L'édito de Philippe Bailly

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Réforme de l’audiovisuel : le service public… mais bien au-delà

Auditionnée ce mardi 12 mars par la commission Culture du Sénat, Rachida Dati est apparue déterminée à achever avant la fin 2024 la réforme de l’audiovisuel public et, pour cela, à ce que l’Assemblée nationale soit saisie avant l’été de la proposition de loi du sénateur Lafon, que le Sénat a adoptée en juin 2023 et qui servira de base au débat.

L’année en cours représente la « dernière fenêtre de tir » pour réaliser cette réforme, a jugé la ministre de la Culture, selon laquelle il serait « incohérent » d’en conduire la discussion en 2025, alors que les mandats du président de l’Arcom et de deux membres de l’Autorité arrivent à échéance en début d’année, et que celui de la présidente de France Télévisions Delphine Ernotte vient à son terme à l’été.

Si gouvernement et Assemblée nationale confirment le schéma retenu par le Sénat, France Télévisions, Radio France, France Médias Monde et l’INA pourraient donc se retrouver regroupées dès le 1er janvier 2025, sous la holding commune France Médias. Et d’ici là, la ministre attend des dirigeants des quatre structures qu’ils avancent, sans tarder, sur la mise en œuvre des rapprochements « qui ne dépendent pas de la loi ».

Mais les débats ne devraient pas se limiter au service public. Et la dynamique enclenchée ce 12 mars par Rachida Dati pourrait déboucher sur la première « grande loi audiovisuelle » de la décennie.

En quelques articles, le titre II de la proposition de loi Lafon, d’abord, soulève quelques-uns des enjeux-clés de la donne audiovisuelle : les relations producteurs / diffuseurs à travers la titularité des mandats de commercialisation des productions indépendantes, la concurrence des plateformes étrangères sur le terrain de la captation des droits (en l’occurrence ceux des compétitions sportives, événements d’importance majeure compris), montée en puissance des nouvelles normes de diffusion numériques (DAB+ et TNT-UHD), organisation de l’interactivité et gestion des données (consécration du standard d’interactivité hbbTV…)… et, pour certains, plus spécifiques aux éditeurs privés : assouplissement de l’accès à la publicité (troisième coupure dans les films de plus de deux heures) ou conditions de « respiration » du paysage audiovisuel (réduction de l’obligation de conserver une chaîne de la TNT au moins cinq ans, avant tout projet de cession)…

A travers leur discussion, et les dispositions complémentaires qui pourraient s’y ajouter par voie d’amendement, c’est l’équilibre d’ensemble du secteur que la réforme pourrait remodeler.

La proximité des calendriers pourrait encore inciter à y intégrer certaines des propositions des Etats Généraux de l’Information, qui doivent s’achever à la fin du printemps. Interrogée ce 12 mars, la ministre s’est montrée prudente, dans l’attente de la présentation de ces conclusions. Mais on peut d’ores et déjà anticiper que certaines d’entre elles – concernant les missions particulières de l’audiovisuel public dans le domaine de l’information, le renforcement du modèle économique des médias, ou la recherche d’une relation plus équilibrée avec les plateformes – pourraient facilement trouver leur place dans la proposition de loi reprise à son compte par la ministre de la Culture.

Si l’on ajoute que trois quarts des autorisations de la TNT auront en parallèle été réattribuées par l’Arcom à la fin de l’automne, 2024 pourrait rester comme une année de profonde transformation pour l’audiovisuel français.