L’ACCeS, Association des Chaînes Conventionnées éditrices de Services vient de fêter ses 20 ans. Aujourd’hui composée de 35 chaînes, son objectif est de favoriser un cadre réglementaire modernisé dans un contexte où les usages et modes de distribution sont en constante mutation. En effet, en termes de répartition d’audience, l’univers des chaînes payantes représentait en juin 2017 une part d’audience de 12,7% sur le total de l’offre télévisuelle en France , un indicateur en net recul par rapport au début de la décennie (19,4% en juin 2011). Egalement confrontées à une baisse des recettes publicitaires ainsi qu’à la double concurrence de la TNT gratuite et des nouveaux services SVoD, les chaînes thématiques, en première ligne face à la concurrence des acteurs internationaux, cherchent à réinventer leur modèle.
Audiences : les chaînes thématiques reculent au profit des TNT gratuites
Auprès des 4 ans et plus abonnés à une offre payante, les chaînes thématiques représentent 24,2% de l’audience en janvier-juin 2017 soit une baisse de -0,8% par rapport à la période janvier-juin 2016 (25%) alors que les chaînes gratuites de la TNT continuent de croître fortement et représentent 21,4 % de PdA (+3%) soit 3 points de moins seulement que les chaînes thématiques. Seules les chaînes thématiques qui diffusent du sport sont en progression constante depuis 2013.
Source : NPA conseil sur données Médiamétrie/Médiamat’ Thematik – Comparaison sur les mêmes périodes janvier-juin
Un chiffre d’affaires et des investissements publicitaires en baisse
Le chiffre d’affaires de l’ensemble des 88 chaînes payantes étudiées par le CSA a diminué de 5% en 2015 et s’établit à 2 939 M€. Cette diminution s’explique par la baisse de 66 M€ (-4 %) du chiffre d’affaires des chaînes Canal+ et de celui des autres chaînes payantes de près de 75 M€ (-6 %). Cette dernière tendance découle notamment de l’arrêt de la diffusion en 2015 de 9 chaînes qui faisaient partie du périmètre retenu en 2014 (Jimmy, Maison+, Cuisine+, M6 Music Black, M6 Music Club, Planète Thalassa, Sport+, TF6 et Montagne TV) et qui cumulaient alors un chiffre d’affaires de plus de 80 M€.
Du côté des investissements publicitaires, selon Kantar Media, en 2016, les annonceurs ont investi 11 354,6 M€ bruts dans la publicité télévisée. Plus de la moitié de ces investissements publicitaires (hors parrainage) ont été effectués sur les chaînes hertziennes historiques (53,9 %), plus d’un tiers sur les chaînes TNT hors historiques (38,2 %) et 6,6 % sur les chaînes numériques payantes (hors parrainage). Autre constat inquiétant, depuis 2011, les recettes publicitaires n’ont cessé de diminuer. Elles baissent de 7% en 2015 pour atteindre un montant de 123 M€ après un recul de 9 % en 2014 et en 2013, et de 16 % en 2012. Deux sociétés enregistrent une hausse de plus d’1 M€ de leur recettes commerciales (Disney Channel et NRJ Hits) là où elles sont trois à perdre plus d’1 M€ (Paris Première, Comédie+ et beIN SPORTS) et cinq à perdre entre 400 000 euros et 1 M€. Les investissements publicitaires restent, comme les années précédentes, concentrés sur un petit nombre de sociétés. Selon les chiffres du CSA, 6 chaînes (Euronews, beIN SPORTS, Téva, Game One, Disney Channel et Africa 24) représentent plus de 50% du total des ressources publicitaires et 16 sociétés enregistrent en 2015 des recettes publicitaires inférieures à 100 000 euros contre 12 en 2014.
Inédits et exclusivités pour se démarquer
Face à la puissance de la TNT et à l’abondance des chaînes disponibles sur les différentes plateformes numériques, les chaînes thématiques, malgré des revenus et des audiences en baisse doivent plus que jamais acquérir des droits exclusifs sur des contenus originaux pour constituer des marques fortes, attirer les téléspectateurs et défendre le montant des reversements versés par les distributeurs.
