Le 15 avril 2021 marquait la 1000e parution de la note de veille INSIGHT NPA. Pour l’occasion 22 contributeurs exceptionnels partagent leur vision des enjeux clés de l’Horizon 2030.
Les crises sont des accélérateurs autant que des révélateurs. Celle que nous vivons n’échappe pas à la règle.
Et que nous a-t-elle appris, ou plutôt rappelé ? D’abord, l’importance sociétale de la télévision, média dont le retour en force tient tout autant à sa capacité à divertir, en apportant évasion et optimisme au sein des foyers, qu’à informer et à nourrir le lien social. Qu’on se le dise : face aux réseaux sociaux sur lesquels prospèrent fausses informations et théories du complot, la télévision est et demeure le grand média du partage, garant d’une information fiable et vérifiée.
Elle a aussi révélé, si besoin était, l’émergence d’un marché « Total Video » mêlant sans distinction réseaux sociaux, chaînes de télévision et plateformes digitales. A l’heure de choisir son contenu, dans ce monde de « l’hyperchoix », la concurrence est violente et frontale. L’explosion du nombre d’abonnés de Netflix pendant cette période ne dit pas autre chose. Elle est logique, tant ce marché favorise de facto, les acteurs globaux et digitaux, qui privilégient l’entertainment. Ils bénéficient de leur puissance et des économies d’échelle que permet leur modèle, du soutien des marchés financiers, sans s’encombrer outre mesure de la responsabilité d’informer, ou de leur impact économique local.
Ainsi, alors même que tout pousse à considérer le local et l’engagement sociétal comme des valeurs d’avenir, les règles du jeu de ce marché bénéficieraient aux seuls acteurs mondiaux ?
Certes, les choses bougent. L’autorisation de la publicité segmentée donne enfin les moyens à la télévision de basculer dans l’univers du « Total Vidéo » et de conjuguer la capacité unique de rassemblement de la télévision et la personnalisation du digital. La transposition de la directive SMA fait, quant à elle, entrer les plateformes dans le financement de la création.
En se projetant sur la prochaine décennie, il demeure toutefois des batailles majeures à mener urgemment pour réduire les asymétries concurrentielles et permettre des coopérations plus équilibrées. Ainsi, là où les plateformes exploitent des droits Monde pour leurs contenus, les diffuseurs nationaux devraient pouvoir bénéficier plus largement des fruits de leurs investissements pour créer de la valeur, à une échelle mondiale pour leurs contenus locaux. La défense de la production indépendante, vitale à notre exception culturelle, doit se faire sans déposséder les chaînes d’une partie essentielle de leurs droits, ni mettre à mal leur compétitivité.
De même, il est urgent de reconnaître qu’entre la fenêtre exceptionnelle de visibilité offerte sur une chaîne de TV en clair et l’intégration dans un catalogue SVOD, il y a un monde. La télévision, à l’instar du cinéma dans le cadre de la chronologie des médias, représente une fenêtre d’exposition qui crée une valeur sans égale pour l’ensemble de l’exploitation d’une œuvre, à condition que celle-ci soit préservée et que chaque exploitation bénéficie pleinement de son exclusivité.
Au-delà de ces nécessaires rééquilibrages, c’est la capacité de notre pays à changer de grille de lecture qui est en question, alors que les marchés se remodèlent, évoluent en profondeur et de plus en plus rapidement. Les groupes locaux ont parfaitement intégré l’impérieuse nécessité de se transformer. Face aux géants internationaux, ils sont prêts à relever tous les défis, si tant est qu’on leur laisse les moyens de se développer et de grandir. C’est plus que jamais la volonté du Groupe TF1 : pouvoir défendre une vision ambitieuse du « Total Video » français, au service du pluralisme et du rayonnement de notre exception culturelle.