misé sur la collaboration en faisant travailler main dans la main le Marketing Innovation Lab, l’incubateur d’Accor, des étudiants et le « Shadow Comex » du groupe composé uniquement de jeunes de moins de 35 ans. C’est la révolution numérique qui a poussé le groupe hôtelier leader en France à réfléchir à cette offre mais aussi à un nouveau mode de gouvernance impliquant les millennials.
« Un vent nouveau chez AccorHotels »
Un concept novateur : Jo&Joe est un concept à la croisée des chemins entre auberges de jeunesse, locations d’appartement et hôtels. La nouvelle offre d’AccorHotels, qui devrait être inaugurée à Paris en 2018, a été conçue pour les « millennials » et inspirée par leurs comportements et besoins. L’offre est économique et modulable. Sa caractéristique phare est le décloisonnement des espaces tout en proposant des espaces privés. Le client peut agencer les espaces à sa guise, grâce à des meubles amovibles et choisir de passer son séjour seul ou en groupe. Une application mobile permettra aux clients de partager leurs expériences et photos, de proposer des activités aux autres clients du même hôtel et de faire appel au service de conciergerie via un chatbot. Le tout pour un tarif débutant à 25 euros. Une offre qui pour la première fois se positionne sur celles des nouveaux acteurs que sont les auberges de jeunesse haute gamme comme celles proposées par Christopher’s Inn et qui secouent le monde de l’hôtellerie et du tourisme.
Le renouveau du secteur de l’auberge de jeunesse : aujourd’hui, les jeunes, qui représentent 20% des arrivées internationales , ne se contentent plus d’un dortoir lorsqu’ils voyagent mais sont à la recherche d’une expérience unique. Près de 6 jeunes sur 10 estiment que les vacances sont un moment dédié à vivre de nouvelles aventures et à faire des découvertes inattendues, aussi bien culturelles que culinaires. Ainsi, leurs nouveaux modes de vie ont fait bouger le secteur de l’auberge de jeunesse : les groupes anglais St Christopher’s Inn et Generator, implantés à Paris, proposent des nuits à 20 euros dans des chambres et espaces communs hyper connectés, au design très moderne et qui laissent une grande part aux bars et restaurants. A Paris, St Christopher’s Inn affiche un taux d’occupation de plus de 90%. « C’est un produit qui se décomplexe auprès des investisseurs mais aussi des groupes hôteliers qui s’y intéressent, on est loin de l’image de l’auberge où l’on se faisait voler ses chaussures la nuit » pour Vanguelis Panayotis, directeur du développement au cabinet MKG.
Un marché et une cible qui ont longtemps échappé aux groupes traditionnels du secteur hôtelier, ce à quoi AccorHotels a décidé de remédier en lançant Jo&Joe.
Un modèle pensé par le « shadow comex » d’Accor
Un comex de jeunes de 25 à 35 ans : pour penser cette offre, Accor a misé sur la collaboration en interne mais aussi en externe. Des étudiants et professeurs en digital, futurs clients ont en effet pris part au projet. En interne, il résulte du travail réalisé par le Marketing Innovation Lab, un incubateur qui a pour mission de proposer des idées innovantes et par le Shadow Comex du groupe, composé de 13 salariés âgés de 25 à 35 ans venant du monde entier. Ce « comité exécutif de l’ombre » a été lancé en février dernier sur un constat simple de Sébastien Bazin : « 90% des nouvelles sociétés qui menacent les leaders ont été créées par des personnes de moins de 35 ans ». Pour lui, les hôteliers « n’ont vu venir aucune des différentes révolutions digitales ». Le PDG du groupe, en créant cette nouvelle instance chargée de veiller à la transformation digitale du groupe, est convaincu que révolution numérique et organisation managériale sont intimement liées. « Toutes ont adopté une organisation horizontale, irriguée par le partage de l’information qui efface les statuts et facilite les échanges d’idées ».
L’innovation managériale au service de l’innovation numérique : un vrai tournant dans le mode de gouvernance du groupe qui vient compléter le virage stratégique et ainsi enrichir la volonté du groupe de devenir un acteur de l’innovation digitale qui lui avait jusque-là échappé. La capacité d’innovation, l’agilité et la réactivité dans une entreprise sont devenues incontournables pour pouvoir faire face à l’émergence de nouveaux acteurs pensant leurs offres et services « digital first ». Beaucoup d’entreprises voient en l’implication des jeunes dans le processus décisionnel la solution pour pouvoir innover mieux et plus rapidement. Dans le secteur immobilier, la Compagnie de Phalsbourg a elle aussi annoncé la création d’un « conseil d’administration des jeunes leaders » pour prendre le pas de l’innovation. Quant à Adecco, la société de recrutement a mis en place un « Conseil des sages » des moins de 30 ans.
Cela dit, comme le souligne le rapport Dirigeants versus Millennials du think tank Culture Numérique, n’est-il pas erroné de croire que l’innovation digitale est le seul apanage de l’âge? A l’heure de l’ubérisation de la société, la clé du succès d’un mode de gouvernance impliquant de plus en plus de jeunes réside en la communication, la collaboration et la diffusion de la culture numérique aux autres générations d’une entreprise. Les Millennials, porteurs des usages numériques, constituent un vrai puit de connaissances pour leurs collaborateurs au sein d’une entreprise, à la seule condition que soit mise en place une vraie coopération horizontale.
