L’Espagne ne sera pas championne d’Europe de football, mais le projet de réforme audiovisuelle que vient de dévoiler le gouvernement pourrait faire quelques envieux de ce côté-ci des Pyrénées. Jusqu’à inspirer peut-être les pouvoirs publics… pour l’après présidentielle de 2022.
France Télévisions, Radio France, France Média Monde ou l’INA aimeraient certainement bénéficier du même traitement que la RTVE : quand les trajectoires financières des premiers restent inscrites dans des perspectives de réduction de leurs budgets, le groupe public espagnol a bénéficié d’un coup de pouce de 25 % de la part de l’Etat, et le projet mis en consultation publique le 29 juin verra leurs moyens directement indexés sur la bonne santé du secteur audiovisuel, dans son ensemble : il prévoit que les SMAD et les plateformes de partage de vidéos contribuent à hauteur de 1,5 % de leurs revenus annuels au financement de la RTVE, et que les chaînes linéaires en clair y participent à hauteur de 3 %.
Dans le même temps, et en sens inverse, le gouvernement prévoit de supprimer le versement de 0,9 % dont doivent s’acquitter les opérateurs de télécommunication, de manière à leur permettre d’investir plus massivement dans le déploiement de la 5G. Celui-ci avait été instauré en 2010 par le gouvernement du socialiste José Luis Rodríguez Zapatero afin de compenser la suppression de la publicité sur les antennes du service public… selon un raisonnement identique à celui qui avait prévalu un an plus tôt, en France, pour la création de la taxe Copé. Les opérateurs français seront sans doute d’autant plus désireux de bénéficier d’un traitement identique que son produit (1,3 % du chiffre d’affaires des telcos, soit 300 M€ environ par an) n’est plus affecté depuis 2019 à France Télévisions, mais contribue à abonder le budget de l’État.
Chaînes et services de SVoD confondus, l’ensemble des éditeurs français devrait enfin envier leurs homologues ibériques en considérant les niveaux de contribution à la production prévus dans le projet espagnol : 6 % pour l’audiovisuel public, et 5 % pour les chaînes ou SMAD privées, dont 70 % à des productions indépendantes pour l’audiovisuel, et 40 % côté cinéma…
Le projet doit être discuté début 2022 par le Parlement. Au même moment, les équipes des candidats à l’élection présidentielle française seront en train de peaufiner leur programme. Certains professionnels ne manqueront sans doute pas de leur suggérer de s’inspirer de l’exemple espagnol !