« Je porte un message simple et clair : les réseaux sociaux avant 15 ans c’est non. » C’est par cette formule que Clara Chappaz, ministre déléguée chargée du numérique et de l’intelligence artificielle, a décidé de résumer sa position dans la Tribune du dimanche du 11 mai visant à interdire l’utilisation des réseaux sociaux par les moins de 15 ans. Mme Chappaz précise qu’elle souhaite imiter la solution retenue en France pour vérifier l’âge des utilisateurs de services pornographiques afin d’organiser des sanctions pour les plateformes ne vérifiant pas efficacement l’âge d’inscription de leurs utilisateurs. La ministre ajoute : « Mon travail est aujourd’hui de rallier une coalition, avec l’Espagne, la Grèce et maintenant l’Irlande, pour convaincre la Commission européenne. Je me donne trois mois pour mobiliser nos partenaires européens autour d’une ligne simple : la vérification d’âge comme impératif. Si nous n’arrivons pas à aboutir à la rentrée, la France prendra ses responsabilités. A défaut d’accord européen, c’est en France qu’il faudra agir ». Le message est ainsi clair : soit la vérification d’âge passera par l’UE, soit, à défaut, la France agira seule. Avant la ministre, le Président de la République avait déclaré dès juin 2024 souhaiter interdire les réseaux sociaux aux moins de 15 ans. Et il a confirmé le 10 juin la détermination de la France à faire son affaire de l’environnement européen : « Je nous donne quelques mois pour faire la mobilisation européenne sinon je négocierai avec les Européens pour que nous, on commence à le faire en France ». Pour être complet, il convient de préciser que le droit français prévoit déjà une telle interdiction depuis 2023, avec la notion de « majorité numérique » à 15 ans, et que le règlement européen sur les services numériques (DSA) donne déjà un cadre aux réseaux sociaux en vue de la protection des mineurs. Au final, la capacité à mettre en œuvre l’interdiction qui a été évoquée suppose de relever un triple défi : que les institutions européennes autorisent la France à poser un cadre plus restrictif que celui du DSA. Que soit confirmée la possibilité d’application extraterritoriale de la règle française (la réponse à la question préjudicielle soulevée par le Conseil d’Etat devant la CJUE devrait clarifier ce point). Et que la Commission européenne n’oppose pas aux autorités françaises le principe du pays d’origine posé par la directive relative au commerce électronique.