Or, en diffusion linéaire, la part du nombre d’inédits à la télévision n’arrête pas de diminuer et les rediffusions ne cessent de croître rendant plus difficilement perceptible la part d’inédits dans les chaînes (29,9% des films diffusés sur une chaîne gratuite en 2015 étaient déjà programmés en 2014 ). Ainsi, au mois de septembre 2017, sur 24 chaînes de la TNT analysées, on dénombrait 377 inédits (+ directs) en prime time et deuxième partie de soirée, soit en moyenne 16 inédits par chaîne sur le mois. Du côté des chaînes thématiques, sur 81 chaînes analysées, on dénombre 569 inédits soit en moyenne 7 inédits par chaîne. Sur les services de SVOD, les contenus originaux sont encore peu nombreux, mais le nombre d’exclusivités sur ces plates-formes tend à progresser chaque mois : ainsi en juin 2017, sur les 9 services de SVoD les plus importants, 5 323 contenus exclusifs ont été dénombrés dont 1 747 sur Netflix . Ainsi, les acteurs de la SVoD recherchent chacun à leur manière des accords d’exclusivité sur les contenus afin de se démarquer par rapport à la concurrence et d’attirer le maximum de spectateurs vers leurs offres de service.
Rapprochement avec le marché de la SVOD : susciter l’abonnement avec des contenus pertinents
Dans ce contexte difficile, les perspectives des chaînes thématiques s’inscrivent dans le développement de marques programmes fortes, pertinentes et reconnues, qui jouent un rôle prescriptif pour les consommateurs. Ainsi, ces chaînes doivent répondre aux nouveaux usages délinéarisés, monétisables, et permettre l’accès à un catalogue étendu de programmes, en linéaire comme à la demande, tout en segmentant toujours davantage leur ligne éditoriale pour répondre aux besoins des distributeurs. Le « Baromètre de l’attractivité des chaînes thématiques » montre que pour 57% des Français, les chaînes thématiques payantes proposent des contenus de qualité et toujours pour 57% des Français, elles proposent des contenus variés. Mais surtout, 53% des Français considèrent que les chaînes thématiques payantes proposent des contenus innovants tels que le replay, le contrôle du direct ou la HD, les services à la carte étant de plus en plus plébiscités. Dans ce cadre-là, les opérateurs sont des partenaires essentiels notamment pour les services complémentaires de vidéo à la demande : par exemple, les services du groupe Viacom Mon Nickelodeon Junior et My MTV, en exclusivité Canalsat pour le premier et Canalsat et Numericable pour le second. L’hybridation des services doit donc permettre de répondre à la fois aux nouveaux usages de consommation et à la concurrence des acteurs OTT. Mais s’il s’agit d’une opportunité pour les chaînes payantes, cette transformation pose également des problèmes importants, notamment d’ordre réglementaire avec une nécessaire modification du statut des chaînes thématiques, officiellement demandée par l’ACCeS. L’objectif est de parvenir à un nouveau cadre réglementaire pour les chaînes thématiques, plus proche de celui des SMAD que de celui des chaînes hertziennes. L’ACCeS souhaite ainsi un nouveau « statut de service à la fois linéaire et accessible à la demande » ; une nouvelle assiette de contribution à la production audiovisuelle « basée à la fois sur le linéaire et sur la demande » ; la mutualisation des contributions entre le programme linéaire et le catalogue de programmes à la demande ; la fixation d’un seuil de déclenchement des obligations de contribution au développement de la production cinématographique et audiovisuelle à 10 M€ de chiffre d’affaires, comme dans le cas des SMAD. Une mise en œuvre qui nécessite la modification de la loi du 30 septembre 1986 et donc un processus législatif qui est en cours de réflexion.
Nouveaux usages, nouveaux contenus, nouveaux acteurs, nouvelles technologies, l’OTT vient bousculer l’univers de la TV payante. Il a déjà effacé les frontières entre chaînes thématiques et services de SVOD. Mais au-delà du seul critère de l’audience, comment repérer les plus attractifs ? Ceux qui contribuent le plus à la décision de s’abonner ? Ceux qui seront par la suite les plus consommés ? Avec l’Index Théma, NPA a construit un référentiel d’évaluation qui permet de hiérarchiser l’attractivité de 106 chaînes et services opérant sur le marché français. Un outil structurant pour les chaînes, les distributeurs et les régies.