Le service de vidéo par abonnement vient de publier ses résultats pour le troisième trimestre 2015. Si l’activité sur le marché domestique déçoit avec un recrutement en deçà des attentes, l’international poursuit sa croissance sur un rythme soutenu. Sur le dernier trimestre, trois lancements sont prévus en Europe méridionale (Espagne, Portugal et Italie) avec un doublement des pertes internationales.
Des résultats solides dans l’ensemble
Entre juillet et septembre 2015, Netflix a gagné 3,6 millions d’abonnés supplémentaires, portant à 69,17 millions le nombre total d’utilisateurs du service SVOD à travers le monde. Un total en hausse de 30% sur un an. Au troisième trimestre, l’activité streaming aura généré 1,58 milliard de dollars de revenus (+29% vs. T3 2014), soit son niveau le plus haut depuis le lancement du service. Une progression en phase avec les résultats enregistrés depuis le début de l’année 2015, eux aussi à +29% sur les neuf premiers mois avec un chiffre d’affaires de 4,46 milliards. Le bénéfice opérationnel s’élève quant à lui à 277 millions de dollars sur le troisième trimestre (+26%), à 772 M$ sur les trois premiers trimestres (+29%). En ajoutant l’activité DVD, certes en recul en nombre d’abonnés (5,1 M avec près d’un million de membres en moins en un an) mais pour laquelle tous les indicateurs financiers sont au vert (maintien d’un bénéfice, d’une marge et d’un ARPU élevés), le chiffre d’affaires total de Netflix flirte avec la barre des 5 milliards de dollars à fin septembre (4,92 Mrds $).
États-Unis : ralentissement apparent mais prise de valeur réelle
Sur le marché domestique, la croissance s’est avérée plus faible que prévu avec un gain de « seulement » 880 000 abonnés sur le troisième trimestre (43,2 M au total), soit le niveau de recrutement le plus bas depuis plus d’un an (+570 000 abonnés au T2 2014). Un résultat accueilli froidement outre-Atlantique d’autant que les prévisions de la firme de Los Gatos tablaient sur un recrutement à hauteur de 1,15 million de nouveaux utilisateurs. Un décalage de près de 25% avec les estimations initiales qui confirme les difficultés actuelles de Netflix à renouer avec un rythme de croissance élevé sur son marché. Si la croissance domestique était de 24% en 2013 (T3 2013 vs. T3 2012), elle s’est établie à 20% en 2014 et n’est plus que de 16% en 2015. Une tendance qui interpelle quand on sait que l’entreprise ambitionne d’enrôler 20 millions de souscripteurs supplémentaires ces prochaines années sur le territoire national. Pour autant, en distinguant les abonnés payants des utilisateurs gracieux, il apparaît que le service de streaming a bien franchi la barre du million de recrutés au troisième trimestre, 1,011 million exactement sur son offre payante. C’est en réalité le contingent d’utilisateurs gratuits, en recul sur la période (-10,5%), qui affecte le volume de recrutés global. Une situation qui permet à Netflix de retrouver son ratio d’utilisateurs gratuits/payants le plus bas observé aux USA (2,6%) et, à l’inverse, de porter son ARPU à son niveau le plus haut (8,43$/mois). Une prise de valeur indispensable pour compenser des coûts de développement à l’international de plus en plus lourds. Avec un trimestre à plus d’un milliard de dollars de recettes (+21% en un an ; > 3 milliards $ depuis le début de l’année) et près de 350 M$ de bénéfices (1 milliard sur les trois premiers trimestres), Netflix vient en effet de boucler sa période la plus faste financièrement sur le sol américain.
International : croissance soutenue mais activité déficitaire
Le constat est diamétralement opposé à l’international où le recrutement de nouveaux abonnés s’accélère mais où les pertes s’alourdissent d’une période sur l’autre. 2,7 millions d’utilisateurs ont ainsi été recrutés sur le seul troisième trimestre (gain le plus important sur trois mois), dépassant les 2,4 millions attendus par les dirigeants de Netflix. Le service frôle désormais les 26 millions d’utilisateurs en dehors des États-Unis, soit 10,1 millions de plus qu’un an auparavant (dont 9,6 millions d’abonnés payants). Une croissance soutenue qui a un coût, colossal en l’occurrence puisqu’en dépit d’un chiffre d’affaires en forte hausse (+50% vs. T3 2014) pour atteindre plus d’un demi-milliard de dollars sur le trimestre, l’activité internationale demeure déficitaire avec de nouvelles pertes à hauteur de 68 M$ (> 300 M$ sur les 12 derniers mois). Les dépenses marketing qui accompagnent le lancement du service dans chaque nouveau territoire (Japon, le dernier en date, le 2 septembre 2015) et le travail de recrutement/fidélisation dans les pays récemment ouverts s’envolent elles aussi (+60% en un an). Une situation qui devrait s’intensifier sur la fin d’année 2015 avec l’ouverture de trois nouveaux marchés (Italie, Espagne et Portugal) et des projections qui font état de pertes pratiquement multipliées par deux par rapport au troisième trimestre (117 M$).
Tout l’enjeu pour Netflix ces prochaines années résidera dans sa capacité à générer de la croissance rentable à l’étranger. Si l’activité cumulée streaming/DVD sur le territoire national offre des garanties de financement pour le développement du service en dehors des frontières américaines, un nouvel équilibre devra toutefois être trouvé tant le poids de l’international dans le parc d’abonnés Netflix est amené à croître rapidement dans les mois à venir. Autour de 38% fin septembre 2015 (contre 30% en 2014 et 23% en 2013), le poids des abonnés Netflix dans le reste du monde pourrait en effet dépasser celui des abonnés américains dès la fin de l’année 2016 selon certaines estimations[1], tenant compte notamment des déclarations de Reed Hastings (CEO) qui prévoit une présence du service dans l’ensemble des pays du globe à cette échéance[2]. Des prévisions qui tablent par ailleurs sur le franchissement du cap symbolique des 100 millions d’utilisateurs à cette même échéance.
Évolution du parc d’abonnés Netflix, avec distinction USA/International (en millions ; Q1 2013 – Q4 2016)
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[1] nScreenMedia : http://www.nscreenmedia.com/netflix-growth-in-the-us-disappoints-international-shines/
[2] https://gigaom.com/2015/01/20/netflix-wants-to-be-everywhere-in-the-world-in-the-next-two-years/