Même si leurs usages nous semblent encore limités, les assistants personnels sont amenés à évoluer et à s’intégrer dans chaque espace et chaque moment de notre journée. Initié par Apple (Siri) et Google (Google Now qui va devenir Google Assistant), et suivi par Cortana (Microsoft), c’est finalement Amazon qui a réussi a propulser l’usage de l’assistant vocal avec l’Amazon Echo et son IA embarquée « Alexa ».
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Alexa, l’IA omnisciente : PC, voiture, hub domotique, montre, réfrigérateurs
Inattendu sur ce terrain, Amazon a pourtant réussi son pari en lançant en novembre 2014 l’enceinte intelligente Amazon Echo doté de l’assistant vocal Alexa[1]. Selon le Consumer intelligence Research, Amazon aurait vendu 3 millions d’enceintes Echo dans l’année qui a suivi sa sorti et Amazon espère en vendre la même quantité en 2016, et 10M en 2017[2]. Pour atteindre ces objectifs, Amazon continue d’enrichir son produit en ajoutant des fonctionnalités grâce à une compatibilité de plus en plus étendue, notamment avec les objets connectés pour la maison (Sonos , August Honeywell, Tado, Insteon, Logitech etc.)[3] mais également grâce à l’intégration d’Alexa dans d’autres produits que ceux d’Amazon (Fire TV, Dot, Echo, Tap) via « Alexa Voice Service » qui permet à d’autres fabricants d’embarquer l’intelligence d’Alexa dans leurs produits. Un moyen pour Amazon de gagner du terrain. Après l’intégration dans l’enceinte connectée pour la cuisine « Triby », Amazon a ensuite noué de nombreux partenariats avec d’autres acteurs comme Ford, BMW, Hyundai, ou plus récemment le hub domotique de LG « SmartThinQ », comme annoncé au salon de l’IFA par le Coréen. Au cours des derniers mois nous avons également pu voir des projets d’intégration d’Alexa dans des montres connectés (Omate, Cowatch et Pebble). Dernière information en date, des discussions entre Amazon et Lenovo pour intégrer l’assistant personnel dans les ordinateurs du constructeur Chinois (leader du marché), pour venir concurrencer Microsoft et son assistant Cortana présent sur Windows 10. Amazon qui doit tenir une conférence de presse à Londres le 14 septembre, devrait annoncer pour la première fois la commericialisation de son produit hors US. Un premier pas en Europe dans un pays anglophonne semble logique.
Au-délà de l’écosystème, Amazon souhaite également peaufiner son IA en intégrant par exemple la reconnaissance d’émotions ou en améliorant sa capacité d’auto-apprentissage pour que les échanges deviennent de plus en plus fluides et pertinents. Ainsi, Amazon espère ne pas se laisser distancer par Apple et Google. Il est d’ailleurs surprenant que ces deux derniers acteurs, et particulièrement Google, n’aient pas su prendre l’ascendant sur ce marché. Siri et Google Now souvent jugés déceptifs (et ce, malgré une croissance des usages[4]), ont peut être manqué de plusieurs éléments par rapport à l’Amazon Echo. Tout d’abord, et simplement, le fait de devoir effectuer la requête sur son smartphone (et non pas libre de ses mouvements comme avec l’Echo). S’ajoute à cela, la nécessité de devoir déverouiller l’assistant (pas de microphone activé en permanence, sauf sur certains modèles Nexus) et enfin, le manque d’usages associés.
Evidémment, il existe également des contraintes techniques inhérentes aux smartphones : l’autonomie de la batterie et la qualité des microphones, mais si on fait abstraction de ces deux caractéristiques, il est possible de s’interroger sur le succès qu’aurait rencontré Google s’il avait lancé le premier un objet en écoute permanente. De ce point de vue, Amazon n’inspirait peut-être pas les mêmes craintes d’intrusion dans la vie privée. Et même si son IA est limitée et parfois contraignante pour l’utilisateur (respect d’une syntaxe précise, limité à une requête à la fois), Amazon a su ouvrir suffisament tôt son écosystème pour parvenir à attirer les développeurs et à faire oublier le débat sur le respect de la vie privée.
