Comme promis lors du Show Hello au mois d’avril dernier, l’opérateur télécom s’apprête à commercialiser auprès du grand public une deuxième version de sa clé TV, permettant d’accéder à des contenus OTT sur tous les écrans connectés disposant d’une prise HDMI. Le lancement de ce nouveau terminal, plus puissant, s’accompagne d’une stratégie d’ouverture autour de la technologie logicielle OCast développée pour l’occasion et proposée en Open Source pour tous les opérateurs tiers et développeurs d’applications.
La première Clé TV se présentait sous la forme d’un stick HDMI plutôt rudimentaire et aux fonctionnalités restreintes. Commercialisée depuis 2015 à 39 euros puis 49 euros, et alors qu’Orange ne l’a jamais vraiment mise en avant ni communiqué autour, il s’en est pourtant vendu plusieurs centaines de milliers d’exemplaires, preuve d’un intérêt réel des clients de l’opérateur pour ce type de dispositif.
La Clé TV V2, annoncée à un prix similaire, apporte plus qu’une simple mise à jour. L’objet lui-même est très différent puisqu’il ne s’agit plus d’une clé à proprement parler mais d’une mini box avec un cordon HDMI et un cordon USB pour l’alimentation, reprenant la forme d’un galet qui s’accompagne d’une télécommande ultra basique à cinq boutons pour naviguer dans les contenus sans avoir à passer par un smartphone ou une tablette. Elle présente en sus des avancées techniques et structurelles importantes.
Techniquement, le Bluetooth a été ajouté pour la télécommande de même que la norme WiFi 802.11 ac offrant un débit beaucoup plus rapide que précédemment. Et, alors que la V1 se limitait à une résolution HD pour quelques chaînes seulement de la TV d’Orange, la V2 grâce à sa puissance est compatible 4K et HDR. Surtout, d’un point de vue fonctionnel pour l’utilisateur, la Clé change de dimension. La V1 ne pouvait être alimentée en contenus que via une application dédiée – La Clé TV – se limitant dans les faits à une sélection de chaines de la TV d’Orange (en direct et en rattrapage sauf pour les chaînes du groupe TF1), y compris les chaînes payantes OCS ou BeIn Sports. Quelques applications tierces ont été progressivement ajoutées, mais en nombre extrêmement limité et toutes issues de l’univers d’Orange, Orange Radio, Vidéo à la Demande d’Orange (via l’application VOD Clé TV) ou OCS. Dans les faits la V1 était donc réservée aux clients Orange déjà existants, la Clé TV leur permettant de retrouver les contenus pour lesquels ils sont abonnés sur un écran secondaire sans avoir à souscrire à l’option Multi-TV. Tout change avec la V2 puisque la gestion de la clé n’est plus assurée par une application dédiée mais repose sur un protocole de casting open-source développé par Orange, OCast, permettant de l’utiliser avec n’importe quel terminal mobile – Android ou iOS – et sur l’ensemble des applications qui accepteront d’implémenter OCast via les SDK mis gratuitement à disposition. OCast est donc une solution complète de transmission, basée sur des protocoles standards, gratuits et open-source qui sont faciles à intégrer pour les développeurs (webapps HTML5 côté récepteur et SDK pour les expéditeurs à la fois pour iOS et Android).
Derrière la Clé TV V2, qui doit être considérée comme un nouveau terminal OTT au sein de l’offre Orange, se trouve donc surtout OCast, technologie logicielle open source qui vise à positionner l’opérateur comme un fournisseur de technologies alternatif pour tous les acteurs souhaitant adopter le casting s’en avoir pour autant envie de s’enfermer dans un écosystème géré par Google, Apple, Amazon ou Roku. La clé sera d’ailleurs également disponible en marque blanche. OCast, développée au sein des technocentres d’Orange avec l’appui de la filiale Viaccess-Orca pour toutes les briques qui concernent les solutions de protection de contenus (DRM) est de nature ouverte. Trois publics sont visés : les développeurs et éditeurs d’applications bien sûr mais également d’autres opérateurs télécoms proposant des offres TV (Deutsche Telekom testerait la solution) ainsi que des constructeurs de matériels qui, à l’instar des fabricants de téléviseurs pourraient intégrer nativement la technologie. Ainsi, alors que OCast répondait initialement à un impératif pour Orange, celui de s’adresser à la fois à ses clients Android (80% de ses abonnés) et iOS (20%) sans être prisonnier de Google Cast ou Air Play, elle lui permet désormais d’espérer l’émergence de nouveaux écosystèmes autour de ses produits. Idéalement, et pour s’en tenir au territoire français, OCast pourrait ainsi être utilisé par l’ensemble des opérateurs permettant ainsi l’émergence d’un protocole unique pour que les contenus puissent communiquer avec l’ensemble des box sans distinction du FAI.
Si l’on est encore très loin d’une telle avancée, OCast, outre son caractère ouvert, possède un autre atout de taille avec une compatibilité Netflix. En effet, derrière une stratégie d’hyper distribution revendiquée, le service américain exige en fait une certification, NRDP pour Netflix Ready Device Platform, qu’il délivre lui-même, pour tous les terminaux qui souhaitent faire fonctionner l’application officielle Android TV. Cette certification, un bout de code qui fonctionne comme une signature, permet d’installer Netflix depuis le Play Store sur les terminaux. Alors que le cast de Google était une des rares solutions compatibles, la solution logicielle OCast est elle aussi NRDP Ready, offrant un argument de choix pour tous les partenaires qui souhaiteraient l’implémenter. Si rien n’est encore officiel, Netfix devrait donc être accessible via OCast. Un premier pas important qui pourrait avoir des effets d’entrainements pour les autres services de streaming, à commencer par les principaux services français, de myCanal à Molotov en passant par BeIn Connect ou d’autres. Derrière la nouvelle clé d’Orange se cache donc un enjeu stratégique important pour les opérateurs dans leur tentative de proposer des solutions alternatives à celles des GAFA pour accéder simplement aux services OTT.