L'édito de Philippe Bailly

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CES 2023 : la fin du grand show ?

La vidéo est toujours visible en ligne. Le 7 janvier 2016, il y a sept ans jours pour jour, ou presque, c’est au CES que Reed Hastings annonçait le déploiement à l’échelle mondiale de Netflix. Professionnels du streaming et de la publicité en ligne avaient progressivement rejoint les industriels du home entertainment, qui se disputaient chaque année à Las Vegas le record du plus grand écran de TV. La place de la vidéo était à son apogée au sein de l’événement.

Sept années plus tard, Samsung, LG, Sony, TCL et autres leaders de l’électronique grand public sont toujours présents pour l’édition 2023 qui se tient du 5 au 8 janvier. La compétition s’est déplacée – les écrans qu’ils présentent sont pliables, enroulables, sans fil… – mais cela ne suffit pas à les maintenir au centre de l’attention. Les nouveaux buzzwords se nomment voiture connectée, innovation durable ou encore Metavers et Web 3.0, comme l’illustre le nombre de stands dédiés aux différentes thématiques : 219 pour l’entertainment and content, mais 227 pour le Metavers et le Web 3.0, 378 pour la sustainibility, 599 pour la Vehicle Technology.

Et à regarder de plus près la liste des exposants, on ne trouve guère qu’Amazon, NBC Universal et sa cousine au sein de Comcast NBCU Freewheel ou une poignée d’acteurs des FAST et de l’AVoD (Filmrise, Tubi, Xumo) parmi les usual suspects de la chaîne de valeur audiovisuelle.

Si la multiplication des écrans sur des appareils tiers (jusqu’à 32 pouces, par exemple, sur un modèle de réfrigérateur présenté par Samsung) peut aider à grapiller quelques miettes de budget temps supplémentaire, les développements entrepris par les industriels pour que leurs téléviseurs satisfassent mieux les adeptes du jeu vidéo joueront en sens inverse dans la bataille de l’attention.

Reste la reconnaissance vocale, pour optimiser les services d’aide au choix de programmes. Mais, au global, l’innovation semble bien dans un bas de cycle dans le secteur audiovisuel.

Concernant les pays du nord en tout cas, cette absence de rupture technologique, combinée aux effets à la montée du reconditionnement, confortent les prévisions de Dataxis sur l’inversion de la courbe du nombre d’écrans per capita (lire dans cet Insight NPA : Electronique grand public : la fin du toujours plus d’écrans).

Du côté du verre à moitié plein, éditeurs et distributeurs devraient apprécier la stabilisation de la ressource à mobiliser pour intégrer leurs services à de nouveaux environnements ; s’agissant du verre à moitié plein, ils ne pourront plus utiliser les nouveaux devices comme autant de chevaux de Troie aidant à faire entrer leurs contenus chez le consommateur final.

Le célèbre content is king devrait alors être plus que jamais de rigueur… mais le faire prévaloir exigera plus que jamais du nez dans le choix des programmes mis en production, alors que la mauvaise humeur persistante de la bourse impose aux éditeurs de revoir à la baisse leurs investissements dans les contenus. Pour des raisons similaires, la contraction risque également de s’imposer aux budgets de marketing destinés à soutenir l’adoption des offres D2C.

Dans ces conditions, le retour au modèle historique de collaboration entre éditeurs et distributeurs (opérateurs ou pure players) pourrait succéder à la vague D2C. Appliqué à l’optimisation des revenus publicitaires, Suisse et Belgique montrent de ce point de vue le chemin (lire dans cet Insight NPA : Le nouveau modèle économique de la BVoD modifie les relations entre éditeurs et opérateurs)