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Le Ministre de l’Action et des Comptes publics Gérald Darmanin a présenté jeudi dernier le deuxième projet de loi de finances rectificative pour 2017 devant la commission des finances de l’Assemblée nationale. Ce texte procède à des ajustements, suite aux censures par le Conseil constitutionnel de la taxe sur la publicité diffusée par les chaînes de télévision, la taxe sur la diffusion en vidéo physique et en ligne de contenus audiovisuels et, plus récemment, la taxe sur les services de télévision (TST-E).
Pour ces trois taxes, le PLFR 2 étend la qualité de redevable, au-delà des seuls éditeurs de services de télévision, à toutes les personnes, y compris les régisseurs de messages publicitaires et de parrainage, qui encaissent des sommes soumises à l’impôt. Ainsi, lorsque les régies reversent aux éditeurs une fraction des sommes versées par les annonceurs et les parrains, les taxes sont dues par chacune de ces deux personnes sur la part qui leur revient effectivement.
L’examen du PLFR commencera en commission des finances le 29 novembre.
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Le 30 mars 2017, le Conseil constitutionnel répondait à une question prioritaire de constitutionnalité posée par la société EDI-TV (M6), à l’occasion d’une requête tendant à la restitution de la taxe sur la publicité diffusée par les chaînes de télévision due au titre de l’année 2015. M6 contestait la constitutionnalité du paragraphe II de l’article 302 bis KG du Code général des impôts qui prévoyait que cette taxe était assise sur le montant des sommes versées par les annonceurs pour la diffusion de leurs messages publicitaires, aux éditeurs de services de télévision « ou aux régisseurs de messages publicitaires ». Elle faisait valoir que le fait d’obliger les chaînes à payer une taxe sur une somme perçue non par eux mais par les régisseurs de messages publicitaires constituait une violation du principe d’égalité devant les charges publiques. Les Sages ont validé ce raisonnement et déclaré les mots « ou aux régisseurs de messages publicitaires » contraires à la Constitution.
S’agissant des effets de cette censure, le Conseil avait jugé qu’aucun motif ne justifiait de reporter ses effets et qu’elle interviendrait donc immédiatement, mais ne « pourrait être invoquée à l’encontre des impositions qui n’ont pas été contestées avant cette date ».
Les termes déclarés incompatibles avec la Constitution étaient quasiment identiques à ceux prévus par la taxe sur la diffusion en vidéo physique et en ligne de contenus audiovisuels (taxe « vidéo »), à l’article 1609 sexdecies B du même code. Epargnée par la QPC, les Sages n’avaient donc pas eu à se prononcer sur cette taxe.
Ensuite, le 28 juillet dernier, le Conseil d’Etat décidait de transmettre au Conseil constitutionnel une nouvelle QPC posée par la société EDI TV, cette fois-ci au sujet de l’article L. 115-7 du code du cinéma et de l’image animée, qui détaille l’assiette de la taxe sur les éditeurs de services de télévision. Cette dernière était également assise sur les sommes versées par des annonceurs et parrains aux « régisseurs de messages publicitaires et de parrainage », pour la diffusion de messages publicitaires. Sans surprise, le Conseil constitutionnel a déclaré la taxe non conforme à la Constitution, le 27 octobre dernier, puisqu’elle avait pour effet de « soumettre un contribuable à une imposition dont l’assiette peut inclure des revenus dont il ne dispose pas ». Cependant, les Sages ont choisi de reporter au 1er juillet 2018 la date de prise d’effet de la déclaration d’inconstitutionnalité : « d’ici à ce que le législateur y remédie, s’il choisit d’intervenir, la taxe continuera donc à être prélevée en application des dispositions contestées ». Un report salué par le Bureau de liaison des organisations du cinéma (BLOC).
Alors que le groupe M6 appelait les pouvoirs publics à « rééquilibrer » le financement du CNC et profitait de l’occasion pour rappeler la nécessite de « faire contribuer plus fortement les nouveaux acteurs » dans la création, Frédérique Bredin avait immédiatement demandé au gouvernement de « sécuriser la taxe pour l’avenir et de la consolider pour le passé pour éviter tout effet d’aubaine », et ce dès la prochaine loi de finances rectificative. Un appel entendu par la ministre de la culture, qui a rapidement réagi pour confirmer que cette sécurisation serait présentée dès la mi-novembre.
Le deuxième PLFR 2017, présenté jeudi dernier en commission des finances de l’Assemblée par le Ministre de l’Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin, prévoit aux articles 19 et 20 une triple sécurisation visant les deux taxes invalidées par le Conseil constitutionnel ainsi que la taxe « vidéo », dont les termes auraient également pu faire l’objet d’une QPC. Pour rétablir un équilibre devant les charges publiques et ne faire peser sur un contribuable qu’une taxe sur des sommes qu’il perçoit effectivement, le gouvernement étend la qualité de redevable, au-delà des seuls éditeurs de services de télévision, à toutes les personnes, y compris les régisseurs de messages publicitaires et de parrainage, qui encaissent des sommes soumises à l’impôt. En conséquence, l’abattement forfaitaire de 4 %, qui visait à prendre en compte les frais de régie, est supprimé.