Ce lundi 19 mars marquait la fin de la période de médiation confiée par le gouvernement à Dominique d’Hinnin et François Hurard en vue d’élaborer une nouvelle chronologie des médias. Sans que la ministre de la Culture ait encore fait savoir si un accord lui semblait possible, ou si elle lançait à défaut une réforme par la voie législative, les prises de position publiques exprimées ces derniers jours par les acteurs de la filière ne poussent pas à privilégier la première option. Cela n’est au fond pas si étonnant.
Réunir un consensus supposerait que l’ensemble des acteurs accepte de privilégier un objectif collectif – maximiser la consommation, donc le financement global du cinéma – par rapport à leurs intérêts individuels – disposer de la fenêtre la plus favorable pour optimiser l’exploitation qu’ils ont des films. D’autant plus délicat qu’on manque de données chiffrées (benchmarks, études économétriques…) démontrant l’impact des différents scénarios sur le niveau des différentes contributions (entrées en salle, ventes de DVD, téléchargements en EST, locations VoD, abonnements aux bouquets de TV payante ou services de SVoD payante, audience, donc recettes publicitaires associées aux films projetés en TV gratuite…), donc le total.
Dès lors, la difficulté particulière au dossier chronologie des médias est qu’il fait par définition des perdants – ceux dont la fenêtre exclusive se trouve raccourcie – sans capacité de leur fournir par ailleurs des compensations. Si l’on ajoute qu’aucun acteur ne dispose d’une position significative sur l’ensemble des exploitations, donc ne peut raisonner en termes d’équilibres internes, plus encore : la France ne connait pas le modèle d’intégration verticale des studios américains, la présence de Canal+ en TV gratuite et en SVoD reste accessoire par rapport à son poids dans la TV payante, le constat est le même pour le service de VoD de TF1, versus les antennes gratuites du groupe…
Rechercher un consensus autour de la question de la SVoD en la traitant un sujet isolé semble donc de plus en plus irrémédiablement voué à l’échec. C’est là peut être l’erreur du gouvernement.
Lors des premiers mois du quinquennat, le Premier Ministre et la ministre de la Culture ont multiplié les engagements à opérer une réforme globale du secteur audiovisuel. La consultation publique conduite à l’automne sur l’évolution des règles applicables en matière de publicité, la médiation confiée à Dominique d’Hinnin et François Hurard, les chantiers de réflexion lancés autour de l’évolution du secteur public ou encore l’annonce que la future loi audiovisuelle intègrerait également les dispositions applicables aux acteurs privés offraient autant de possibilité pour trouver des terrains de compromis avec chacun des acteurs – perdant ici mais gagnant là.
Les rebondissements de ces derniers jours suggèrent une approche « en silo » plus classique… A moins que, le gouvernement ait prévu cet atterrissage global dans la phase législative qui va s’ouvrir maintenant, et que pourrait compléter l’évolution du décret de mars 1992 sur la publicité.