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Les GAFA se mettent au diapason
Siri va s’ouvrir aux applications tierces avec iOS 10, ce qui devrait marquer une étape dans la transformation de l’assistant personnel qui va prendre une place plus importante chez Apple. Le géant de Cupertino mise aussi sur Siri pour pousser son écosystème domotique, qui va accueillir pour la première fois une application (« Home ») qui centralisera le contrôle des objets connectés.
Google pourrait officialiser de son côté Google Home (présenté en Mai à travers une vidéo impressionnate) lors de sa prochaine conférence le 4 octobre. Très attendu, Mario Querioz (aussi responsable de la Chromecast) a déclaré au sujet du Google Home : « that the device offers a lot of features that are absent in the Echo ». Google semble donc miser sur ce nouveau produit, et pour preuve, le géant de Moutain View a décidé de récupérer plusieurs ingénieurs de Nest qui travaillaient sur la plate-forme Work With Nest pour enrichir les partenariats. Des passerelles avec Nest sont certainement prévues, et devraient donner de la consistance au projet.
De son côté, Facebook, a également quelques cordes à son arc. En effet, le premier réseau social mondial a déposé plusieurs brevets qui démontrent son intérêt pour la smarthome et pour le développement des interactions hommes-machines par le biais du réseau social. Le rachat de la start-up Wit.ai fin 2014, spécialiste des bots et de la reconnaissance vocale (et socle de la plate-forme des bots messenger) pourrait jouer un rôle dans les projets de Facebook. Marck Zuckerberg qui a fait part de son projet sur la maison intelligente, lors d’un événement à Londres il y a 10 jours, devrait en dévoiler plus au public d’ici la fin du mois (la priorité étant clairement d’enrichir la plate-forme de bot conversationnel).
Il est donc évident qu’aucun des géants de la tech ne veut céder du terrain sur ce qui peut représenter, un moyen de récupérer de la donnée à des fins, peut-être différentes pour chacun de ces acteurs, mais qui viendront renforcer leur core-business (vendre d’avantage de produits pour Apple, se renforcer sur le marché publicitaire pour Facebook et Google grâce à une meilleure connaissance de l’utilisateur, et vendre plus de produits pour Amazon). Par ailleurs, des rumeurs évoquent un objet simimaire à celui d’Amazon du côté de Samsung (baptisé « Scoop »).
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Des assistants plus spécialisés et capable de se mouvoir ?
Seulement voilà, il n’y a pas que les GAFA et d’autres initiatives fleurissent ici et là, comme AT&T et Comcast qui ont chacun leurs solutions pour le contrôle domotique. De même, SK Telekom, vient de lancer son propre assistant personnel (Nugu). On pourrait retrouver également dans un avenir proche des robots domestiques[5] dans nos foyers, capable de se déplacer comme le Zenbo d’Asus, ou encore le Buddy de Blufrog.
D’autres types de robots sembables à celui d’Amazon mais avec un écran ont été présentés sous la forme de prototypes : le Xperia Agent présenté par Sony à l’IFA ou le Samsung Otto. En tout cas, on peut imaginer qu’au fur et à mesure que les bots et les assistants personnels se perfectionneront (tous les deux basés sur la compréhension du langage naturel), nous assisteront à un basculement technologique et à des assistants peut-être plus spécifiques. Cette intelligence ambiante viendra compléter ou remplacer les interfaces applicatives que nous connaissons actuellement et les services digitaux se dilueront dans notre environnement et nos conversations.
Si l’on en croit les estimations du cabinet « Tractica », l’utilisation de l’assistant vocal devrait exploser sur les 5 prochaines années : passant de 504M d’utilisateurs en 2016 à 1,83Mds en 2021.
[1] Pour plus d’informations se référer au Flash 793 : Amazon ouvre de plus en plus son écosystème
[2] Amazon’s High Hopes for Echo Sales: https://new.theinformation.com/amazons-high-hopes-for-echo-sales?sticky=false
[3] Liste complète des « skills » (~2000) & produits compatibles : http://www.alexaskillstore.com/
[4] Dans le dernier rapport sur les grandes tendances de l’internet, Mary Meeker annonçait que 20% des requêtes Google s’effectuaient par la voix.
[5] Se référer au flash 800 « Robots domestiques : les usages se développent »