Les chaînes du PAF, épaulées par des agences parfois hors Hexagone, sont nombreuses à adopter depuis le début de la saison de tout nouveaux looks. Si pour la plupart, il est question de répondre à une logique de groupe à travers une uniformisation des chartes graphiques, il s’agit pour les autres d’une remise à plat totale ayant pour objectif de se démarquer au sein d’une offre toujours grandissante. En interrogeant les Directeurs artistiques de différentes grands groupes audiovisuels français, NPA s’est penché sur les stratégies des services d’autopromotion.
Une rentrée propice à de nouvelles identités visuelles et sonores
A chaque rentrée, les chaînes de télévision n’hésitent pas à faire peau neuve. Changements de positionnement, créations de chaîne, ou rafraîchissements de certains éléments, l’habillage permet de mettre en cohérence la stratégie marketing d’une chaîne ou d’un groupe avec les éléments visuels et sonores. Ainsi, pour Michel Nougué, Directeur de la Marque de M6 ou encore Eric Rinaldi, Directeur artistique du groupe France Télévisions, « l’objectif de l’autopromotion pour un groupe audiovisuel est d’apporter une cohérence, une structure commune ».
Un levier prioritaire du marketing
Qu’il s’agisse d’un groupe ou d’une chaîne, la présence de marques fortes et identifiables est indispensable selon les directeurs artistiques des groupes audiovisuels français. En effet, l’objectif de l’habillage est de renforcer la perception de l’identité des chaînes et de leur positionnement. Il s’agit d’un levier prioritaire du marketing de l’antenne par la cohérence et la fluidité de son expression graphique. Une priorité et plus de sensibilité apportée à l’importance des BA souligne Sabrina Levy, responsable du Mediaplanning d’Eurosport : dans son cas, elle a vu le rachat par Discovery comme un accélérateur pour sa stratégie d’autopromotion.
Depuis plusieurs années, la notion de marque est utilisée pour parler d’une chaîne ou d’un programme d’un point de vue stratégique. Il s’agit ainsi de souligner l’identité forte et immédiatement reconnaissable par les téléspectateurs de tout ce qui touche à l’antenne. « L’habillage et l’autopromotion sont des outils de captation des téléspectateurs » soulignent Olivier Schaack, Directeur Artistique de Canal+ et Philippe Vignola, son homologue de C8/CStar. Ce rôle de la marque, central et structurant, est par ailleurs la conviction de Michel Nougué pour le groupe M6.
Ce lien fort des services d’autopromotion avec le marketing, David Sedel, Directeur Artistique du groupe TF1, le traduit par une volonté de mettre en place « un équilibre nécessaire entre des marques programmes fortes et des marques chaînes ». La question à se poser à chaque bande annonce est en effet de savoir quel est l’objectif du message : mettre en avant un programme aux bonnes audiences ? jouer la proximité avec le téléspectateur ? insister sur le caractère innovant d’un programme ?
La créativité pour une meilleure proximité avec le téléspectateur
Le marketing ne suffit pas toujours. La créativité et le lien avec les téléspectateurs, sont les atouts essentiels des services d’autopromotion. Certains habillages mettent en avant une dimension artistique originale, à la fois dans la mise en scène, les images, la typographie, mais aussi dans l’utilisation d’effets visuels. D’autres tentent de tisser un lien (émotion, surprise, etc.) avec le téléspectateur. Ainsi, par exemple, le nouvel habillage de LCP a été installé avec les visages de l’antenne et des scènes de vie quotidienne pour permettre aux téléspectateurs de s’approprier les valeurs de la chaîne. Michel Nougué (M6) pense qu’aujourd’hui « les chaînes ne sont pas dans le dialogue ; elles ont besoin de plus d’éditorialisation et d’expérience téléspectateur ». Un constat partagé par Sabrina Levy (Eurosport) : « Les contenus des bandes annonces ont évolué vers plus d’éditorialisation et de créativité ». Ce qui se traduit pour les chaînes Eurosport par notamment plus de « local heroes » mis en avant dans les BA. Autre exemple de dialogue avec le téléspectateur, le travail de Gédéon pour la chaîne flamande VTM avec un dispositif qui place les réseaux sociaux au cœur de l’identité de la chaîne
De son côté, David Sedel (TF1) pense que « le besoin de créativité s’explique par le développement de la concurrence ». Ainsi, par exemple, l’habillage de FranceInfo a été conçu pour se démarquer totalement de ses concurrentes : ses idents, réalisés comme des clips, sont tournés spécifiquement aux quatre coins du monde, mettent en avant les promesses que la chaîne souhaite offrir : analyser, explorer, connecter, partager. L’expression graphique est ainsi réduite au minimum pour laisser une grande place à l’image filmée.
L’audace des chaînes étrangères
« Plus d’audace, plus d’humour, plus décalées », c’est le constat de Philipe Vignola (C8/Cstar) à propos des bandes annonces des chaînes étrangères. Un constat partagé avec les agences artistiques spécialistes des habillages TV (Dream On, Gedeon) qui travaillent de plus en plus avec des chaînes étrangères. Celles-ci, particulièrement les chaînes américaines (exemple BA de ABC) ou anglaises (exemple BA de la BBC), ont eu une influence graphique et technique sur les éléments français d’autopromotion et sur la volonté des équipes de débrider leur créativité (exemple BA Canal+ ou France 5).
En parallèle de cette créativité grandissante qui accompagne les nouveaux programmes, les changements de grille, les événements, se pose aujourd’hui la question du périmètre d’intervention des services d’autopromotion au-delà des antennes : quelle utilisation pour le web, pour les réseaux sociaux ? Et en fin de compte, quelle hiérarchie entre la marque groupe, les marques antennes et les marques internet ?